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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 2 MAI 2001

ATTAC : 300 MANIFESTANTS

130 PARLEMENTAIRES

 

M. Yann Galut député PS du Cher est le cofondateur de la Coordination Attac de l'Assemblée nationale

En annexe ci-dessous deux interviews dans l'Humanité

La manifestation nationale du mouvement Attac, place de la Bourse, la veille du 1er mai donnait une idée assez précise du bluff extraordinaire sur lequel repose ce groupe de pression unitaire "pour la taxe Tobin". Attac regroupe des dizaines de personnalités de gauche et d'extrême gauche. Cela va des Verts aux communistes, sous la houlette du Monde Diplomatique. Attac a rassemblé cependant en tout et pour tout 300 manifestants lors de son "traditionnel" rassemblement national…

Certes le poids de l'anti libéralisme français est sans doute plus important que cela. Car le mouvement Attac s'est taillé, en 3 ans, une étonnante réputation internationale sur le refus de la mondialisation. Il tisse sa toile dans le monde syndical, médiatique et parlementaire.

Lancé en juin 1998 par un groupe d'intellectuels de gauche et d'extrême gauche sur la revendication d'une taxe de 0,5 % des transactions financières au profit des exclus de la mondialisation économique ("taxe Tobin"), le mouvement Attac, malgré une évidente inspiration marxiste d'origine, a su forcer la main à de nombreuses dupes bien au-delà de la gauche traditionnelle.

"Si Attac existe, c'est qu'on a senti les prémices d'un front du refus de la mondialisation libérale, et de ses conséquences sur les salariés et les citoyens", note Yann Galut, député socialiste du Cher ; Yann Galut, est le cofondateur de la Coordination Attac de l'Assemblée nationale, avec un Yves Cochet (Vert), un Georges Sarre (représentant du Mouvement des Citoyens), une Chantal Robin-Rodrigo (radicale de gauche) et un Jean-Claude Lefort (communiste). La Coordination Attac de l'Assemblée nationale, "n'est pas un Comité Attac ", prétend Yann Galut. Car chaque député est adhérent ou sympathisant à titre personnel. Au total il a rassemblé 96 signatures de parlementaires, depuis le 4 avril, sur un appel au boycottage des produits Danone pour sanctionner une décision de restructuration "dictée par le pouvoir dictatorial des actionnaires".

Ce 2 mai, le mouvement Attac organise, à l'Assemblée nationale, avec des syndicalistes, des membres du gouvernement et des parlementaires, une table ronde intitulée "Comment agir contre les licenciements de convenance boursière" au-delà du boycottage. Les thèmes sont : "Réponses syndicales" et "Projets gouvernementaux et initiatives parlementaires".

Syndicalement, Attac rencontre le plus d'échos chez les autonomes, le groupe des Dix et notamment Sud. Cette scission gauchiste de la CFDT s'est récemment illustré par lors la grève jusqu'auboutiste des cheminots de la SNCF en avril. Mais les gens de la CGT et les "anti-Notat" de la CFDT sont eux aussi clairement acquis aux arguments anti boursiers d'Attac.

La coordination Attac de l'Assemblée a son pendant au Sénat : au total, le mouvement Attac parvient aujourd'hui à faire signer en France ses propositions par 130 parlementaires.

Attac a "pris acte" des premières mesures gouvernementales qui prétendent lutter contre les plans sociaux "spéculatifs". Mais Attac n'entend pas en rester là. Attac entend "aller au-delà pour limiter, voire interdire les licenciements collectifs dans les entreprises bénéficiaires", affirme Galut. Il voit les parlementaires Attac comme "le bras armé des mouvements sociaux". Tel était déjà le principal objet de la charte rédigée en janvier par une centaine de parlementaires du monde entier présents au Forum social mondial de Porto Alegre au Brésil : traduire en textes législatifs ce qu'Attac appelle "les revendications du mouvement social et citoyen" ("mouvement social et citoyen" = 300 manifestants à Paris, "mouvement mondial" = les émeutiers de Seattle et de Québec….)

