J'en suis sûr, et j'en suis même témoin. Nombreux auront été les Français à applaudir, au moins dans leur for intérieur, à la mise à sac du Mac Donald en construction à Millau. Cette action violente a fait 1 million de F de dégâts. Elle s'est déroulée dans le paisible département de l'Aveyron à l'initiative des activistes gauchistes de la Confédération paysanne. S'agissant, d'ailleurs, de la riposte européenne à la taxation unilatérale de 100 % infligée à des produits de qualité comme le fromage de roquefort, la cause du Libre échange se trouve, ici, du côté de l'Europe. En dehors du fait qu'une cible symbolique est ainsi désignée, à peu de frais, au profit d'une agitation dont le Libre échange ne semble pas la motivation fondamentale (sa motivation fondamentale est au contraire la lutte contre le Libre échange) nous ne sommes pas certains que les intérêts des producteurs de roquefort y trouvent leur compte.
Beaucoup de braves gens croient également salutaire de mettre en place le double étiquetage des fruits et légumes. On leur dit, sur les chaînes de télévision, que, de la sorte, le consommateur sera mieux informé. Ils le croient.
Dans la crise du prix du porc on a vu également monter au créneau la même Confédération paysanne pour dénoncer l'un des rares secteurs agricoles français où fonctionne quelque chose qui ressemble à la Libre entreprise.
Il est grave qu'une conjonction "d'excellentes raisons" se mobilise de la sorte au service d'une très mauvaise cause, dont il nous semble urgent de dénoncer les avancées de ces dernières semaines, avec la complicité du ministre français de l'Agriculture, M. Glavany.
À juste titre, en effet, l'excellent bulletin Tocqueville Magazine (13 août) titre son éditorial : "Les producteurs de fruits et légumes n'ont pas compris, ils se trompent d'adversaires". Et de résumer ainsi une analyse que, pour l'essentiel, nous partageons :"L'ennemi commun des producteurs et des distributeurs, c'est justement le pouvoir étatique avec tous les camarades : innombrables élus, chefs syndicalistes, titulaires de multiples "fromages" publics qui prélèvent, par l'impôt et les charges sociales, des sommes indues sur la chaîne de production et de distribution".
Le Ministère français de l'Agriculture, citadelle technocratique par excellence, et la Confédération paysanne ne sont pas seuls en piste. Le quotidien Le Monde (10 août) abritait un grand encart des fédérations de producteurs sur le thème "trop de promotion tue la production". Mais l'origine de la mise en cause systématique de la grande distribution, et du commerce en général, est à trouver ailleurs. Le quotidien toulousain La Dépêche publie complaisamment, le 11 août un "témoignage", d'ailleurs unique, où "Raymond agriculteur" semble s'alarmer que "la crise peut s'étendre". Ce "témoignage", dont la dialectique est bien connue, n'est pas celui de n'importe quel agriculteur. C'est celui du camarade Raymond Girardi, responsable du MODEF, (syndicat communiste voué à la "défense des exploitations familiales"), dans le Lot-et-Garonne. À la question "Qui sont les responsables ?" sa réponse est la suivante : "La grande distribution, les centrales d'achat et de distribution jouent un rôle important. La grande distribution détient près de 70 % du marché, elle va au plus offrant. La Belgique, la Hollande, l'Espagne ou même le Maroc sont nos premiers concurrents. Pour survivre on est obligé de s'aligner sur la concurrence, alors on vend à perte".
Il nous semble assez pitoyable que Le Figaro Économique (14 août) tombe dans le piège et affirme que "les Agriculteurs saluent le double étiquetage". "Les Agriculteurs" dites-vous ? Quels agriculteurs ? On notera que Mme Haller, au nom de l'Office national interprofessionnel des fruits et légumes souligne : "Nous ne tenons pas à ce que le double affichage perdure".
Glavany, au contraire, triomphe : "C'est, dit-il, une grande première dans le Droit de la Consommation".
Notre ministre avoue même envisager clairement "de reproduire ce type de dispositif dans les mois et les années qui viennent".
Qu'on se le dise !
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