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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 17 JANVIER 2001

LES PANTOUFLES DANS LE BAIN DE Mme TASCA

TROP C'EST TROP. La bourde incroyable de la Tasca me rappelle une (vieille) histoire vraie, celle d'une petite fille, gardée quelques jours par ses grands parents, auxquels elle affirmait, caprice après caprice, invariablement :"Maman permet". Les grands parents de cette charmante enfant étaient, — comme c'est le cas une fois sur deux — les beaux parents de la maman. Un peu effarés, ils laissaient faire, pensant que les temps changent et que les belles filles d'aujourd'hui sont bien laxistes. Mais bientôt la petite coquine s'avisa de mettre ses pantoufles dans son bain. Maman permet ? Là non, ça ne prenait plus.

Ainsi donc, Le Figaro (15 janvier) osait titrer, au (néo) futur de l'indicatif : "On va taxer les ordinateurs". Comme si c'était fait d'avance, sans vote du parlement, sur un simple caprice de Mme ministre de la Culture. Jospin permet.

Pas très étonnant d'apprendre que la Sacem, société de droit privé vivant de ce type de taxations arbitraires trouve cela très bien.

Or, "curieusement" tous les internautes se sont mis à réagir frénétiquement, des plus ardents libertariens aux mégrétistes habituellement les plus dirigistes, en passant par Libération qui fait sa "Une" (16 janvier) sur cette fantaisie d'un ministre irresponsable. Fantaisie venant après 15 ans de délires genre Loi Lang, taxe sur les magnétoscopes, etc.

Je dis "curieusement" parce que moi-même je traînais depuis plusieurs jours la préparation d'un Courrier fustigeant les précédentes taxations, celles des CD vierges et des DVD. Au total cette taxation-là coûtera beaucoup plus chers à tout le monde. Je calcule que, pour mes seules archives personnelles, elle me coûtera près de 300 F par an, alors que la stupide taxe sur les ordinateurs, si elle s'aligne sur le taux allemand coûterait environ 150 F à l'achat d'un ordinateur, soit 30 ou 40 F par an = 10 fois moins.

Et cependant c'est cette deuxième taxe qui manifestement ne passe pas. On connaît d'autres précédents dans l'Histoire. La révolution américaine ne s'est-elle pas faite pour une taxation sur le thé ? La révolte bretonne de Pontcallec n'est-elle pas partie du papier timbré ? Etc.

L'un des points les plus insupportables est que 92 % des internautes et utilisateurs d'un ordinateur n'ont jamais enregistré un seul morceau de musique par ce moyen. Ils payeront pour les 8 % d'autres. Ces "copieurs" sont surtout des gamins qui n'achèteraient pas leurs "tubes" aux prix énormes de la commercialisation s'ils n'avaient la ressource de les copier.

Voilà une affaire à suivre. Et nous la suivrons. Je constate qu'elle déchaîne beaucoup plus de réaction que d'autres injustices. Même la citadelle de Bercy trouve que la Tasca y va un peu fort. Hier l'AFP diffusait l'étonnante prise de position suivante : "Bercy dans son ensemble, aussi bien économique qu'industriel, est fermement opposé à toute idée de taxe sur le sujet, aussi bien sur les ordinateurs que sur les terminaux UMTS", a déclaré une source auprès du ministère. "On s'y opposera très fermement", a-t-elle ajouté, qualifiant le projet de "stupide, au moment où l'on cherche à favoriser l'usage des ordinateurs et des téléphones portables". Le Ministère "de la Culture et de la Communication" n'accole pas seulement deux mots antagonistes. Il faut reconnaître que son appellation même le disqualifie du point de vue des libertés. Culture d'État ? Communication d'État ? Cela est bien suspect.

Ce projet avait, et a encore, pour but de répartir arbitrairement quelque 2 milliards au profit des éditeurs de musique, des interprètes et des sociétés d'auteurs, c'est-à-dire au profit d'organismes comme la SACEM, qui se frottent les mains. Tout cela d'ailleurs alimentant chichement une créativité bien médiocre. N'oublions pas que ces versements viendront après des prélèvements prioritaires, en faveur de ceux qui sont plus égaux que d'autres… après absorption par des frais de structure, après versement aux gros brochets de la culture industrielle, l'excellent groupe "culturel" Vivendi par exemple, sans lequel, de Couperin à Georges Brassens il n'y aurait jamais eu ni musique ni chanson française.

Alors vigilance et résistance. La partie n'est pas encore gagnée pour eux et pour la Tasca.

Tasca bas les pattes ! Tasca démission !

• JG Malliarakis
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