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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
VENDREDI 6 AVRIL 2001
LUC GUYAU APPELLE À L'UNION POUR SAUVER L'ÉLEVAGE
Il y avait plusieurs raisons de s'intéresser au discours de clôture prononcé par Luc Guyau aux Sables-d'Olonne lors du 55e congrès de la FNSEA. Son intention la plus remarquable, et la plus estimable, était de proposer l'unité agricole face à la crise de l'élevage.
Constatons à ce sujet que l'absurde application du prétendu principe de précaution par les hommes de l'État a créé une situation d'urgence telle que les polémiques stériles ne sont plus de saison. Mais l'appel à l'union lancé par la FNSEA nous semble d'autant plus intéressant qu'il a été précisément rejeté par les gens de la Confédération paysanne. Le mouvement minoritaire de M. Bové a immédiatement tenu à qualifier de "pathétique" cet appel unitaire pour sauver l'élevage. "Pathétique", en français, s'applique à la situation des éleveurs. Mais sous l'influence de l'usage américain, "pathétique", dans la langue de M. Bové, veut dire tout simplement ridicule.
La prétendue montée en puissance de la Confédération paysanne est un phénomène de fabrication purement médiatique. Sur le plan électoral, le scrutin de janvier a montré que les positions de M. Bové nuisaient fortement à son mouvement. Sur les 4 chambres départementales d'agriculture qu'elle détenait dans l'Hexagone et Outremer elle en a en effet perdu 2. Il est certain que les dernières prises de position du porte parole médiatique qu'est M. Bové ont encore contribué à le rendre encore plus odieux dans la profession. La Confédération paysanne a cru de bon goût de préconiser une indemnisation sélective des éleveurs frappés par la crise de manière à pénaliser les "gros". Elle trouve aujourd'hui ridicule d'envisager l'union sacrée d'une profession sinistrée par l'incurie des autorités publiques aussi bien françaises que bruxelloises. Il n'est pas douteux que les 300 000 éleveurs français (pratiquement un exploitant agricole sur deux) apprécient. Il serait convenable que le public le comprenne au lieu de persister à admirer béatement la vedette.
Cela ne veut pas dire qu'il faille à tout prix applaudir en toutes circonstances à ce que dit la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles. La FNSEA est apparue en 1946. Elle a hérité aussi bien des ambiguïtés de la Corporation paysanne vichyssoise que des influences néfastes de l'idéologie dominante au sein des Jeunesses Agricoles Chrétiennes, puis des orientations des Jeunes Agriculteurs des années 1960. Ce milieu nage en plein dans la pensée unique française. Il est comme un chaînon manquant aux corporatistes vichyssois, aux progressistes chrétiens et aux technocrates. Dans leur système tout repose sur l'intervention de l'État. La doctrine en été imposée par Paris au niveau européen. Ceci a donné la Politique agricole commune à laquelle les politiciens français de droite comme de gauche s'accrochent frénétiquement depuis 1962. Cela fait beaucoup de mal.
Certes, face à un problème tel que la perte de confiance du consommateur ce n'est pas l'intervention productiviste de l'État qui rétablira la situation. C'est beaucoup plus certainement une somme d'initiatives en faveur de la qualité.
Le 55e Congrès de la FNSEA a obligé le vieil appareil à penser un peu moins à ses problèmes internes et un peu plus aux urgences. "L'actualité a pris un peu le pas sur la réflexion de fond de la refondation", reconnaît ainsi Luc Guyau. Le 17 mai, un nouveau président devra succéder à Guyau. Cela n'a cependant pas donné lieu à la course à la succession espérée par les médiats. Les prétendants sont Dominique Chardon, un agriculteur bio en rupture avec la tradition productiviste de la FNSEA, et le président de la Fédération nationale des producteurs de lait, Jean-Michel Lemétayer, et Jean Salmon, président de la chambre régionale d'agriculture de Bretagne.
Devant la détresse très réelle de ses collègues Luc Guyau, dans une déclaration surprise a su trouver les mots justes pour lancer un appel prônant l'unité syndicale et la mobilisation des forces vives de la ruralité lors d'une journée nationale d'action qui aura lieu le 21 avril. Nous ignorons pour l'heure l'attitude que prendra en cette occasion la Coordination Rurale, mouvement de contestation au moins aussi significatif que celui de M. Bové, mais dont personne ne veut parler.
Le nom du ministre de l'Agriculture Jean Glavany a été sifflé et couvert d'injures à plusieurs reprises. Son absence était un fait exceptionnel pour un ministre de tutelle. Elle n'en est que plus scandaleuse dans le contexte dramatique d'une interprofession asphyxiée par deux crises vache folle et fièvre aphteuse. Le gouvernement aura bientôt besoin de renouer le dialogue, s'il veut éviter que les campagnes votent massivement pour l'opposition en 2002.
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