COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 26 OCTOBRE 2001

JG Malliarakis

56 PATRONS AU NOM DE 1,5 MILLIONS DE SALARIÉS

Les chefs d'entreprises créent des emplois

le socialisme les détruit

La photo en gros plan du président du Medef, M. Ernest-Antoine Sellière, occupe les trois quarts de la première page de l'Humanité (25 octobre), sous une citation (fausse, bien entendu) : "laissez-nous licencier en paix !". Le doigt tendu du président du Medef est accusateur, comme l'a bien remarqué le quotidien communiste : il donne tout simplement la parole aux 56 chefs d'entreprise, "superbe échantillon du patronat français sur le pied de guerre", qui ont publié le 24 octobre un appel adressé à Lionel Jospin ?

C'est dans le quotidien économique Les Échos que les présidents de 56 grandes entreprises françaises ont demandé au gouvernement de renoncer aux dispositions archaïques relatives au droit de licenciement contenues dans le projet d'une Loi qui se prétend "de modernisation sociale". Ce texte fourre-tout électoraliste et d'inspiration clairement socialo-communiste devrait être définitivement adopté par l'Assemblée en décembre, afin de servir de plateforme aux deux campagnes électorale de l'année 2002.

Le Monde (25 octobre) croit pouvoir remarquer que "cette démarche est une première, les patrons ayant toujours laissé le Medef parler en leur nom pour exprimer leur hostilité à certaines réformes (35 heures) ou, au contraire, en défendre d'autres (fonds de pension)". Cette fois-ci, ils signent en nom personnel. Ils le font aussi au nom des 1,5 millions de salariés de leurs entreprises respectives. Ainsi de grands poids lourds, comme Louis Schweitzer (Renault) ou Jean-Marie Messier (Vivendi), ne font pas partie des signataires. Cela nous semble d'ailleurs bien significatif. Au contraire certains qui sont réputés avoir "des liens avec le PS ou des affinités intellectuelles avec certains de ses dirigeants" se sont joints à la démarche.

Même le Monde a pu remarquer qu'ils reprochent à la nouvelle loi de

Le Monde rappelle que Lionel Jospin a été conduit à accepter ces innovations "sous la pression du PCF " après l'affaire Michelin à l'automne 1999 et les licenciements chez AOM Air liberté et Marks & Spencer. Cette origine est clairement revendiquée par l'éditorialiste de l'Humanité qui feint l'écœurement : "Et ces cinquante-six grands patrons osent affirmer que restreindre cette liberté de licencier comme bon leur semble serait un piège (qui) se refermerait alors sur les salariés !" alors que "ces derniers mois, ils ont usé et abusé des plans de restructuration, prenant prétexte de la dégradation de la conjoncture, puis des tensions internationales depuis le 11 septembre, pour amplifier la course aux dividendes". Pour L' Huma, le monde est simple. Les bons, les salariés, d'un côté, les grands méchants loups, les patrons, de l'autre, qui veulent "avoir à leur disposition tout l'arsenal qui permet de flamber en Bourse et d'assurer aux actionnaires des rendements d'usuriers : les fusions, même si l'expérience montre qu'elles détruisent une grande partie de la valeur des entreprises, le travail précaire, qui garantit une main-d'œuvre corvéable, et les licenciements". L' Huma appelle le Premier ministre à avoir "le courage de leur résister" puisque ces patrons sont "en campagne sachant qu'ils pourront compter sur Jacques Chirac et ses amis".

Pas si simple, ni si évident, remarque même Le Monde, non seulement parce que cet appel a lieu "dans un contexte de forte chute de la croissance économique qui a incité M. Jospin à assouplir les règles de passage aux 35 heures pour les entreprises de moins de vingt salariés". C'est un précédent sur lequel comptent les signataires.

Mais, à suivre le raisonnement du Monde le loup "libéral" serait dans la bergerie socialiste : "Depuis juin, Laurent Fabius plaide en ce sens, redoutant que la réforme ait un effet dissuasif sur l'investissement et le recrutement (Le Monde du 16 juin). En vain, jusqu'à présent."

• JGM •

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