On se serait volontiers passé de parler ici de "l’affaire", toute virtuelle, de domiciliation fiscale à Londres de Lætitia Casta. La cacophonie des bêtises entendues à cette occasion dépasse en effet les records.
Le 3 avril, à la Une de la Dépêche du Midi, par exemple, une énorme photo de Lætitia vient sous le titre : "Marianne file à l’anglaise". Curieusement l’article essentiel "Entreprise recherchent cadres désespérément" se trouve relégué en page 2… Le lendemain 4 avril en première page de "Sud Ouest" photo et entretien avec un moraliste : Henri Emmanuelli.
Le président de la Commission des finances de l’Assemblée nationale noie le poisson. Il en rajoute une couche à l’intention du "grand quotidien républicain régional" sur le plafonnement du quotient familial, "une erreur à réparer" selon lui.
François Hollande considère que cette affaire démontre la bêtise de la droite. Mais les grandes voix autorisées de l’opposition s’élèvent pour défendre "les talents", et d’abord celui de ce mannequin choisi par les Maires de France pour représenter Marianne. Nous avons ainsi de grandes déclarations de penseurs comme M. Delevoye et M. Devedjian, etc.
Nous avons toujours défendu dans cette chronique le droit pour les individus de pratiquer l’optimisation fiscale, droit reconnu aux sociétés. Monter en épingle le cas de quelques "gros revenus" est stupide et démagogique. Si 200 000 ou 300 000 Français ont choisi d’émigrer dans la seule ville de Londres, il ne peut pas s’agir uniquement de grandes fortunes ou d’artistes, ou alors c’est encore plus grave… Et puis l’Angleterre n’est pas seule en cause. Le 13 mars dernier, M. Alain Delon est devenu citoyen helvétique, pas britannique.
C’est sans doute avec juste raison que Le Monde en date du 7 avril titre "L’affaire Lætitia Casta ou le degré zéro du débat fiscal droite gauche". Alléchés par le titre, ceux qui ont consulté le dossier (4 importants articles) publié par le grand quotidien de l’intelligentsia parisienne, n’ont pas eu cependant l’impression de sortir du degré zéro. On retiendra pour particulièrement stupide et fielleuse la notion d’un simple "match France Angleterre", les Français émigrants étant présentés comme de vulgaires traîtres.
Si l’on veut poser le problème de l’optimisation fiscale individuelle, il faut accepter de l’examiner dans sa complexité. Il faut tenir compte des 3 principaux arguments qui militent en faveur de l’émigration des élites, des entreprenants, ou tout simplement des jeunes qui n’entendent pas s’enfermer dans l’assistanat.
1° Il existe un problème spécifique de la fiscalité personnelle. Entre un pays où la tranche marginale est à 40 % et un autre où elle est à 54 %, il est clair que nombre de particuliers, jeunes célibataires à revenus élevés, sont fortement incités à émigrer.
2° Il y a le problème de la réglementation du travail et des freins administratifs à l’activité, encore alourdi par le passage de Mme Aubry au ministère dit de la Solidarité. C’est certes un problème de longue tendance, et c’est un problème difficilement quantifiable. On pourra se référer à la notion d’indice synthétique de liberté telle qu’elle est publiée par la Heritage Foundation à Washington. Il est clair que, de ce point de vue, prélèvements sociaux, 10 % en Grande Bretagne, contre 42 % en France, aussi bien sur les salariés que sur les indépendants. C’est une dimension essentielle du problème.
Ramener ce problème à la seule question
de la fiscalité des
hauts revenus c’est passer à côté du vrai dossier.
Nous avons commencé à l’aborder dès 1996 autour
des accusations délirantes protées contre le CDCA et de "l’affaire
Cadic" (créateur du mouvement "la France libre d’entreprendre" qui
compte aujourd’hui 850 industriels adhérents) et en 1998 autour
de "la coiffeuse de Valence" (et des très nombreux petits
entrepreneurs membres des mouvements de contestation luttant pour la délocalisation
statutaire artisanale).
Lætitia Casta ce n’est donc pas "Lætitia casse-toi".
C’est en quelque sorte, à notre combat pour la Liberté sociale,
ce que le Mouron Rouge est à l’Archipel du Goulag. C’est
Soljenitsyne mis à la portée des enfants de 10-12 ans. On
sait au moins où sont les bons et où sont les méchants.
C’est peut-être pour cela que la classe politique a réagi.
Elle a (presque) compris."