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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
JEUDI 16 NOVEMBRE 1995
QUAND JUPPÉ MET LE PAQUET ... C'EST UN PAQUET DE JUPPÉ
Bien entendu, si l'on se contente de coller son nez sur la liste de ces "mesures" dirigistes annoncées par M. Juppé à l'Assemblée Nationale et applaudies fiévreusement par une majorité de parlementaires, eh bien certes on peut dire, d'une ou l'autre des idées, émises par le Premier ministre : cette idée là n'est pas aussi sotte que les autres. Ainsi cette idée que le Maire de la Commune ne soit plus obligatoirement le président du Conseil d'administration de l'Hôpital est une idée sur laquelle on peut s'accorder.
Sur le plan de la méthode, cependant, si au lieu d'écouter des émissions débiles à 7 H du matin à la télévision M. Juppé avait écouté ce que disait Alain Madelin le matin même à 8H20 sur France Inter il aurait compris, que, ce que demandent les Français de bon sens ce n'est pas une réforme technocratique de la sécurité sociale mais une réforme démocratique et une réforme libérale responsabilisant les Caisses.
Inacceptable par exemple, que l'on ose proclamer la caducité d'une loi sous le prétexte qu'on a trouvé plus commode de la violer, depuis 1989, en ne procédant pas aux élections aux Conseils d'administration des caisses, élus pour 6 ans en 1983. C'est donc bien de droit divin désormais que Force ouvrière présidera la CNAM, etc..
Les réactions des hommes politiques de la Majorité sont assez intéressantes. Par exemple Giscard "votera la confiance sans état d'âme" et Balladur "approuve l'essentiel". Voila de fins politiques dont on oubliera les propos lorsque le plan aura échoué.
Car il échouera.
Mais on observe par exemple que les esprits plus lucides comme Jean-Pierre Fourcade, président de la Commission des Affaires sociales du Sénat, se contente de complimenter le discours en déclarant "cohérent". Cohérent oui, mais pertinent ? Quand à M. Daniel Hoeffel, sénateur centriste du Bas-Rhin, s'il reconnaît le plan pour "ambitieux" il craint que "la centralisation sorte encore renforcée" Etc.
Beaucoup plus grave est la déclaration de M. de Rohan, président du groupe RPR au Sénat, qui applaudit en affirmant : "On s'attaque aux racines du mal. Il ne s'agit pas d'un plan de replâtrage mais de reconstruction de la Sécurité sociale qui nécessitera un soutien sans faille de la majorité parlementaire au gouvernement en faisant taire les voix discordantes",
Faire taire les voix discordantes ? Qu'est-ce à dire ?
Non ce plan ne s'attaque pas à la racine du mal.
Non ce plan n'est pas autre chose qu'un plan de replâtrage.
Non il ne reconstruit pas la sécurité sociale, ou plutôt s'il la reconstruit c'est toujours sur les mêmes bases.
Non l'autoritarisme de M. Juppé ne soignera pas un malade qui a besoin précisément de plus de liberté et de plus de responsabilité.
Peu importe si, sur tel ou tel point, on peut considérer comme éventuellement juste telle ou telle orientation. Même d'ailleurs lorsqu'on va dans un sens logique on y va maladroitement. Pour la "hausse" des taux cotisations maladie des retraités comment comprendre que cette mesure s'étale sur 2 ans et demeure limitée à un taux futur de 3,8% (contre 6,8% pour la cotisation de base des salariés). Il eût été préférable, plus juste, et mieux compris de l'opinion de passer tout de suite et carrément à 6,8%. Présentée comme l'a fait M. Juppé, cette mesure apparaît comme un prélèvement supplémentaire et non l'abrogation d'un privilège incompréhensible.
L'essentiel est qu'à nos yeux outre que l'on demeure très loin de savoir ce qui sera fait concrètement pour une meilleure solidarité, en faveur de ceux qui en auraient besoin, on renforce les tares fondamentales du système. A vocation universelle nous dit-on...
Les technocrates semblent d'ailleurs s'orienter vers une procédure tendant à humilier un peu plus la représentation nationale en la faisant voter des dispositions législatives et, même, une réforme constitutionnelle. On fera donc "taire les voix discordantes"...
... jusqu'aux prochaines élections législatives, où d'autres voix encore plus discordantes rentreront en force au Palais Bourbon si on laisse faire de la sorte M. Juppé.
JG Malliarakis
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