Le 12e congrès de la Confédération paysanne s’est tenu les 5 et 6 avril à Argentan. Cette réunion a été l’occasion de l’institutionnalisation du rôle de la nouvelle idole nationale, le camarade José Bové, au sein de l’organisation Jusqu’ici ce n’était que l’un des militants du syndicat. Désormais il en sera l’un des 3 porte parole.
On a pu voir aussi combien forte était la convergence entre le ministre Glavany et les agitateurs collectivistes. Ceux-ci, l’an dernier, ont été montés en épingle comme héros médiatiques. Le mouvement, apparu en 1987, fut très rapidement soutenu notamment par le cabinet d’Édith Cresson. En 1995 la Confédération paysanne avait obtenu 20 % des voix aux élections Chambres d’Agriculture sur une moyenne de 70 départements, contre 12 % à nos amis de la Coordination Rurale et une courte majorité à la nomenclature classique FNSEA + CNJA + direction de la MSA etc. En Métropole la Confédération détient 2 chambres sur 90, Finistère et Loire-Atlantique. Elle en détient aussi 2 Outremer. Au prochain scrutin, en janvier 2001, elle compte bien faire un tabac, en se présentant partout et en amassant notamment le soutien des compères en collectivisme du MODEF, qui représentent 15 à 20 % des voix dans certains départements du Sud Ouest et du Massif Central.
Le ministre de l’Agriculture Glavany avait été chahuté, en mars, au Congrès de la FNSEA. Au contraire, il a été entendu bien poliment en clôture du Congrès d’Argentan par les 350 responsables de la Confédération paysanne. Il a certes tenu à se démarquer des méthodes de provocation "anti MacDo". (Quel rapport entre MacDo et la question agricole française ?) Mais il s’est clairement associé aux objectifs à long terme du collectivisme agricole.
M. le ministre est certes bien habile de ne pas s’associer officiellement aux infractions commises par la Confédération paysanne. On remarquera d’ailleurs que toute la propagande de cette organisation est basée sur le mépris du droit de propriété et de la libre entreprise. Le procès correctionnel de Bové viendra le 30 juin. Encore 48 heures avant de recevoir
M. Glavany à leur Congrès, Bové et Dufour arrachaient "symboliquement" le 3 avril le panneau de signalisation des travaux d’un restaurant franchisé McDonald à Avranches ; et, le 4 avril, leurs militants "mettaient fin" à l’occupation des locaux des producteurs de Roquefort par le SPLB, syndicat des producteurs de lait de brebis dont le camarade Bové est une des gloires et dont le président est aussi un militant de la Confédération paysanne. Le mouvement a tout fait pour médiatiser ce conflit du roquefort. Il est en effet emblématique de son idéologie collectiviste : le fromage de roquefort n’est pas le produit, à ses yeux, d’un savoir faire artisanal et entrepreneurial, il n’est pas une marque commerciale. Il n’est que la résultante d’une matière première et probablement aussi d’une "valeur travail" comptabilisée en "unités de travail simple."
Qu’on se rassure au sujet du prédécesseur de M. Bové, le camarade François Dufour. Plus discret, il demeure dans le mouvement. Il se voit propulsé à d’autres tâches révolutionnaires. Celles-ci s’effectueront au sein du mouvement gauchiste antilibéral ATTAC dont il assumera la vice-présidence. La ligne commune de la Confédération paysanne et du mouvement ATTAC c’est la lutte contre la mondialisation. François Dufour a ainsi fustigé "cette mondialisation aveugle où les multinationales sont en train de tuer les petits paysans". José Bové, de son côté, assure tranquillement que "la mondialisation symbolisée par MacDo, c’est une mondialisation de l’uniformisation, où d’Avranches en passant par Millau ou Hong Kong, on devrait manger la même chose, des produits sans goût, aseptisés, qui ne ressemblent à rien".
Combattant la mondialisation, le ministre de l’Agriculture comme la Confédération paysanne partent en croisade contre des moulins à vent. Concrètement, ils sont dans le camp du protectionnisme. Ils vont donc au rebours des intérêts des entreprises agricoles françaises dont les exportations sont les plus élevées du monde.
Les maux réels dont souffre notre agriculture sont ailleurs. Ni le ministère ni les syndicats agricoles officiels ne les combattent vraiment. On notera ainsi que moins de 8 000 jeunes Français se sont installés comme exploitants agricoles en 1999, contre 15 000 cessations d’activités. À ce rythme, on ne comptera bientôt plus que 300 000 exploitations en France.
Les retards de la France dans les domaines agricoles porteurs deviennent de plus en plus flagrants.
En 1965, par exemple, 60 % des surfaces consacrées en Europe à l’agriculture biologique étaient situées en France, aujourd’hui elles ne sont plus que 10 %.
La Confédération paysanne a été soutenue au départ par les socialistes comme rivale de la FNSEA. Elle est devenue une nuisance supplémentaire, propagatrice d’une idéologie antientrepreneuriale et anticommerciale. Que les doctrines arriérées propagées par la Confédération paysanne et le camarade Bové trouvent un écho dans la conscience des intellocrates ne nous étonne pas. Qu’elles constituent le relais des intentions inavouées de la technocratie française ne nous surprend guère. Qu’on fasse de José Bové une gloire nationale, voila ce que nous trouvons excessif.
JG Malliarakis
©L'Insolent