COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
VENDREDI 30 AOÛT 1999
NOUVELLES INVENTIONS DU FISCALISME
Le quotidien économique Les Échos (27 juillet) annonçait en bas de sa première page une nouvelle vague de prélèvements obligatoires. En elle-même cette simple information est présentée de manière discrète et elle n'aurait pas du demeurer inaperçue. On aurait aimé entendre immédiatement les ténors de l'opposition et les têtes pensantes du patronat institutionnel tonner contre. Mais, dans cette affaire, la perversité du système franchit un nouveau cran dans la sottise et l'hypocrisie. Car ces nouveaux prélèvements sont annoncés comme destinés à "l'allégement des charges patronales".
En avril le premier ministre M. Jospin faisait écho aux discours ambigus prononcés par le chef de l'État, quelques semaines auparavant. Il annonçait des réductions de charges patronales à hauteur de 25 milliards.
En juin commençait à se répandre le bruit d'une "décision définitive" créant, sans trop se préoccuper de l'avis du parlement, un futur fonds spécifique au sein du système de sécurité sociale. Cette nouvelle Caisse serait alimentée par un certain nombre de prélèvements obligatoires et elle les redistribuerait en déduction de l'allégement des cotisations patronales ; Ingénieux n'est-ce pas ?
Première source la Taxe sur les tabacs. Elle rapporte à l'État, et coûte aux contribuables, environ 47 milliards. Ce montant serait affecté
Il est à remarquer que la taxe sur les tabacs pourrait peut-être être affectée plus légitimement aux impacts du tabagisme sur les dépenses d'assurance maladie. Mais une telle logique échapperait lors à la technocratie. On n'en parlera donc pas.
Deuxième source : la TGAP. C'est Taxe générale sur les activités polluantes. Cette "écotaxe" coûtera, nous dit-on, auxdites activités, en rythme "de croisière", environ 12 milliards. Un tel montant estimatif peut sembler trop ou trop peu si on veut bien évaluer le coût social, urbanistique et sanitaire de la pollution et considérer que la perception même de cette taxe introduira une sorte de droit à polluer On annonce fièrement que la TGAP atteindra un rendement de 4 milliards en l'an 2000.
Troisième source : la CSBS. C'est la Cotisation sociale sur les bénéfices des sociétés, dont le produit pourrait être du même ordre. Petite habileté : dans un premier temps ladite cotisation "remplacera" la surtaxe de 10 % de l'impôt sur les sociétés, et au départ le taux de cette CSBS serait réputé faible, entre 1,5 et 3 %. Gageons que la surenchère classique au sein des groupes politiques de l'Assemblée nationale permettra très vite de le renforcer.
Avec ces deux taxes CSBS + TGAP = (à terme) 25 milliards on "financera" une "aide structurelle", réduisant de manière modulée ("archi-complexe" dit Le Figaro du 28 juillet) les charges des entreprises assumant le passage aux "35 heures".
Comme on le voit nos fiscalistes s'amuseront bien cet été. De subtiles négociations vont permettre de rendre le nouveau petit monstre encore plus difforme. On se rapproche de l'exemple du BAPSA. Créé en 1962 pour compenser le manque à gagner de la MSA résultant de la politique agricole commune et de la baisse du nombre des exploitants, ce "budget annexe" monstrueux est une addition complètement hétéroclite de 15 à 20 taxes et prélèvements alimentant environ 85 % des prestations de la MSA.
C'est vers cela qu'on s'achemine sous prétexte d'alléger les charges patronales : imposture et folie.
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