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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 2 SEPTEMBRE 1998

MARIO MONTI SUGGÈRE UNE GRÈVE GÉNÉRATIONNELLE...

Commissaire au marché unique, M. Mario Monti est l'un des deux membres de la Commission européenne nommé par le gouvernement de Rome. Le public français n'entend, hélas, guère parler de lui sauf quand le lobby des boutiques détaxées monte une campagne de presse pour dénigrer son action… Le 26 août il était l'invité, à Rimini, de "Communion et Libération" qui réunissait plusieurs milliers de jeunes. Le sujet de son intervention pouvait paraître aride. Il s'agissait de parler de l'Europe et de la Fiscalité. Ce qu'il fit avec toute la précision de son information et la force de ses convictions. "Il faut, déclara-t-il, être lucides jusqu'au bout". Comme le souligne le quotidien La Repubblica (27.8.98) "connaissant le personnage, il est difficile de parler d'une invitation à la révolte. Mais il parlait d’autorité...".

Qu'avait suggéré le Commissaire européen au marché unique Mario Monti ?

Tout simplement "Une grève de génération. Oui, car s'il est une grève justifiée, je ne crois pas qu'il s'agisse de la grève générale mais de la grève générationnelle. Celle des jeunes qui vont au-devant d'une probabilité élevée de ne pas trouver de travail, et s'ils en trouvent, de se voir soutirer par l'impôt, pour payer les pensions des générations précédentes, une part plus élevée que celle des classes d'âges qui leur correspondent dans le reste de l'Europe."

Sur la question du chômage, si le taux moyen de celui-ci est pour les hommes équivalent à ce qu'il est dans le reste de l'Europe (9,5 % en Italie contre 9,1 % en Europe) on doit bien comprendre que l'Italie possède un taux de chômage pour les moins de 24 ans, supérieur à ce qu'il est dans le reste de l'Europe - un taux de chômage féminin accru - et enfin une aggravation du phénomène dans le Mezzogiorno.

Certes, Mario Monti n'attaque pas le gouvernement italien. Mais il remet indirectement en cause les tares du système : assistanat, dirigisme, étatisme, redistribution, pensées depuis 40 ans "en faveur" du Mezzogiorno et qui ont empêché l'essor dans le sud de la péninsule des petites et moyennes entreprises omniprésentes dans les villes du nord à forte tradition marchande. Cessons de croire aux fatalités "culturelles". Interrogeons-nous plutôt, aujourd'hui, sur l'impact de l'enseignement scolaire car, à bien examiner les chiffres, le chômage des jeunes touche 34 % des Italiens de moins de 24 ans, et 20 % de la moyenne des Européens de moins de 24 ans.

Nous donnons raison à M. Monti, s'il propose la "grève des jeunes contre le chômage" mais il devrait la proposer à tous les jeunes Européens !

Les réactions de la classe politique italienne sont généralement défavorables. "Proposition inacceptable" disent les dirigeants syndicaux, toutes bureaucraties confondues : CGIL, CISL et UIL équivalents respectifs de nos CGT, CFDT et FO … La plupart des partis rechignent à l'exception de l'organisation de jeunesse de Forza Italia (centre droit) et de l'expert des systèmes de retraites Giuliano Cazzola qui déclare "ceux qui critiquent aujourd'hui le commissaire européen devraient reconnaître que les mensonges ont les jambes courtes. La réalité est que notre système de retraites est injuste et indéfendable".

La critique de ce système de retraites nous paraît être en effet la partie la plus spectaculaire du propos de M. Mario Monti car, l'un des derniers en Europe avec le système français à maintenir la préférence pour la répartition, il semble à la veille d'une crise financière majeure, ayant accumulé 2,5 millions de milliards de lires (8 000 milliards de F) de dettes… créées, aux dires de M. Monti par le patronat, les syndicats et les politiciens. Grève des jeunes, ou "grève générale" proposée par les bureaucraties syndicales pour bloquer tout débat comme l'ont fait les bureaucraties syndicales françaises à l'automne 1995, la question des retraites en Italie pose un problème majeur pour l'Europe.

JG Malliarakis

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