Depuis lors, 602 signatures de députés et sénateurs, dont 130 Français, ont été réunies en faveur de la taxe Tobin : tous ne sont pas adhérents d'Attac, 13 (treize) seulement sont originaires de pays en développement d'Afrique, d'Amérique latine et d'Asie. Les Européens sont les plus nombreux avec 541 signatures. Après les Français, viennent les Suédois, les Britanniques et les Irlandais.

L'illustrissime Harlem Désir est un des piliers de la coordination Attac au Parlement de Strasbourg. Il était l'un des rares parlementaires à manifester le 30 avril. Le député européen Harlem Désir espère des progrès rapides des propositions d'Attac sous la présidence belge de l'Union européenne, entre le 1er juillet et le 31 décembre 2001.

JG Malliarakis

© L'Insolent

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En annexe deux interviews de M. Yann Galut député socialiste dans l'Humanité : (les 24 Juillet 1998 et 28 Septembre 1999) -

Huma du 24 Juillet 1998 Yann Galut: l'Etat doit garder plus de 50% des parts

Député PS du Cher, Yann Galut a bien voulu nous confier son sentiment après l'annonce de la privatisation du groupe Aérospatiale.

Au début du mois, la perspective d'un mariage entre Aérospatiale et Matra vous inquiétait. Que vous fait son annonce officielle?

Yann Galut: — Cette restructuration, comme celles qui sont prévues, ne surprend pas vraiment. En revanche, l'importance de la part attribuée à Matra surprend: voilà quelques semaines, on la situait à 15%. Je ne suis pas persuadé qu'il était nécessaire que l'Etat passe en dessous de 50%. Il me semble aussi que la part des salariés aurait pu être supérieure aux 3 ou 4% annoncés. Enfin, Aérospatiale et Matra affirment qu'il n'y aura pas de conséquences sur l'emploi. Je crois qu'il faut absolument que l'Etat garde le contrôle, avec une 'golden share' (action spécifique) très importante. Parce que nous nous trouvons dans un secteur très particulier - celui de l'industrie de la défense - et que la priorité de l'Etat actionnaire doit être l'emploi. Ces restructurations, même si elles peuvent paraître nécessaires pour contrer la concurrence américaine, ne doivent pas se faire sur le dos des salariés. Le gouvernement doit gérer les conséquences sociales ou, plusexactement, gérer ces fusions de telle sorte qu'elles n'entraînent pas de conséquences sociales. Enfin, il me paraît nécessaire d'engager une large concertation avec les organisations syndicales. J'ajoute que le statut d'entreprise publique d'Aérospatiale n'a jamais été un obstacle à la conclusion d'alliances particulièrement efficaces avec nos alliés européens et qu'on aurait pu faire l'économie d'une mise sur le marché aussi importante. On doit aller vers des alliances européennes, mais elles doivent préserver l'industrie de la défense française et ses compétences qui ont toujours été en pointe.

Le 20 juillet, les dirigeants de Dasa ont exprimé des exigences de privatisation. Hier, ils estimaient insuffisant le pas franchi. Qu'en pensez-vous?

Yann Galut: — Ces propos font apparaître une divergence. Il va falloir trouver un juste milieu. Jusqu'à présent, l'actionnaire français d'Airbus était public: cela n'a jamais empêché Airbus d'obtenir des marchés à l'export et d'aligner des produits très compétitifs. Pour moi, il s'agit donc toujours d'un faux débat. Encore une fois, nous nous trouvons dans un domaine spécifique auquel la France a consacré d'énormes investissements et ces investissements n'auraient pas eu lieu si nous n'avions pas été un groupe public." Interview réalisé par Jean Morawki pour l'Humanité du 24 Juillet 1998.

Huma du 28 Septembre 1999

Yann Galut, député socialiste du Cher et membre de la gauche socialiste: "L'affaire Michelin nous aura aidés à améliorer le texte"

Yann Galut, député socialiste du Cher et membre de la gauche socialiste, estime que le projet de loi de Martine Aubry doit évoluer dans un sens beaucoup plus favorable aux salariés.

Considérez-vous, à l'instar des députés communistes, que le projet de loi sur les 35 heures est " invotable en l'état " ?

