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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
LUNDI 23 AVRIL 2001
ATTENTION
ORDONNANCES DANGEREUSES
C'est au Journal officiel de la république française daté du pluvieux dimanche 22 avril qu'a été publié le nouveau Code de la Mutualité. Ce texte, ou plutôt ce que l'on appelle la partie législative de ce Code, figure en annexe de l'ordonnance qui modifie les normes applicables au secteur mutualiste. Il a la prétention de transposer en droit interne les directives européennes d'assurance. Il comporte au total 226 articles eux-mêmes organisés en 6 livres. Les entreprises qui se qualifient de mutuelles disposent désormais de 365 jours pour se mettre en conformité avec ces dispositions.
Un vote du parlement a donné naissance, conformément à l'article 38 de la Constitution, à une loi d'habilitation (loi n° 2001-1 du 3 janvier 2001), permettant au gouvernement de M. Jospin de légiférer par ordonnance afin de mettre la France en conformité avec de nombreuses directives européennes en souffrance depuis plusieurs années.
La prochaine étape de ce marathon réglementaire sera la publication des décrets d'application.
Livre Ier définit les règles applicables à l'ensemble des organismes mutualistes. Nous en commenterons la substance dans notre Courrier daté du 25 avril.
Livre II traite spécialement des organismes dédiés aux opérations d'assurance et de capitalisation. C'est bien le point économiquement le plus important, et c'est celui sur lequel portent les critiques les plus sérieuses.
Mais on ne saurait comprendre la portée des Livres I et II sans une vue d'ensemble de la scène.
Le livre III (art. L. 310-1 à L. 320-6) traite des organismes pratiquant la prévention, l'action sociale et la gestion des réalisations sanitaires et sociales. Il contient les dispositions relatives aux mutuelles qui réalisent des opérations de prévention et d'action sociale et qui gèrent des réalisations sanitaires sociales. Il comporte deux titres : l'un concerne la constitution et le fonctionnement de ces organismes et l'autre, leur champ d'intervention. Ces groupements acquièrent la personnalité morale lorsqu'ils satisfont à trois conditions : tenue d'une assemblée générale constitutive, respect des règles d'activité applicables à leur champ d'intervention et inscription au registre national des mutuelles.
Le livre IV (art. L. 411-1 à L. 431-8) traite des relations avec l'État et autres collectivités publiques. Il est organisé en trois titres. Le premier concerne les organes administratifs de la Mutualité. Il s'agit essentiellement du Conseil supérieur de la Mutualité. Les missions du "CSM" seront étendues. En effet, le CSM sera désormais saisi pour avis de tous les projets de textes relatifs au fonctionnement des organismes mutualistes. Il sera également consulté avant tout agrément d'une mutuelle ou d'une union. Il tiendra le registre national des mutuelles et gérera le Fonds national de solidarité, institué dans le titre II (art. L. 411-1). Quant au titre III, il est consacré au fonds de garantie destiné à préserver les droits des mutualistes lorsque la mutuelle n'est plus en mesure de faire face à ses engagements (art. L. 431-1). Ce fonds intervient après les systèmes fédéraux de garantie. Là aussi il sera nécessaire de voir précisément quelle garantie sera VRAIMENT mise en uvre.
Le livre V (art. L. 510-1 à L. 510-15) traite du contrôle des mutuelles, des unions et fédérations. Celui-ci s'effectuera par la "Commission de contrôle des mutuelles et institutions de prévoyance". La "CCMIP" disposera de pouvoirs identiques à ceux de la commission de contrôle des assurances. Elle pourra prononcer à l'encontre d'une mutuelle, en cas d'infraction, des sanctions allant de l'avertissement au retrait d'agrément (art. L. 510-11).
Le livre VI traite des dispositions d'application. Il comporte seulement deux articles l'art. L. 610-1 et l'art. L. 610-2. Le premier prévoit que les dispositions internes ou encore les clauses des contrats collectifs ne peuvent déroger aux dispositions du Code de la Mutualité, qui sont d'ordre public. Le second article précise que les modalités réglementaires d'application du nouveau Code sont fixées par décret en Conseil d'État.
Le droit mutualiste est en France un des aspects de la reconstitution assez bâtarde de la liberté d'association abolie en 1791. Le texte fondateur datait de 1898. Il avait été amendé en 1945 puis en 1985, et toujours dans le sens d'un plus grand "laxisme sous contrôle étatique", comme pour les associations 1901 : laxisme pour les amis du pouvoir, contrôle tatillon pour les autres. La procédure des ordonnances adoptée pendant l'année 2000, et le Livre VI nous renforcent dans l'inquiétude ou plutôt dans la conviction que tout sera fait pour que rien ne change.
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