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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
MARDI 10 JUILLET 2001
JG Malliarakis
Des Prévisions catastrophistes et de leurs effets réelsQuand on n'est ni un professionnel des marchés financiers ni un spécialiste de la conjoncture, il faut se garde de pronostics péremptoires sur la situation économique immédiate.
L'expérience prouve cependant, tel qu'il en ressort de la lecture un peu attentive des journaux français depuis quelque 35 ans, et particulièrement des publications réputées sérieuses, que toutes les prophéties relatives à un effondrement à court terme du système capitaliste se sont révélées radicalement fausses. Le manque de place nous contraint d'ailleurs à omettre charitablement de rappeler le nombre et la qualité de tous les experts en scénarios catastrophes.
Certes, en stricte logique, personne ne peut exclure qu'à un moment hypothétique futur, le modèle stalinien triomphe dans le monde entier faisant de la Corée du Nord un paradis du progrès social et de Cuba un jardin d'Eden des libertés culturelles et des identités. Parmi quelques désagréments (mineurs, bien sûr) un tel point de la courbe des évolutions humaines aurait sans doute l'avantage de faire taire les agités de l'anti mondialisation, de débusquer les trotskistes camouflés et de repeindre en rouge la partie jaune de l'enseigne Mac Do rebaptisée peut-être Mac Prolo standardisée à l'échelon planétaire "internationaliste" évidemment.
Mais en attendant de telles perspectives eschatologiques il semble bien que globalement l'abaissement à zéro des valeurs boursières simultanément à New York et Tokyo, Francfort et Londres, Milan et Séoul ne soit pas pour demain. Au contraire, en cas de baisse, le nombre d'occasions d'investir, et spécialement depuis 15 ans sur les marchés émergents, offrira d'intéressantes opportunités aux gestionnaires avisés.
Ce dont souffrent trop de nos contemporains découle en fait du " modèle naïf ", ainsi résumé par Milton Friedman : l'idée que "ce qui s'est passé récemment se reproduira constamment". Rien n'est plus illusoire. Quand la Bourse aurait monté de 15 % en 12 mois, elle ne progressera pas pour autant de 75 % dans les 5 prochaines années. Quand elle a perdu 2 % en 24 heures à Paris, elle ne reculera pas de 730 % en un an dans le monde entier.
Nous sommes en 2001 au lendemain d'une période de hausse considérable des marchés financiers, d'une expansion considérable de la productivité américaine et d'un développement sans précédent des économies capitalistes. En 1998, la crise asiatique avait été présentée comme un phénomène apocalyptique : ce jugement s'est révélé excessif et ridicule. Depuis : nouvelles poussées boursières et en 2000 on a assisté à une baisse sans précédent du taux de chômage aux États-Unis, et cependant à une progression de 5 % de la productivité américaine. Dans ces conditions, tout lecteur des discours d'Alan Greenspan savait ce qui allait se passer : le taux d'emploi aux USA est trop élevé, la Bourse est trop favorable, la politique monétaire du FED ne pouvait être que ce qu'elle est.
On a commencé à parler de ralentissement, de refroidissement à l'automne 2000, en pleine campagne électorale américaine. Or, de septembre à décembre 2000, la moyenne de la création nette d'emplois aux États-Unis a été de 87 000 par mois. Au total il s'est créé près de 900 000 emplois nets sur toute l'année 2000. Sur les 6 premiers mois de 2001, de janvier à juin, le solde reste positif à hauteur de 70 000 emplois nets. Certes le 2e trimestre est mauvais. Mais même après trois mois de hausses successives, le chômage américain est de l'ordre de 4,5 % en l'absence de tout dispositif de faux emplois "à la française" N'est-il pas excessif de voir une situation de crise là où il n'y en a pas, sans considérer comme " critique " les situations de suremploi, de chômage négatif frappant certaines villes et certaines professions ?
Dès le début 2000, Alan Greenspan avait mis en garde à la fois contre l'excès d'optimisme à court terme mais aussi contre toute forme de pessimisme à moyen terme. Jamais, en effet, les perspectives techniques d'un développement matériel des économies capitalistes n'ont été aussi favorables même au moment des grandes découvertes du XVe siècle ou de l'industrialisation au XIXe siècle. Il ne s'agit pas seulement des nouvelles technologies de l'information mais également de biotechnologies. Ces dernières vont probablement permettre des progrès gigantesques en médecine alors même que le coût de la santé atteint actuellement des niveaux insupportables. Ces coûts devraient donc diminuer. Le poids de la vieillesse qui hypothèque ces économies occidentales devait s'en trouver plus léger. Idem pour le coût des programmes éducatifs de plus en plus chers et de plus en plus stériles, particulièrement en France. Il n'existe pas un domaine où nous ne soyons à la veille de gains formidables de productivités.
Les campagnes catastrophiques peuvent engendrer deux types d'effets réels :
1re série : des reculs cumulés sur certains marchés spéculatifs comme le NASDAQ, gonflés d'espérances irrationnellement excessives, investies sur la base de slogans dithyrambiques sur "la nouvelle économie". Ces reculs peuvent engendrer pendant un certain temps des effets dominos. Les pertes sur les marchés financiers engendrent des réactions de repli, non pas "vers" l'immobilier mais au sein du marché immobilier: le reflux des plus values boursières engendre l'interruption momentanée des achats immobiliers
2e série : ceux qui auront tenu bon face à ces effets réels négatifs en bénéficieront doublement. Inéluctablement, en effet, la "relance" ou plutôt la reprise du rythme de croissance viendra, non des interventions publiques (surtout pas) mais des puissantes capacités de l'offre. Pour 2 ou 3 mouvements de repli, comme celui des téléphones mobiles de la 3e génération, que de possibilités de marche en avant, de développements de nouveaux marchés émergents !
Certes, les gens qui, telle Perrette, avaient dépensé par anticipation des gains surévalués (par ex. les pouvoirs publics français) souffriront.
Ce ne sera pas tout à fait injuste