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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
MARDI 16 JANVIER 2001
LA BASE JURIDIQUE N'A JAMAIS EXISTÉ
Denis Gautier-Sauvagnac (g.) Nicole Notat (d.)
Les bons esprits s'émeuvent de la situation de blocage autour du financement de la retraite à 60 ans. La gauchisante Tribune de l'Économie (15 janvier) titre : "Crise ouverte sur le financement des retraites "car, déplore-t-elle "le Medef n'entend plus financer le fonds pour les retraites complémentaires après 60 ans" et Les Échos (15 janvier) affirment : "Retraite à 60 ans, l'épreuve de force" en disant que "le patronat appelle les entreprises à ne plus verser les cotisations ASF".
J'avoue personnellement que c'est leur surprise qui m'étonne encore.
Deux échéances vont permettre de jauger ce qu'il en est de ce blocage.
De la part des organisations patronales la réunion du conseil d'administration du Medef aujourd'hui va permettre de mesurer quel soutien la structure apporte à Ernest-Antoine Seillière et à Denis Kessler, mais aussi au président de l'Unedic M. Denis Gautier-Sauvagnac gestionnaire patronal de la situation.
Autre échéance : la manifestation du 25 janvier. On affirmera, sans doute, quoiqu'il arrive qu'elle aura été triomphale, unitaire, démocratique, intersyndicale, unanime, écrasante, dès lors que plusieurs centaines (au moins) d'intermittents du spectacle seront descendus dans la rue aux côtés de pathétiques bénéficiaires édentés de la retraite par répartition, pleurant à la fois la misère de leurs pensions et imposant que les générations suivantes s'engouffrent dans la même erreur commise, d'abord en 1941, puis en 1945. Le 26 janvier les bureaucraties syndicales feront comme si elles étaient en position de force.
Rappelons qu'en 1982, lorsque le gouvernement Mauroy met en place la retraite à 60 ans, il crée une "Association" pour la structure financière, chargée d'en compenser le surcoût pour les caisses de retraites complémentaires. L'ASF perçoit une cotisation sur les salaires. Cette cotisation est prélevée sur des gens qui, pour la majorité d'entre eux, ne bénéficieront jamais de la retraite à 60 ans, du fait, notamment, de la réforme Balladur de 1993, elle-même rendue inévitable par la crise démographique. Or, cette cotisation, dans les entreprises privées, est collectée par les Assedic. Elle est donc gérée conjointement, dans le cadre de l'Unedic par les syndicats et par les organisations patronales.
Ceci faisait l'objet d'un accord venant à échéance le 31 décembre. En fait, il n'a pas été renouvelé et il est donc caduc. Mais, pour ne pas inquiéter les futurs retraités, c'est-à-dire les cotisants actuels, dont on prélève automatiquement les cotisations, syndicats et patronat ont décidé en septembre de repousser cette échéance au 31 mars 2001. Jusqu'à cette date, nous dit-on tranquillement, les salariés pourront donc toujours partir à la retraite aux conditions actuelles
Allons quand même jusqu'au bout : la mise à la retraite d'une partie des personnels n'est pas toujours défavorable à certaines grandes entreprises. Ainsi, on nous assure que les banques se réjouiraient d'un accord sur les préretraites entre 56 et 58 ans. Cet accord, signé le 12 janvier, devrait toucher quelque 20 000 personnes sur un effectif d'environ 200 000. Il permettra, d'une part, de diminuer les effectifs, en ne remplaçant que 30 % des préretraités, et, d'autre part, de réembaucher du personnel plus jeune et moins cher Il paraît que ce mécanisme s'appelle joliment la noria. Mais qui paye pour les préretraites ?
Une phrase, une seule, les glace d'effroi : au-delà du 31 décembre, ou du 31 mars, il n'y aurait plus "aucune base juridique" à l'obligation de cotiser dans des régimes tels que l'ASF. En réalité aucun régime de retraites publiques n'a véritablement de base juridique solide. Aucun n'offre aucune véritable garantie pour les cotisants. Ils peuvent être modifiés du jour au lendemain. Pendant 50 ans les organisations patronales se sont prêtées au jeu. Tant mieux si elles soulèvent le lièvre le plus tôt possible. Mais ne rêvons pas encore.
En effet, jusqu'à ce jour, la Medef a proposé un système qu'il baptise "actuariellement neutre", destiné à sauver la retraite par répartition. Il n'est pas encore prêt à instaurer la capitalisation.
L'épargne personnalisée est pourtant le seul système fondé juridiquement