Yann Galut. En l'état, pour les parlementaires de la gauche socialiste, s'il n'évolue pas, nous ne pourrons pas le voter. Maintenant, c'est à nous, parlementaires du Parti socialiste et de la majorité plurielle, de le faire avancer dans le bon sens. En l'état où il nous a été présenté il y a trois semaines, sans aucun amendement, il n'était pas " votable ". Nous ne pouvons pas dire à partir de quel seuil ce texte devient " votable ", mais il y a tellement de points sur lesquels ce texte doit être amendé qu'on se déterminera sur ce que le gouvernement sera prêt à accepter.

Sur quels principaux points de la loi avez-vous déposé des amendements ?

Yann Galut. Nous, les quatre parlementaires de la gauche socialiste, avons présenté une cinquantaine d'amendements. Sur la définition du travail effectif, il faut que le gouvernement bouge. Il a commencé à le faire en acceptant l'amendement d'Odile Saugues (1), mais il faut aller plus loin vers une définition plus restrictive du temps de travail effectif.

Vous demandez la suppression du second alinéa de l'article 212-4 du Code du travail, qui permet de décompter les pauses du calcul du temps de travail ?

Yann Galut. – Il est clair qu'il faut le supprimer. Deuxième amendement central : la baisse de tous les maxima horaires, sur laquelle le gouvernement semble être en train d'évoluer. · partir du moment où on réduit le temps de travail à 35 heures, il est clair qu'on ne peut pas faire travailler les gens 48 heures par semaine. Il faut baisser les maxima horaires à 44 heures par semaine, 9 heures par jour, et il faut limiter le recours aux heures supplémentaires à 117 heures par an, au lieu de 130 à l'heure actuelle. Troisième question clef : nous ne comprenons pas pourquoi on instaure une année de transition. C'est une prime aux patrons qui n'ont pas voulu négocier, et tout le monde savait depuis 1997 qu'on allait passer aux 35 heures. Cette année de transition est une perte de temps, car pendant ce temps le chômage continue.

Un autre amendement fondamental pour nous concerne la majoration des heures supplémentaires, un thème sur lequel le gouvernement devrait également bouger. Le projet de loi consacre un recul par rapport à la situation actuelle, puisqu'il propose de taxer à 25 % les heures supplémentaires de la première à la huitième heure, alors qu'à l'heure actuelle, les quatre premières heures sont payées 25 % plus cher, et les quatre suivantes à 50 %. Nous voulons une application exacte de la législation actuelle : dès la 35e heure, quatre heures à 25 %, les quatre suivantes à 50 %, pour rendre les heures supplémentaires plus coûteuses qu'une embauche.

Les députés Verts, communistes et du MDC ont déposé quatre amendements en commun, demandant notamment de conditionner le versement des aides à la création d'emplois. Êtes-vous d'accord ?

Yann Galut. – Tout à fait. La première loi baissait les charges sociales pour les entreprises qui avaient réduit le temps de travail de 10 % en créant 6 % d'emplois. Je ne vois pas pourquoi ce qui était valable pour la première loi ne le serait plus pour la deuxième. Cette condition doit être rétablie.

À ce propos, Martine Aubry confie la responsabilité des créations d'emplois aux négociateurs, donc aux syndicats. Qu'en pensez-vous ?

Yann Galut. – Pas une personne sensée connaissant le monde du travail n'ignore que dans de nombreuses entreprises, il n'y a pas de dialogue social. Dans les grandes entreprises où les syndicats sont implantés, il peut y avoir rapport de forces favorable aux salariés. Mais dans nombre d'entreprises de moins de 50 salariés, par peur de la répression patronale, les salariés risquent de ne pas se sentir assez forts et accepter les conditions du patronat. Ça n'est pas toujours facile pour un salarié mandaté de résister au patron qui lui tend l'accord en lui disant : " Tu signes ! ". Bien sûr qu'il faut laisser la place à la négociation et redonner voix au dialogue social. Mais la loi doit prévoir les soupapes de sécurité. Le même problème se pose chez les cadres. Quand j'ai dit qu'il fallait encadrer les cadres, Jean Le Garrec (PS, président de la commission des Affaires sociales, NDLR) m'a répondu : " Mais tu es pour l'économie administrée, il faut laisser les cadres à la négociation. " Or dans les entreprises où les cadres sont 4 ou 5, contre 50 à 100 personnes en production, comment les cadres négocieront-ils dans un bon rapport de forces avec le PDG ou le directeur ? Il faut aller un peu sur le terrain pour se rendre compte que, parfois, la négociation ne se décrète pas.

