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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MARDI 17 JUILLET 2001

JG Malliarakis

6 100 000 D'ACTIONNAIRES FRANÇAIS EN 2001

Il n'y a pas QUE de mauvaises nouvelles. L'annonce que le nombre des actionnaires français ait dépassé, pour la première fois depuis 10 ans, la barre des 6,1 millions de personnes doit être saluée pour une bonne nouvelle. Après avoir atteint le niveau dramatique de 3,7 millions en 1992, on remarquera, hélas, que le niveau de 1987 (6,2 millions) n'a cependant toujours pas été retrouvé.

Toute personne un peu sensée reconnaît, en effet, que la base même d'une société de liberté repose sur la notion de propriété privée. Là où n'existent pas de propriétés, le contrat et l'échange ne sont pas possibles. Seuls les rapports de force déterminent alors les relations entre individus.

Par conséquent, la diffusion de la propriété doit être une préoccupation fondamentale des défenseurs de la liberté. Nous ne devons pas ignorer cependant que les formes de propriété n'ont pas cessé d'évoluer au cours de l'Histoire. On ne doit pas s'étonner si les oppositions entre formes diverses de propriété, entre agriculteurs et éleveurs, Mésopotamiens sédentaires et Hébreux nomades, Caïn et Abel, Hutus petits et laids, Tutsis grands et beaux, sont vieilles comme le monde.

Si j'interroge par exemple le Livre de la Genèse, je découvre tout simplement que l'offrande de l'agriculteur Caïn ne correspond pas aux critères du tribut imposé à son frère Abel, éleveur d'ovins : la solution fratricide de ce conflit semble bien la première de nos violences sociales et le paradigme des arbitrages étatiques. Elle n'a pas laissé de bons souvenirs.

Si l'on recherche la vraie solidarité humaine, celle qui résulte des Harmonies Économiques chères à Frédéric Bastiat, on doit souhaiter le libre développement de TOUTES les formes de propriétés individuelles.

On remarquera qu'au contraire l'État français, depuis la crise funeste des années 1930, a tout fait pour contrarier et réglementer le libre accès des Français à la propriété privée du capital des entreprises, comme il a tout fait pour interdire pratiquement au citadin d'investir dans un fond de terre, comme il a tout fait pour démembrer artificiellement la propriété immobilière etc.

Certains hommes de l'État bien intentionnés ont cru de bon aloi à partir de 1953 de faire semblant d'encourager la propriété du logement. Vision fausse et artificielle : la propriété ce n'est pas seulement l'usus (être propriétaire de "son" logement) c'est aussi le fructus (le droit d'en percevoir un loyer) et l'abusus (la possibilité pratique de vendre, d'aliéner, de céder, d'hypothéquer, etc.). Or, le système légal immobilier français, notamment le décret de 1953 sur la copropriété mais pratiquement aussi toute la réglementation sur l'accession à la propriété, l'épargne logement et la très complexe fiscalité immobilière française, tout en faisant mine d'encourager "l'usus" contrarient et découragent le "fructus" et "l'abusus".

De plus, l'encouragement dirigiste de la propriété immobilière encadrée a créé deux distorsions.

1°Il a fixé une catégorie de propriétaires accédants surendettés dans l'immobilité par rapport à l'emploi et au lieu de travail.

2°Il a détourné les Français de l'actionnariat industriel.

Certes, la sociologie politique a pu enregistrer que les Français, qui se croyaient encore "idéologiquement" à gauche jusqu'aux années 1960 sont passés à droite au milieu des années 1970 au moment où 51 % d'entre eux ont été juridiquement propriétaires de leur logement.

Mais il reste à accomplir une autre évolution : passer de patrimoines majoritairement fonciers et immobiliers à des patrimoines majoritairement mobiliers. L'économie mondiale et les grosses fortunes capitalistes ont opéré cette révolution au milieu du xix siècle. A l'aube du xxi siècle les classes moyennes françaises, et singulièrement les classes intellectuelles, ne l'ont pas accomplie. Ils guillotinent moins qu'à l'époque de Robespierre, ils sont moins fratricides que Caïn, mais ils ont encore de gros progrès à faire. Nos journalistes, par exemple, traitent encore de "boursicoteurs" (cf. dépêche AFP du 11 juillet) les 14 % de ménages françaises qui investissent en actions.

Depuis la spoliation monstrueuse des 85 000 petits épargnants français qui ont cru en 1888 aux mensonges des hommes de l'État français et des journalistes français "soutenant" la folle entreprise de Panama, on pourrait quand même reconnaître que l'idée d'un "capitalisme de casino" relève de la caricature… On pourrait imaginer que l'information des "hommes de progrès" n'en est plus à Germinal. Ce serait leur accorder une très grande confiance. Elle serait injustifiée.

• JG Malliarakis
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