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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

JEUDI 24 FÉVRIER 2000

LE SECRET DE L'EUROPE FRANCO-BELGE

Au sein de l'Europe des Quinze, la France et la Belgique viennent de prendre une initiative qui a très peu de chance de convaincre vraiment leurs partenaires. Le gouvernement italien de M. D'Alema a été le seul à laisser son ministre des affaires sociales M. Cesare Salvi (PDS ex-communiste) s'associer à un texte commun. Mais nous avons la conviction qu'en définitive, l'Italie soutiendra cette initiative franco-belge comme la corde soutient le pendu.

Dans la perspective du prochain Conseil européen qui réunira les chefs de gouvernement fin mars à Lisbonne, et sera consacré à l'Emploi, les ministres belges de l'Emploi et des Affaires sociales, Mme Laurette Onkelinx et M. Frank Vandenbroucke, et leur homologue français Mme Martine Aubry ont voulu lancer un manifeste pour une Europe qui se voudrait "plus sociale" et qui "s'opposerait au libéralisme". Seuls quelques polémistes de mauvaise foi rapprocheront ce non-événement de la magnifique manifestation morale de Mmes Aubry et Onkelinx claquant la porte de la réunion de Lisbonne 15 jours a auparavant.

"L'emploi n'est pas seulement le résultat d'une forte croissance et de l'employabilité dans le marché du travail, c'est une condition du développement économique. Une Europe solidaire est une Europe plus performante", a déclaré Mme Martine Aubry.

"Il est indispensable que la politique de l'emploi ne se fasse pas au détriment de la protection sociale", a estimé de son côté sa collègue belge Mme Laurette Onkelinx. Leur homologue italien assure pour sa part "qu'il ne faut pas déréglementer le travail, nous demandons des emplois de qualité".

À l'opposé des thèses dites "libérales" (quelle horreur !) demandant, paraît-il, que les mesures sociales se contentent d'atténuer les effets des politiques économiques, les ministres socialistes, et l'ex-communiste italien, estiment dans leur texte que "les politiques économiques, celles de l'emploi et celles de cohésion sociale doivent être complémentaires".

"Notre objectif est le plein emploi. Cela implique que la croissance soit forte et riche en emplois, notamment en emplois durables et de qualité", est-il écrit dans le document qui prône "un objectif de croissance d'au moins 3 % par an en moyenne" dans l'Union européenne.

À l'instar des critères économiques et monétaires de Maastricht à l'origine de l'euro, les ministres franco-belges demandent explicitement que le Conseil européen adopte des "indicateurs" communs de protection sociale, en matière d'accès aux soins et d'attributions étatiques de logements notamment. Le critère du moindre chômage ne semble guère les préoccuper, et pour cause. C'est un peu dommage, pensera-t-on, pour un Conseil consacré à l'emploi. Les ministres franco-belges plaident évidemment aussi pour un renforcement du poids du Conseil des ministres européens des Affaires sociales, traditionnellement éclipsé depuis dix ans par le puissant Conseil "Écofin" réunissant les ministres de l'Économie et des Finances des Quinze. L'Europe sociale est "le meilleur moyen de combattre l'extrême droite", a enfin conclu Mme Onkelinx.

Toutes ces grandes thèses ont été développées notamment dans un entretien accordé à "Valeurs mutualistes" (décembre 1999) par M. Verstraeten, président de l'Association internationale de sécurité sociale. Le président de l'AISS répondait à la question : "La mondialisation (est-elle) un danger pour la Sécu ?". Grave question en effet. Pour ne pas risquer de perdre nos avantages acquis, n'élargissons même pas l'Europe, faisons plutôt une Europe franco-belge, avec une toute petite place pour l'Italie en cas de besoin.

Le point commun, le secret, ce n'est pas en effet seulement que la Belgique, la France et, subsidiairement l'Italie ont, numériquement, les plus forts taux de charges sociales en Europe, et dans le Monde. C'est que les dirigeants de ces 3 pays n'ont pas le courage de réformer leurs systèmes, qui, de ce fait, coûtent de plus en plus cher. En Belgique, toute réforme de la sécurité sociale est réputée impossible car opposant Flamands et Wallons, comme en Italie le nord et le sud de la péninsule, comme en France sans doute telles populations à telles autres, partout ceux qui travaillent et qui payent, face à ceux qui reçoivent. Et, dans tout cela, ce sont les assistés qui pâtissent le plus de l'État-Providence et de l'assistanat.

JG Malliarakis

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