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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MARDI 4 OCTOBRE 1994

À PROPOS DE L'ECHEC DU PLAN CLINTON

Le paradoxe de notre démocratie est qu'en France nous n'attendons pas de la rentrée parlementaire qu'elle réforme la sécurité sociale. Vivant par procuration, le peuple souverain attend, étrangement, que d'autres tranchent des systèmes d'assurance maladie et d'assurance vieillesse...

Le Plan Clinton pour l'instauration d'un système de santé unique aux Etats Unis joue alors dans ce schéma, le rôle inverse des Directives européennes. L'adoption, éventuelle, de ce plan par les Etats Unis tient lieu d'espérance au dernier carré des partisans du Monopole de la Sécurité sociale, comme les Directives européennes sur l'Assurance sont les signes annonciateurs de la victoire, aux yeux des partisans de la Liberté.

L'échec du Plan Clinton a donc pour nous beaucoup d'importance. Cet échec, souhaitable, démontrera que le système de protection dite "sociale", mettant au premier plan l'Assurance maladie, et présentant le Monopole comme la panacée -- ce projet est condamné d'avance par l'évolution économique...

Il y a bien entendu des causes immédiates qui peuvent accélérer l'échec de ce plan. Ainsi en est-il des prochaines élections de dites "intermédiaires" de novembre où joueront des contingences strictement politiques : impact du scandale Whitewater, succès ou échec de l'intervention en Haïti, facteurs locaux, campagne de la droite américaine contre l'avortement, etc. Tout cela n'ayant rien à voir avec le dossier lui-même... Encore que certains commentateurs se demandent au contraire si l'une des raisons de l'intervention en Haïti n'est pas précisément l'échec du projet de protection santé...

Certes le projet se fonde désormais sur un document incompréhensible de 1 342 pages (le record du Traité de Maastricht est enfoncé...) dont les économistes soulignent qu'il confierait, d'un seul coup, à des bureaucrates la gestion de 14% du PIB américain...

Mais à la vérité, tout le monde sent bien que ce projet est en recul par rapport aux annonces qui en avaient été faites par Hillary Clinton.

Un important économiste américain M. Michaël Rothschild a développé dans le Wall Street Journal (1) que ce projet a échoué avant même d'entrer en vigueur. Tout simplement parce qu'il continue la lignée de ce que nous appelons, en Europe, l'Etat Providence (c'est une antiphrase -- l'Etat catastrophe serait plus adéquat pour traduire l'expression Welfare State).

Clinton lui-même, à la veille de la présentation du rapport le situait dans une continuité typique du Parti démocrate américain "Soixante ans après le commencement de ce combat par Roosevelt... 50 ans après les 3 tentatives infructueuses de Truman... 29 ans après l'institution légale de Medicare par Lyndon B. Johnson... nous avons fait la moitié du chemin... nous pouvons aller jusqu'au bout".

L'apport essentiel de M. Rothschild à la critique de ce plan est précisément de montrer que cette continuité condamne le projet. Tout simplement parce qu'entre-temps le monde a changé. En 1971, 3 ingénieurs dans un hangar de Californie (Intel) inventent les microprocesseurs qui vont changer le monde. En 1982 la démocratisation de l'Informatique commence... Apple lance le Mac Intosh "pour que 1984 ne soit pas 1984". A l'Age de la Machine a succédé l'Age Informatique.

Les grands systèmes sont condamnés. Or le Welfare State, et tout particulièrement les conceptions qui président à la sécurité sociale française reposent sur la croyance dans les grands systèmes. Partisan d'une vision biologique de l'économie, (2) Michaël Rothschild n'évoque point, dans cet article le destin qui fut celui des dinosaures, mais l'analogie s'impose. Encore que les dinosaures n'étaient guère méchants, cependant que les monopoles, particulièrement en France le sont...

Bref cette réflexion nous paraît d'autant plus intéressante qu'elle vient d'un économiste américain qui demeure persuadé que l'Amérique est à même d'exercer une nouvelle hégémonie si elle fait confiance aux petites unités de production, et non aux dinosaures. Ce pays, encore très puissant, est à la croisée des chemins... De même, selon nous pour l'Europe... qui risque de disparaître si elle ne liquide pas l'héritage des Monopoles.

JG Malliarakis

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(1) 26 septembre 1994

(2) son livre "Bio-nomics" paru en 1990 présente l'économie comme "éco-système" ; il dirige un Institut dit de Bio-économique à San Francisco.