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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

LUNDI 25 JUIN 2001

JG Malliarakis

YOYO À LA CONFÉRENCE DES FAMILLES

Un catalogue de petites mesures démagogiques a été annoncé le 11 juin. L'occasion en était la Conférence sur la Famille. Et reconnaissons notre faiblesse : nous avons poussé un soupir de soulagement : on a évité le pire ! Le pire ? C'eût été certainement que la gauche socialo-communiste tienne ses promesses. De longue date elle se propose d'instaurer un prétendu "Revenu d'Autonomie des Jeunes". Cette revendication d'extrême gauche est poussée par l'UNEF-ID trotskiste. Elle est défendue par le Parti Communiste. Elle se trouve homologuée "vraie mesure de gauche" par le Parti Socialiste. Au rythme où vont les choses en France, elle devrait encore attendre 2 ou 3 ans. Et, disons-le aussi comme nous le craignons : si par hasard un homme comme M. Juppé redevenait Premier ministre nous l'imaginons très bien, pour faire "social" reprenant à son compte cette idée folle !

Le danger, repoussé pour l'instant, serait que l'on verse une allocation spécifique aux "adultes de moins de 25 ans sans emploi, sans qualification et sans droit au RMI". Le coût en est dès maintenant évalué à 30 milliards. Il paraît que ce seul chiffre aurait fait hurler le Ministère des Finances. Et cela seulement aurait obligé le Gouvernement à reculer.

Disons tout net que le drame coûterait infiniment plus cher. Sur des classes d'âges de 800 000 personnes, le système scolaire livre à la société française un rebut de 160 000 jeunes sans diplôme ni qualification. De 18 à 25 ans, le "marché" représente donc un premier contingent d'allocataires potentiels de 7 x 160 000 = plus de 1 000 000 de pré-RMIstes.

À ceux-là, s'ajouteraient les 2 millions d'étudiants que la revendication gauchiste voudrait arracher de la sorte à la dépendance de leur famille.

Au total, on pourrait envisager de verser une allocation, qui sera jugée misérable par certaines, de 3 500 F/mois à 3 millions de personnes, soit "seulement" 120 milliards par an. Cette folie est dans l'air. Reconnaissons, d'ailleurs, qu'elle a pour objet de détruire un peu plus la famille française et que, par conséquent, la conférence sur la Famille était le lieu par excellence de sa proclamation. Il faut probablement remercier M. Fabius, au nom de considérations arithmétiques, d'avoir empêché la chose…

M. Jospin a donc dû se replier sur des dépenses plus modestes mais considérées comme plus symboliques. Continuant à les chiffrer en milliards de francs français, rappelons-en la liste :

0,7 milliard de francs français pour le congé paternité ;

1 milliard de francs français pour l'aide au fonctionnement des crèches ;

1,6 milliard de francs français pour la refonte des aides au logement ;

0,18 milliard de francs français pour l'aide au logement des jeunes ;

0,25 milliard de francs français pour une allocation d'éducation qui sera versée aux parents d'enfants handicapés ;

0,5 milliard de francs français pour diverses mesures ;

____________

••• AU TOTAL 4,7 milliards de francs français de dépenses supplémentaires pour la branche Famille de la sécurité sociale.

La décision la plus pittoresque concerne évidemment le congé paternité. Ah ! Comme on va en parler dans les chaumières. Ah ! Comme cela va faire remonter le taux de fécondité des Françaises. C'est, reconnaissons-le, une merveilleuse trouvaille.

"Libération" (12 juin) la trouve tendrement "très tendance". Mais son collaborateur Tonino Serafini est un peu plus sévère : "les jeunes sont passés à la trappe au profit de leurs aînés, les pères". Telle est pourtant la vocation de cette campagne de communication. Elle tend ici à récupérer la famille comme concept. La famille devient ainsi, momentanément, la " valeur " éphémère d'une gauche relookée. On utilise de la sorte toute la palette des bons sentiments : après le PACS, la réforme de l'accouchement sous X, etc. Tout cela est appuyé par le joli sourire de Mme Ségolène Royal. N'oublions pas non plus que le congé paternité fait "coup double", car c'est une mesure féministe.

Pour ne pas être universellement grincheux, disons aussi qu'un effort pour les familles d'enfants handicapés est toujours le bienvenu. En l'occurrence, nous le trouvons plutôt pingre. Quant aux crèches, n'oublions jamais qu'il s'agit d'un service payant et qu'il fonctionnerait probablement mieux, dans un contexte privé. Alors, peut-être, s'adapterait-il mieux aux besoins horaires des mères n'ayant pas le bonheur d'être fonctionnaires…

Mais globalement aussi, il serait intéressant d'obtenir de M. Jospin la réponse à la question candide suivante :

Au nom de quoi s'autorise-t-il à annoncer 4,7 milliards de dépenses publiques supplémentaires ?

Où puise-t-il cet argent ?

Va-t-il créer un impôt supplémentaire, une taxe parafiscale, une hausse des cotisations sociales ?

Non, s'il le fait, il le fera subrepticement et il se garderait bien de le faire au moment même où il annonce son joli petit catalogue. M. Jospin "donne" aux Français. Il paraît que 73 % d'entre eux sont "favorables au congé paternel". Amen. L'argent sera sans doute pris sur les méchants Américains qui osent remettre en cause le protocole de Kyoto.

Quand on dispose d'un tableau de chasse aussi impressionnant que celui de M. Jospin, il est réconfortant de se poser en défenseur, que dis-je en défenseur, en bienfaiteur de la famille française. Le Premier ministre devrait calquer sa communication sur celle de Saddam Husseïn, homme d'État aux déguisements si variés sur les fresques immenses égayant les murs Bagdad. On le verrait donc ici pouponnant affectueusement dans une crèche, après avoir béni un PACS en mairie, conduit une locomotive et imité Chirac, tapotant une gentille petite vache au Salon de l'Agriculture.

Encore un ou deux petits tours de manège, Yo-Yo attrapera la queue du Mickey et il repartira pour un tour de 5 ans.

Tout cela aux frais des Français. Cela va sans dire. Cela va encore mieux en le rappelant.

• JG Malliarakis
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