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MERCREDI 26 JANVIER 2000

L'ÉTAT EMPLOYEUR AUX PRISES AVEC LES 35 HEURES

Très tôt, le projet d'une législation ramenant autoritairement la durée du travail à 35 heures a intéressé les syndicats de fonctionnaires. Comme une partie importante de leurs effectifs pratiquaient de longue date des horaires inférieurs aux fatidiques 35 heures, ils baptisèrent ce projet "réduction du temps de travail" et même RTT.

Limiter le temps de travail d'un fonctionnaire ce n'est pas toujours une opération bien périlleuse. On peut même imaginer des circonstances où cela améliore le service public. Il y a bien des demeures dans la Maison de ce Père. La diversité est la règle. Et il est simplement curieux que l'État n'ait pas imaginé que cette diversité se retrouve dans l'entreprise privée. Seule l'entreprise privée est supposée coulée dans une sorte de moule unique, celui de la mine et du haut fourneau, celui des romans de Zola, celui de la grande usine et du travail à la chaîne, celui des Temps Modernes de Charlie Chaplin.
Dans certaines entreprises d'État fortement bénéficiaires (France Télécom, EDF) ou subventionnées (SNCF) le passage aux 35 heures, pardon : la réduction du temps de travail, semble s'être opérée sinon sans heurts, du moins sans difficulté majeure.

Voici cependant qu'un gros caillou bloque la machine à La Poste. Elle le bloque tellement que le système risque de s'acheminer vers une paralysie et une pagaille de plus en plus inquiétantes chaque jour.


L'État employeur n'est pas capable de gérer chez lui ce qu'il prétend imposer à l'économie française : concilier une réforme abstraite et globale avec les impératifs d'une gestion concurrentielle et concrète, véritablement au service du public.

Car La Poste n'est pas ce petit travail tranquille sur lequel on ironisait autrefois sur l'ancien sigle des Postes Télégraphes et Téléphone. En 300 ans du monopole institué par Colbert, la Poste française a rapporté de l'argent à l'État sur quelque 298 exercices. Les années déficitaires ont été au milieu du XIXsiècle celle de l'institution du timbre poste imité de l'Angleterre, puis à la fin du XXsiècle l'époque du gouvernement Bérégovoy. Ailleurs, l'État cherche à protéger le monopole au profit des intérêts de l'économie mixte . Ici on protège non pas "le service public" mais d'une part le profit politique et économique du service postal monopoliste, et d'autre part, bien plus important sans doute le monopole des Chèques postaux et du réseau financier de la Poste.


La Direction de La Poste n'a guère de marge de manoeuvre. Elle gère 306 000 postiers avec des difficultés considérables pour définir les horaires de 100 000 facteurs dont les tournées sont réétudiées, chronométrées, etc selon de nouvelles normes. On n'est pas dans le salon de Mme Aubry, on est dans le concret. Et les syndicats de cette entreprise d'État sont majoritairement CGT et SUD, avec qui il est impossible de discuter.

Il était donc bien hasardeux, le 25 au matin, de se gargariser dans les médiats de ce que les postiers de Villeurbanne reprenaient leur travail quand, au contraire, des dizaines de bureaux entraient dans la grève. Libération (25 janvier) peut parler complaisamment de "dures journées pour La Poste" où "les colis s'amoncellent, en région parisienne, tandis que la non-application des 35 heures provoque une grogne qui galope de bureau en bureau."


En fait, ces journées seront surtout dures pour l'usager...

JG Malliarakis

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