... La réédition de Sociologie du communisme … Le catalogue des Éditions du Trident
"Si le dicton populaire dit vrai, le Trésor Public français s'enrichit à toute allure en ce moment: 230 milliards de Francs seront affectés par le Trésor à rembourser les emprunts qui arrivent à échéance en 1996, et cette somme sera grossie de 100 milliards en 1997, année où devra être éteint l'emprunt Balladur. Mais le dicton populaire laisse entendre que celui qui rembourse prend la ferme résolution de ne pas s'endetter à nouveau. Or, ce n'est évidemment pas le cas car la dette publique va augmenter encore, et l'État, par l'intermédiaire du Trésor devra placer pour près de 500 milliards de Francs d'emprunts nouveaux. Voilà qui dénote non seulement une gestion dangereuse des finances publiques, mais aussi une lourde pénalité pour l'économie française. Et, dans ces circonstances les débats actuels sur les taux d'intérêt paraissent bien mesquins.
LES FINANCES MAL GÉRÉES
Il faut rendre justice au gouvernement Juppé: ce n'est pas lui qui a gonflé la dette publique. Ses prédécesseurs à Matignon y ont excellé. Le tandem Balladur-Sarkozy a ajouté 800 milliards au passif déjà légué par les socialistes, puisque de 2 100 milliards en 1992 nous sommes passés à 2 900 milliards en 1994, et nous nous trouvons aujourd'hui à plus de 3 000 milliards.
Mais le gouvernement Juppé n'a pas non plus dégonflé la dette publique. Il a reconduit un déficit budgétaire de près de 300 milliards de Francs. Avec les 230 milliards consacrés au remboursement des emprunts antérieurs, c'est donc une nouvelle dette de 500 milliards de Francs qui sera souscrite par le Trésor cette année. Le gouvernement Juppé n'a pas fait les efforts requis pour diminuer les dépenses publiques, son budget est aussi mauvais que les précédents. L'argent des privatisations, moins substantiel que prévu parce que l'on a freiné le programme pour des raisons "sociales", aura été dilapidé en dépenses nouvelles au lieu d'éponger une partie de la dette antérieure.
On est donc placé dans la situation classique de celui qui emprunte pour rembourser ses dettes, et qui doit emprunter de plus en plus, parce que, fondamentalement, il dépense plus qu'il ne gagne.
UNE ÉCONOMIE PÉNALISÉE
L'argent dont le Trésor Public a besoin doit bien être pris quelque part ailleurs. Dans des temps plus heureux (ou du moins le croyait-on), il suffisait à l'État de demander à la Banque de France de fabriquer l'argent dont il avait besoin. Mais ce financement par création monétaire a toutes les chances de déboucher sur une inflation importante, et nulle banque centrale au monde ne saurait prendre ce risque aujourd'hui: l'inflation est considérée (à juste titre) comme la dernière des solutions.
Donc c'est sur l'argent existant, sur l'épargne réalisée par les particuliers et les entreprises, que l'on va puiser les fonds nécessaires au Trésor. 500 milliards de Francs, c'est autant qui va manquer aux emprunts privés.
Pour canaliser ces sommes vers le public plutôt que vers le privé, l'État dispose d'une série d'artifices. D'abord, il propose aux épargnants des formules intéressantes, avec taux d'intérêt élevés et avantages fiscaux divers. Ce sont les OAT (inventées par Edmond Alphandéry, Obligations Assimilables au Trésor), et les BTN (Bon du Trésor Négociables). En 1995, le Trésor a placé pour près de 300 milliards de ces titres d'emprunt à moyen terme. On ne doit pas oublier aussi que l'État dispose de toute une série de "rabatteurs" qui orientent vers le Trésor (et aussi vers les entreprises publiques) la plus forte partie de la capacité financière des Français. Croyez-vous que votre argent est bien au chaud dans les Caisses d'Épargne ? Pas du tout, il est recyclé par la Caisse des Dépôts et autres institutions financières qui le prêtent au Trésor. Êtes-vous satisfaits de vos contrats d'assurance-vie, croyez-vous que l'épargne y est capitalisée ?
En réalité, les assureurs (nationalisés pour une bonne part) reprêtent à l'État. Ainsi donc, une masse financière considérable va vers le Trésor. Par comparaison, ce qui reste pour le secteur privé (les entreprises qui émettent des actions ou des obligations) est ridicule: moins de 100 milliards de Francs.
L'épargne
française est donc pour l'essentiel consacrée à boucher
les trous de l'État. Elle fait défaut aux investissements productifs,
qui permettraient de créer des emplois, d'adapter notre économie à la
compétitivité mondiale."
"LA NOUVELLE LETTRE" hebdomadaire dirigé par
Jacques Garello est publiée l'ALEPS Association pour la liberté et
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