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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 4 MAI 2001

LES POURBOIRES, LA TVA ET L'EUROPE FISCALE

Nos amis de la Confédération Nationale des Professionnels de la Coiffure (CNPC Président national Christian Belloc 47 rue Pharaon 31000 Toulouse www.cne-urti.org — info@cne-urti.org) lancent une campagne nationale pour la TVA à 5,5 % dans la coiffure.

Le ministère des Finances vient d'annoncer que désormais toutes les entreprises dans lesquelles les salariés sont en contact direct avec la clientèle doivent soumettre à TVA la totalité du prix payé par le client, y compris les 15 % de taxes de services. Pour la Confédération nationale des professionnels de la coiffure, cette décision intervient après le cumul de nouvelles charges. Le syndicat cite notamment les frais afférents à la mise en place d'une assurance maladie complémentaire obligatoire des salariés.

De décrets et de lois en avenants à la convention collective, la coiffure devient une profession tellement réglementée que les professionnels en oublient leur art pour se consacrer à la seule gestion des changements qui se succèdent.

C'est désormais le lot insupportable et général de l'artisanat français.

Plus grave encore, note le syndicat, la jeunesse n'est pas épargnée. Le décret 2000-1323 du 26 décembre 2000 abrogeant le décret n° 98-909 du 12 octobre 1998 relatif aux aides forfaitaires pour les contrats de qualification conclus à compter du 1er janvier 1998 privera des jeunes sans qualification de la possibilité d'apprendre un métier et d'accéder à la vie active.

Nouveau coup dur pour cette profession artisanale, l'incorporation du service dans l'assiette de la TVA va peser sur 3 à 4 % du chiffre d'affaire.

Dans ce contexte, la CNPC déclare donc qu'il est temps pour les coiffeurs de se mobiliser, de faire connaître leur mécontentement quant à l'avenir qu'on leur prépare et d'obtenir au plus tôt un taux de TVA intermédiaire à 5,5 % cette baisse de 10 points de la TVA compenserait le surcroît des charges.

Le 5 mars, plusieurs centaines de restaurateurs, frappés par la même menace, avaient bloqué des points de passage aux frontières de la France avec d'autres pays européens.

Or, le 29 mars la Cour de justice de Luxembourg condamnait la France, à soumettre à la TVA le montant des pourboires inclus dans les prix de vente des cafetiers et des coiffeurs.

On partait en fait d'une pratique fiscale française vieille de plus de trois quarts dsiècle : l'exonération de taxes des pourboires inclus dans le prix de vente. Ces pourboires, qui représentent à peu près 15 % du prix d'un café, d'un steak frites ou d'un brushing,

La Commission européenne, gardienne des traités a traduit la France en justice après lui avoir demandé nombre d'explications restées sans réponse. Le gouvernement de Paris se savait en infraction avec le droit communautaire. Mais il craignait électoralement la colère des cafetiers et des brasseurs. Il faisait depuis des mois la sourde oreille à ces injonctions répétées.

Devant la Cour, les représentants du ministère des affaires étrangères n'ont même pas été capables de défendre la situation nationale. Ils se sont contentés d'un long exposé purement historique et anecdotique destiné à en expliquer l'origine. Les gens du Quai d'Orsay ont ainsi expliqué que cette tolérance a été décidée en 1923 afin de protéger les "intérêts" des garçons de café et des garçons-coiffeurs, rémunérés exclusivement par les pourboires. Pour que ces personnels touchent l'intégralité des pourboires, qui sont couramment versés dans un pot commun, le fisc français a en effet accepté d'exonérer ces sommes de l'impôt sur le chiffre d'affaires, ancêtre de la TVA. En contrepartie, les patrons devaient remplir certaines obligations, comme l'inscription des recettes dans un registre contresigné par le personnel. La Cour de justice a estimé cette exonération contraire à la directive TVA, qui prévoit que la base d'imposition des services doit comprendre la totalité de la somme payée par le client. Elle est constituée de "tout ce qui est reçu en contrepartie du service".

Ni le Ministère des Finances ni l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie qui revendique la représentation du secteur, ne savent chiffrer les conséquences de cet arrêt.

Cette application de la TVA pose une fois de plus le problème de l'harmonisation fiscale en Europe. Tant que les charges des entreprises françaises ne seront pas comparables à celles des entreprises européennes il serait destructeur d'aligner leur fiscalité à la hausse sur les règles de pays où la fiscalité incorpore le financement de la protection sociale. Seule la lutte des professions pour mettre en concurrence les systèmes fiscaux pourra répondre à la nuisance des hommes de l'État.

• JG Malliarakis
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