Au sujet des cadres, le texte prévoit qu'ils ne seront plus soumis aux maxima horaires...

Yann Galut. – Je pense qu'il s'agit d'une erreur. Les membres du cabinet qui ont rédigé la loi ont dû oublier des phrases entières de ce dispositif... Je me permets un peu d'ironie, mais cette disposition est une véritable régression sociale. Le gouvernement va devoir rectifier le tir de manière très rapide sur cette question, d'autant que les cadres ne se laisseront pas faire. Ils se rendent compte qu'ils sont des salariés comme les autres et demandent que la législation puisse s'appliquer à eux. Si on ne rétablit pas les maxima horaires, on permettra aux cadres d'effectuer des journées de 13 heures : la seule référence serait en effet le repos de 11 heures auquel les salariés ont droit entre deux journées de travail. Les cadres doivent en outre bénéficier d'une vraie réduction du temps de travail. Les 217 jours travaillés que propose le gouvernement ne correspondent actuellement qu'à une baisse de 4,6 % de leur temps de travail.

Quelle position adopterez-vous en ce qui concerne le dispositif prévu en ce qui concerne le SMIC ?

Yann Galut. – Je le trouve très confus. Cette question n'est pas encore tranchée au sein du groupe socialiste. Pour moi, il est clair que les smicards, y compris les nouveaux embauchés, doivent être payés sur la base de 39 heures. Cela implique une hausse de 11,4 % du taux horaire du SMIC, dont nous estimons qu'elle est compensée par la baisse importante des charges sociales. Nous sommes plusieurs dans le groupe socialiste à avoir posé cette question de manière très forte.

Trouverez-vous des alliés pour défendre ces amendements chez vos collègues socialistes, qui sont jusqu'ici plutôt favorables au projet Aubry ?

Yann Galut. – Il y a débat dans le groupe. De nombreux amendements ont été déposés sur les points que j'ai évoqués, et beaucoup de députés veulent un texte plus contraignant. Paradoxalement, l'amélioration du texte devra beaucoup à l'affaire Michelin. Elle a marqué les esprits et battu en brèche le discours du gouvernement sur le fait qu'il ne fallait pas en faire trop. Il y a eu une certaine radicalisation, une prise de conscience du fait que la loi est là, peut-être pas pour " administrer ", mais en tout cas pour réguler très fortement.

Dans quel état d'esprit abordez-vous le débat parlementaire ?

Yann Galut. – Nous abordons ce débat, avec mes collègues de la gauche socialiste, mais aussi avec d'autresdéputés socialistes, de manière très combative. Je pense que nous devons aider Lionel Jospin à faire les bons choix. Une attente sociale est en train de naître dans ce pays, que je rattache à l'électrochoc de Michelin, et plus largement à ce qui s'est passé cet été autour de José Bové, qui me fait penser que le mouvement social est en marche. Le gouvernement sera obligé d'y être réceptif. Autant je partage l'avis de Lionel Jospin quand il dit que les salariés doivent descendre dans la rue, autant je considère que ça ne doit pas être une fin en soi : le mouvement social doit être relayé par les politiques. Il ne faudrait pas que cette loi de réduction du temps de travail se transforme en loi sur le partage du travail, qu'elle instaure des reculs pour les salariés. En ce qui nous concerne, nous mettrons tout en ouvre pour que ce texte continue à évoluer dans un sens beaucoup plus favorable aux salariés qu'il ne l'est à l'heure actuelle.

Propos recueillis par Lucy Bateman pour l'Humanité du 28 Septembre 1999

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