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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 21 FÉVRIER 2001

LIBERTÉ D'ÉMIGRER ET LIBERTÉ D'IMMIGRER

On ne doit pas douter et on n'entend point contester la bonne foi de nos interlocuteurs. Ils nous disent qu'il faut, après leur avoir délivré des sauf-conduits, accorder le droit d'asile aux 908 Kurdes échoués le 17 février à 4 heures du matin sur les côtes varoises. On a entendu à ce sujet toutes sortes d'arguments y compris celui de la veuve de François Mitterrand et autres autorités religieuses.

 

On s'autorisera cependant à professer l'avis inverse.

 

Et on ne saurait esquiver l'obligation de répondre du point de vue des Libertés à des arguments invoquant les Libertés humaines.

 

S'agissant de l'argumentaire invoquant les Libertés humaines, la confusion essentielle consiste à assimiler droit à l'émigration et droit à l'immigration.

 

Or, si, pour un homme et pour une famille, l'émigration se traduit obligatoirement par une immigration, dans un pays d'accueil, les deux phénomènes ne sont absolument pas de même nature.

 

Le droit d'émigrer est un droit fondamental. Personne ne cherche à remettre en cause cette évidence. Seuls certains pays révolutionnaires l'ont fait en présentant les émigrés comme des traîtres. La dictature jacobine française ne s'en est pas privée. De même l'Union soviétique d'hier bloquait ce droit, en terrorisant les candidats à l'émigration jusqu'aux années 1970, puis en prétendant leur imposer des taxes exorbitantes ou en leur refusant purement et simplement leur visa.

 

Or, quand on lit certains articles français sur la fuite des cerveaux, on se demande aussi jusqu'à quel point certains ne désireraient pas, en France, imposer aux ingénieurs, aux entrepreneurs ou aux scientifiques des pratiques analogues. Avant donc de s'interroger sur le droit à l'émigration ailleurs, on aimerait donc être certain qu'en France on ne prépare une législation rampante contre le droit d'émigrer, et que l'État français est exempt de tout reproche, de ce point de vue.

 

Si on se réfère, une fois encore, aux droits fondamentaux recensés en 1789, "la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression", on constate que la faculté d'émigrer s'articule à des degrés divers sur chacun de ces quatre droits. Impossible de ne pas rattacher cette faculté à la résistance à l'oppression dont elle est hélas un triste corollaire Mais n'oublions pas non plus le droit de propriété ! Si l'on n'a pas le droit, et la possibilité concrète, de vendre ses biens et d'emporter à l'Étranger la somme correspondant à leur valeur la faculté d'émigrer n'est pas complète.

 

C'est ainsi que l'Allemagne riche hélas d'une expérience très concrète considère hautement depuis 1945 que le contrôle des changes est contraire aux Droits de l'Homme. Or, la France de la Ve République a plusieurs fois instauré le contrôle des changes. Elle a fait, de la sorte, la fortune des banques suisses.

 

En regard, la faculté d'immigrer ne fonctionne pas du tout de la même manière.

 

Chaque pays doit être libre de fixer les règles qui lui paraissent les plus appropriées au séjour des Étrangers. Si cet attribut de la souveraineté disparaissait, on serait vraiment dans un État mondial. Tel est peut-être le désir utopique de certains défenseurs systématiques de l'immigration. Telle n'est pas la situation. Seule l'Europe pratique, à son propre détriment, cette flagellation. Et, en Europe c'est manifestement la France qui se trouve à l'avant garde de la doctrine systématiquement favorable à l'immigration quelle qu'en soit la nature.
Faut-il envisager de seulement répondre à l'argument selon lequel l'Europe aurait "besoin" de l'immigration illégale pour sauver sa démographie et ses systèmes de retraites ?

 

Faut-il enfin rappeler que les divers pays dont, à juste titre, les économistes libéraux aiment à citer la réussite, du territoire de Hongkong à la Suisse en passant par les États-Unis ou Singapour, sont tous extrêmement rigoureux en matière d'immigration et impitoyables vis-à-vis de l'immigration illégale ?

• JG Malliarakis
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