COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
VENDREDI 16 NOVEMBRE 2001
JG Malliarakis
VOTE SYMBOLIQUE DE LA "TAXE TOBIN"À nouveau les jospiniens se rallient
à la propagande d'extrême gauche
C'est ce 19 novembre que, pour la première fois, la proposition d'adopter en France la taxe Tobin va se trouver propulsée comme si elle était réaliste devant les parlementaires français.
Discrètement en effet, le 14 novembre au soir, la commission des finances de l'Assemblée nationale, présidée par M. Henri Emmanuelli adoptait le principe de cette taxe dite Tobin.
Rappelons que cette appellation, entrée dans le langage, est abusive, puisque l'économiste Tobin la désavoue aujourd'hui, après avoir préconisé dans les années 1970, une taxation des transactions monétaires afin d'enrayer, imaginait-il alors, la fluidité de ce marché face à la fin de la convertibilité or du dollar décrétée par Nixon en 1971.
Le vote de principe de la commission des Finances de l'Assemblée propose un dispositif permettant l'entrée en vigueur d'une telle taxe, qui deviendrait applicable si seulement les autres pays de l'Union européenne adoptaient la même mesure, "ce qui", commente M. Éric Aeschimann dans Libération (15 novembre) "n'est pas prêt d'arriver". "Cet amendement, note encore Libé, est le fruit d'un long processus politique, qui traduit la valse-hésitation du gouvernement Jospin sur le sujet depuis un an. À l'automne 2000, un groupe de députés PS dépose un amendement instaurant une taxe Tobin à taux zéro."
Déjà, dans l'esprit de ses initiateurs, il s'agit surtout de créer un rapport de force favorable à la taxation des mouvements de capitaux, plutôt que d'arrêter une mesure réellement opérationnelle. La proposition est alors rejetée par la majorité du groupe PS, sur ordre du gouvernement.
"La percée de l'extrême gauche à l'élection municipale de mars dernier", commente Libé, "a changé la donne. Depuis le printemps, Matignon en pince pour Attac et la mouvance antilibérale. Si Lionel Jospin demeure sceptique sur ce genre de militants, une partie de son entourage, ainsi que François Hollande, le patron du PS, l'incitent à faire un geste envers cette frange particulièrement volatile de l'électorat de gauche. Aussi, fin août, lors de sa rentrée télévisée, le Premier ministre se lâche et annonce qu'il se rallie à la taxe Tobin C'est, note Libé, ce qui s'appelle faire de la politique virtuelle." C'est d'ailleurs la deuxième fois que M. Jospin se dit favorable à la "Taxe Tobin" puisqu'il en avait déjà soutenu l'idée en 1995, avant d'y renoncer.
Taxer les échanges de devises dans un seul pays de la zone Euro n'a strictement aucun sens. Certes, le gouvernement de Paris s'est lancé dans une offensive auprès de ses partenaires européens. Un groupe de travail est créé, qui remettra ses conclusions dans quelques mois. En fait, seule la Belgique semble plus ou moins favorable à cette folie. Mais, sans attendre, les députés français, ceux de la majorité socialo-communiste et certains RPR, ont voulu profiter de la brèche pour revenir à la charge. Difficile pour le gouvernement, cette fois, de s'y opposer.
Pour éviter aux députés PS qui avaient voté contre en 2000 de se déjuger, le texte a été rédigé autrement, rappelle perfidement Libération. Un "vrai" taux d'imposition a donc été fixé : ce sera au maximum 0,1 %. Simplement, l'application de ce "vrai" taux sera conditionnée à l'adoption d'une directive qui imposerait alors la mesure à l'échelon communautaire.
Mais comme les directives fiscales nécessitent, au sein de l'Union européenne des décisions à l'unanimité des 15, une telle décision n'est, évidemment, pas pour demain. Les services du Premier ministre et ceux du ministère des Finances le savent parfaitement. Ils ont donc cru pouvoir laisser passer cet amendement avec d'autant plus de facilité qu'ils croient en connaître la vacuité totale.
L'erreur est en revanche de confondre ici vacuité et innocuité. Dans nos bulletins des 29 et 30 août, nous évoquions en effet son contenu dialectique. En se proclamant favorable à l'imbécile projet de Taxe Tobin, Jospin lui donne une apparence de consistance : n'oublions pas par exemple que les militants d'Attac pensent (sérieusement) que M. Jospin est un "ultralibéral". Ils éprouvent donc dire : "même l'ultralibéral Jospin est obligé de concéder la pertinence de notre projet". En le faisant voter ou en laissant voter par des parlementaires, même pour la frime, le gouvernement socialo-communiste français renforce les militants de base dans l'idée que cela devrait être la "la loi", puisque c'est "voté", et puisque c'est par conséquent "l'expression de la volonté générale" Allez vous étonner après cela que la culture économique et juridique des Français recule
JGM