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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 25 NOVEMBRE 1994

LA BOMBE EST-ELLE DÉSAMORCÉE ?

Jusqu’à ces derniers jours on croyait que Raymond Soubie était M. Optimisme.

Il est en effet l’homme que Balladur avait fait mettre en avant (il est officiellement "auteur d’un Livre Blanc à paraître sur l’avenir de l’assurance maladie") pour désamorcer la bombe de ces questions avant l’échéance présidentielle…

À lire la dépêche ci-dessous, on se demande si la bombe est vraiment désamorcée.

• Dépêche AFP datée du 22 novembre 1994 •

Raymond Soubie s’attend à des déficits publics vertigineux

Raymond Soubie, coauteur d’un Livre Blanc à paraître sur l’avenir de l’assurance maladie, a estimé mardi que la France devait s’attendre à des déficits publics "absolument vertigineux au cours des 15 prochaines années", financés "en grande partie par l’emprunt". Intervenant lors des 6es rencontres nationales de l’Union Hospitalière privée (UHP), il a en outre indiqué que ce rapport, commandé en mars dernier par Matignon, sera remis "tout prochainement à son destinataire", le Premier ministre Édouard Balladur.

L’État s’apparente à "un ménage qui ne cesse de s’endetter pour rembourser ses dettes", a prévenu Raymond Soubie, faisant allusion aux déficits du régime général de la Sécurité sociale (105 milliards de F, en cumulé, prévus fin 1995) et du budget de l’État (301,4 milliards de F en 1994). M. Soubie, ancien conseiller social de Jacques Chirac et Raymond Barre à Matignon, s’est montré très réservé sur les projections du rapport gouvernemental sur la Sécurité sociale qui table sur un retour à l’équilibre des comptes du régime général en 1997, hypothèse qu’il juge "optimiste".

Concernant la première condition avancée par le gouvernement, une croissance des recettes de 3,5 % en francs constants, il a estimé "qu’on l’obtiendra peut-être d’ici 1997", mais "qu’il est évident que ce ne sera pas le taux moyen pendant les six années à venir".

Quant à la seconde condition, "une stabilisation des dépenses", il a souligné que "cela ne s’est jamais produit dans l’histoire" de la Sécurité sociale. Les conditions d’un retour à équilibre sont "très séduisantes, mais elles n’existent pas", a-t-il conclu. • • •

Cette intervention met en lumière dans la pratique un point bien connu : le financement de la dette publique par emprunt apparaît une fois de plus comme une insulte aux générations futures, c’est-à-dire en l’occurrence aux actuels cotisants du système de retraites par répartition… Un tel financement devrait être interdit par la Constitution.

Nous ignorons ce que cette intervention doit à la chaleur communicative des banquets ou au refroidissement de certaines relations entre amis de 30 ans.

Le fait est, qu’à l’évidence, M. Soubie dit ici la vérité. Vérité qu’on s’acharne à dissimuler aux Français, avec tant de ruses grossières que les Français savent désormais parfaitement à quoi s’en tenir : leur système de protection sociale, l’un des plus chers du monde, est fichu. Les politiciens de droite ont cru habile de reculer l’échéance. C’est une grande, et inutile, lâcheté qui a commencé avec la réunion "sociale" de Vitré d’où toute contestation avait été délibérément écartée. Le résultat se lit dans les sondages. Si une cure de désintoxication du socialisme avait commencé en 1993 on n’en serait là, ni sur le terrain de la conjoncture économique, ni sur celui de la conjoncture politique. Les indices économiques prouvent (production industrielle de septembre et consommation d’octobre) démentent la reprise. À ces indices correspondent aussi des sondages politiques.

On peut d’ailleurs imaginer que le discours de Raymond Soubie est lui-même indexé sur la conjoncture politique. Il pourra dire : j’étais Cassandre, vous ne m’avez pas écouté.

Les animaux intelligents quittent les navires en perdition.

Seuls les perroquets répètent encore : "Bienvenue à bord du Titanic, le capitaine Balladur et son équipage vous souhaitent une excellente traversée".

JG Malliarakis

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