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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 21 MARS 2001

L'ENFER FISCALISTE DES RENTIERS DU PÉTROLE

N'étant pas un spécialiste de la conjoncture je ne m'aventure jamais sur le terrain de la prédiction. Je me contente de sourire quand je lis que la croissance "sera" en telle année de tel ou tel taux. Mon sourire devient cependant rictus quand je lis des cocoricos du genre "la France locomotive de la croissance en Europe".

Et j'avoue aussi être encore plus inquiet quand je vois les conséquences de l'euphorie fabriquée artificiellement par la propagande gouvernementale. À force de répéter que tout va bien, que l'économie française aurait engrangé des "cagnottes" en l'an 2000, comment faire accepter par un certain nombre de corporations, de syndicats et de groupes de pression une modération dans leurs hausses de prix, de salaires, de traitements ou de subventions.

Le phénomène n'est certainement pas propre à la France. Il est même partagé au plan mondial par toutes sortes de rentiers dont les plus visibles sont évidemment les cartels pétroliers. Annonce-t-on que l'économie occidentale se porte bien : les gens de l'Opep jugent que les Occidentaux devront alors légitimement, au nom de la justice, payer le pétrole plus cher. Et bien entendu les pays non pétroliers du Tiers-monde en seront les premières victimes puisque les rentes des États pétroliers se traduisent en achats, investissements ou commandes d'armements auprès des pays industrialisés de l'occident.

Il est certainement pathétique d'ailleurs de voir combien les pays de l'Opep croient encore pouvoir tirer parti de leur rente pétrolière alors même que la conjoncture s'est en partie retournée, sans peut-être qu'ils s'en soient aperçus.

Mais le pire des émirs pétroliers, chacun le sait, c'est en France l'État français. Et ce qui nous faire un peu sourire s'agissant de l'Opep, ou du gouvernement vénézuélien de M. Chavez, nous semble encore plus mal venu, n'appelant aucun sourire, s'agissant de la forteresse Bercy.

En ce 21 mars on apprend ainsi que la principale taxe sur le carburant, la TIPP, Taxe intérieure sur les produits pétroliers augmente mécaniquement de 6 à 7,65 centimes par litre, tirant les prix à la pompe vers le haut.

Cet ajustement de la Taxe intérieure sur les produits pétroliers s'inscrit dans le cadre du système de la "TIPP flottante". Le plus fascinant est de penser qu'il a été instauré à l'automne 2000, sous prétexte de faire des concessions aux mouvements de protestation des routiers et des autres utilisateurs du carburant comme matière première, notamment les agriculteurs, les artisans du taxi et les ambulanciers solidaires, mouvements extrêmement populaires dans l'opinion, contre les hausses de prix enregistrée au cours du printemps et pendant l'été.

Le système de la "TIPP flottante" est supposé "marcher dans les deux sens". Quand le prix du pétrole brut monte, la TIPP baisse ; quand le pétrole recule, la TIPP grimpe. Cet amortisseur fiscal a déjà été appliqué à la baisse le 1er octobre 2000 réduisant légèrement l'impact de l'envolée du cours du pétrole pour les particuliers. À ce moment-là le prix du carburant montait et la baisse de TIPP ne se voyait pas. Mais jusqu'ici, il n'avait jamais encore été appliqué à la hausse.

Certes au 9 mars, le prix de l'essence était inférieur de 61 centimes par litre au niveau atteint durant la première quinzaine de septembre 2000. Les prix du gazole et du fioul domestique ont respectivement chuté de 72 et 98 centimes entre septembre 2000 et le 9 mars 2001 : voilà le raisonnement de la forteresse fiscaliste de Bercy.

Seulement, là où le raisonnement est évidemment faux, et même consternant, c'est qu'il prend comme référence septembre 2000, à une date où les prix du carburant étaient devenus insupportables. Ils ne sont pas encore redevenus ce qu'ils étaient début 1999, la hausse décrétée par Bercy, — "TIPP flottante" ou pas — est donc parfaitement absurde et prématurée.

Les recettes pétrolières de l'État français au titre de la TIPP sont actuellement prévues à un niveau de 167 milliards de Francs. La hausse fiscale qui va être répercutée immédiatement à la pompe alimente une inflation qui inquiète les autorités monétaires européennes, ayant atteint par exemple un rythme de 4 % dans des pays considérés comme vertueux tels les Pays Bas, et ceci dans l'année même où l'euro doit accélérer sa mise en place. Il y a donc quelque chose de pire que les prétendus "paradis fiscaux", c'est l'enfer fiscaliste des rentiers étatistes du pétrole.

 

• JG Malliarakis

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