COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

LUNDI 8 OCTOBRE 2001

LA LANCINANTE DESTRUCTION DE LA BRANCHE FAMILLE…

Alain Juppé fut responsable en 1996

l'étatisation complète de la sécurité sociale

La sécurité sociale de 1945 s'est fondée en France sur l'alliance de deux catégories d'institutions : les assurances sociales et les allocations familiales… Les premières fonctionnaient de manière privative jusqu'à la Charte du travail de 1941 ; elles n'ont été vraiment étatisées que par le très funeste plan Juppé de 1995, rendu possible par la réforme constitutionnelle de 1996, et mis en place par les ordonnances signées par M. Barrot. Il faut bien s'en souvenir, si l'on ne veut pas voir recommencer perpétuellement les mêmes erreurs.

Quant à la politique de la Famille, il est non moins vrai, historiquement, qu'elle remonte aux préoccupations affirmées en France dès le gouvernement Daladier de 1938, dramatiquement confirmées par la seconde guerre mondiale, et soulagées par le magnifique renouveau démographique français de l'après-guerre jusqu'en 1960, année bien lointaine où la France pouvait se dire la plus jeune nation d'Europe. L'illusion a été de croire que ce phénomène tenait à l'intervention quantitative et financière de l'État.

Car, progressivement, dans les 40 dernières années, la branche famille de la sécurité sociale étatique a changé de nature. En gros 70 % de ses prestations ne concernent plus l'enfance.

L'un des derniers tournants aura aussi été marqué, toujours sous le gouvernement Juppé, par la prétendue Conférence de la Famille de 1996. En prétendant soutenir et subventionner " toutes les familles ", on a ouvert la voie à une destruction de la cellule familiale, destruction encouragée par l'État. Alors que, dès 1996 les États-Unis tiraient le bilan des effets négatifs de l'aide financière inconsidérée à la famille mono parentale (lire à ce sujet notre bulletin du 31 juillet 1996 et le document annexé traduisant l'article publié le 27 juillet 1996 par le sénateur Lieberman), la France en arrive même désormais à imaginer d'investir et de parier sur la famille que l'on pourrait qualifier d'anti-parentale : tel est le projet annoncé sous le prétexte d'aider à " l'autonomie des jeunes ".

Ce projet n'avait, au départ, pour véritables promoteurs que les franges les plus radicales de l'extrême gauche. Même le parti communiste ne s'y est associé que tardivement, tout en étant désormais l'un de ses plus solides porte parole à l'Assemblée nationale.

La loi n° 2001-582 du 4 juillet 2001 "relative à la mise en place d'une allocation d'autonomie pour les jeunes de 16 à 25 ans" n'a d'ailleurs été votée qu'à contrecœur, pour conforter la composante communiste de la majorité actuelle. Elle ne prévoyait, pour commencer, à titre prévu comme essentiellement symbolique, qu'une simple " Commission nationale pour l'autonomie des jeunes, placée auprès du Premier ministre " (Article unique de la Loi).

Et puis… Et puis… Vient de paraître le Décret n°2001-900 du 2 octobre 2001 relatif à la composition de Commission nationale pour l'autonomie des jeunes.

Cette commission comprendra beaucoup de monde. La CNAF, Caisse nationale des allocations familiales (branche famille de la sécurité sociale actuellement présidée par la CFTC), ne déléguera qu'un seul représentant. Les parlementaires seront seulement 6. Le gouvernement nommera aussi, pour faire bonne mesure 6 élus locaux. En face : 13 représentants des divers ministères, 8 représentants des bureaucraties syndicales et 5 patronaux, 3 représentants des mouvements de chômeurs, 5 représentants des mutuelles, 6 représentants du " Conseil national de la jeunesse " (???) 6 représentants des " organisations représentatives des étudiants et lycéens ", 3 parents d'élèves et, inévitablement, 12 personnalités dites " qualifiées ". Cette composition est caractéristique, presque caricaturale de tous les conseils mis en place depuis 1941 par la technocratie française, sans considération pour l'élection.

De plus, outre son caractère outrageusement non-démocratique et non représentative, cette Commission, laissera l'unique représentant de la branche famille face à 58 autres personnes dont l'immense majorité sera acquise au principe de subventionner " les jeunes ". Comme la branche famille de la sécurité sociale a largement cessé de verser prioritairement des allocations à caractère vraiment familial, l'évolution sera présentée comme inévitable.

On peut même imaginer un scénario, analogue à celui du plan Juppé copiant les projets socialistes, où les adversaires originels du projet le mettraient finalement en œuvre. 

JG Malliarakis

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