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Sociologie du communisme … Le catalogue des Éditions du Trident

COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALEs

MERCREDI 18 FÉVRIER 1998

LE DERNIER PROCÈS SERA CELUI QUI METTRA FIN AU MONPOLE

La classe politique doit cesser de prendre les Français pour des imbéciles

Le 4 mars prochain, devant la cour d'Appel d'Agen, à nouveau, le mouvement de lutte pour les libertés sociales sera conduit à repartir dans le débat judiciaire, avec comme objectif d'ouvrir une brèche dans les monopoles assuranciels dits "sociaux" protégés abusivement, et subventionnés grassement, par l'État français.

Incontestablement, l'esprit du Droit européen tend à briser ces monopoles.

Quiconque a lu de bonne foi, non seulement des Directives sur les assurances 92-49 et 92-96 mais également du Traité de Rome, de l'Acte unique et même des deux énormes pavés signés à Maastricht en 1991 et à Amsterdam en 1997 a parfaitement compris que l'esprit de la construction européenne c'est la libre concurrence entre les producteurs des pays membres. Ce n'est pas pour rien que l'expression originale était celle de Marché commun.

L'Europe, diront certains, n'est pas un marché. De même les Mutuelles affairistes aiment-elles à imprimer sur leurs affiches grises "votre santé n'est pas un commerce"… Ceci pour se permettre de facturer plus cher leurs services, ou plus exactement de maintenir les considérables privilèges fiscaux sans lesquelles elles disparaîtraient.

À partir de 1984, a ainsi commencé à se dessiner, sur la pression de certains États monopolistes une exception dite sociale, tendant à préserver de la concurrence les systèmes de sécurité sociale fondés sur "la solidarité". Cette logique prend date au sein de la jurisprudence européenne par l'arrêt Duphar de 1984, arrêt dont ont découlé logiquement les deux arrêts déboutant jusqu'ici la contestation du mouvement de lutte pour les libertés sociales : l'arrêt Poucet-Pistre de 1993 et l'arrêt Garcia de 1996.

Ces deux arrêts disent, en substance que :

1° les organismes de sécurité sociale exerçant un service public ne doivent pas être considérés comme des entreprises au sens des articles 85 et 86 du Traité de Rome, même s'agissant d'entreprises privées.

2° les législations nationales sont libres d'organiser la protection sociale obligatoire.

Nous sommes encore très loin de la question essentielle que se posent les travailleurs indépendants en France et qui est celle de choisir librement, dans n'importe quel pays européen, le fournisseur d'assurance en maladie et en vieillesse le plus conforme à leurs besoins au plus juste prix.

Non seulement cette revendication ne saurait être explicitement contredite par aucun tribunal européen sur la base du Droit communautaire, mais il est parfaitement clair que les rejets obliques et les atermoiements dans l'affirmation et l'application de cette liberté ne seront que des péripéties.

Il y aura beaucoup de procès, sans doute.

Le dernier procès sera celui qui mettra fin au monopole des caisses.

Le jugement rendu à Luxembourg en 1996 est en effet intervenu à un moment critique de la construction européenne. Lors du Congrès de Versailles de février 1996, le porte-parole du parti alors gouvernemental en France (le parti du chef de l'État et du chef du Gouvernement) avait prononcé un discours terrifiant pour l'avenir même des institutions européennes, y compris pour la Cour de Justice. Dans le texte de M. Mazeaud, il était clairement dit que si le droit dérivé devait menacer la sécurité sociale française, affirmée en septembre 1995 par le président de la république comme une base de l'identité française, la France remettrait en cause le droit dérivé, c'est-à-dire la substance même de la construction européenne. Elle allait avoir l'occasion de le faire à partir du printemps dans le cadre de la Conférence intergouvernementale de Turin.

On comprend qu'alors, le 26 mars 1996 la Cour, menacée dans son fondement, ait rendu l'arrêt Garcia.

Aujourd'hui les choses ont évidemment évolué. M. Mazeaud n'est plus grand-chose et il ne parle plus qu'au nom d'un parti vaincu et disloqué, y compris dans son discours monopoliste. Et surtout la Cour de Luxembourg va bien devoir se mêler de question de sécurité sociale dans un sens différent puisqu'elle entre dans la logique du Traité de Maastricht.

Le paradoxe de ce traité est en effet qu'il énonce dans son protocole social : (article 3-1) : "Le Conseil statue, à l'unanimité, sur proposition de la Commission, après consultation du Parlement européen et du Comité économique et social dans les domaines suivants : la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs", etc. La logique, définie en 1984 par l'arrêt Duphar réservant le prétendu droit souverain des États à maintenir les monopoles sociaux est donc explicitement abolie par l'effet de ce protocole applicable aux États membres – à l'exception de la seule Angleterre.

JG Malliarakis
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