Souhaite à tous ses lecteurs un joyeux et saint Noël
COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
NOËL 2001
JG Malliarakis
La Mégère Aubry était déguisée en Père Noël
Ses petits paquets démontrent que la gauche française demeure essentiellement plombée par l'idéologie et l'illusion de l'étatisme.
D'abord, il faut bien réfuter le titre illusoire des Échos (13 décembre). Il commentait en ces termes le programme de Martine Aubry : " Le Parti Socialiste veut tourner résolument le dos à l'étatisme ". Le point est d'importance car ce quotidien économique réputé le plus à droite, ou le moins à gauche, est celui que lisent les gens sérieux. Et on n'a pas le droit de se tromper à ce point et d'intoxiquer les lecteurs.
Le 12 décembre, en effet, le parti socialiste français a adopté le canevas de ce qui sera en janvier l'objet d'une convention spéciale des militants en vue d'encadrer le projet présidentiel de la gauche.
Qu'on le veuille ou non, M. Jospin actuellement Premier ministre ne peut envisager sa campagne pour les élections présidentielles d'avril et mai qu'en fonction de son parti, autour duquel il cherchera aussi à asseoir une majorité législative en juin 2002.
"On" avait donc confié à Martine Aubry le soin de piloter le projet.
Cela veut bien dire que le même "on" privilégie l'hypothèse de lui confier en cas de victoire socialiste au second tour du scrutin présidentiel le 5 mai, puis aux législatives, les clés de l'Hôtel Matignon. Nous voilà donc contraints d'analyser dès maintenant la pensée d'Aubry comme on doit connaître la pensée d'Islam Karimov en Ouzbékistan ou celle de Kim Il-sung en Corée du nord.
La lecture du document est parfaitement édifiante.
Il s'agit d'un catalogue étatiste, et même super étatiste, de toutes les propositions les plus aberrantes de l'utopie post marxiste du style du mouvement Attac.
Comme il se doit, "on" s'y rallie à l'idée d'un impôt dans l'esprit, ose-t-on dire, de ce qu'on appelle par abus de langage la taxe Tobin.
Un mot, tout de même sur les idées émises en 1972 par l'économiste éponyme. Depuis, "le" Tobin, les a réfutées. Il y a 30 ans il s'exprimait dans le contexte nouveau et particulier de l'époque : on se trouvait au lendemain de la destruction du système monétaire mondial dit de Bretton Wood. La décision essentielle avait été l'uvre de Nixon en 1971 renonçant à la parité or du dollar instaurée par Roosevelt. Il semblait donc alors redoutable de voir les transactions monétaires transfrontalières proliférer de manière "spéculative". L'idée de les freiner par la taxation avait ALORS pour but de maintenir un ordre monétaire international.
Tout au contraire, la proposition Aubry-Jospin s'inscrit résolument AUJOURD'HUI dans le contexte de ce qu'on appelle pudiquement la lutte anti mondialisation. Il s'agit, et personne ne saurait en douter, d'une lutte pour la subversion de l'ordre économique international.
Mais il serait erroné de cantonner à cette seule idée, si fausse et perverse soit-elle, le programme étatique infiniment plus complet rêvé par l'aile la plus technocratique du parti socialiste.
N'oublions pas son contexte politique. Toute la campagne Jospin sera hypothéquée par la concurrence aussi bien de Jean-Pierre Chevènement, crédité actuellement de 8 à 9 % que des deux candidats traditionnels de l'idéologie et de la dialectique marxiste-léniniste en France : Laguiller et Hue, crédités chacun de 6 à 7 %. Jospin sait qu'il ne peut pas négliger ces 20 ou 23 % potentiels.
Talonné de la sorte, le PS a choisi bien évidemment de demeurer dans l'alliance avec les chevènementistes, avec les communistes et même avec les gauchistes. Et pour cela, c'est hélas la logique même de notre affreuse Constitution, il se bloque sur le dénominateur commun de toute la gauche qui est de cataloguer des " mesures " allant dans le sens de l'étatisme.
Premier exemple : Quand la gauche parle d'autonomie des jeunes, elle entend les arracher à la responsabilité de leurs familles. C'est une proposition qui vient de très loin. Elle remonte aux grandes heures gauchistes de l'Unef. Elle a été reprise par le groupe communiste à l'Assemblée Nationale. Elle fait aujourd'hui partie du catalogue des petits paquets de la mégère Aubry, déguisée en Père Noël. Elle a évidemment pour objet non pas l'autonomie de la jeunesse, encore moins le développement de son sens des responsabilités, mais tout simplement son étatisation sociale dans l'assistanat dès l'âge de 18 ans prolongeant l'étatisation éducative dans le laïcisme commencé à l'âge de 6 ans et même bien avant dans la crèche et la maternelle.
Deuxième exemple : pendant toute la journée du 12 décembre, le camarade Henri Emmanuelli s'est agité. Son propos était de faire passer l'idée selon laquelle le "plein emploi" devait être la priorité du programme socialiste. Si nous ne connaissions ses arrière-pensées nous lui donnerions raison. Et nous observerions par exemple qu'en Europe on doit remarquer les performances de l'Angleterre qui compte aujourd'hui 3 % de chômeurs, quand les États-Unis décrits comme en récession en ont 5,7 %, c'est-à-dire encore beaucoup moins que la France. On doit aussi remarquer l'admirable performance du gouvernement Aznar en Espagne qui a réduit de 10 points le taux de chômage légué par le brillantissime socialiste Felipe Gonzalez.
Si l'idée d'Emmanuelli l'avait emporté sur le catalogue Aubry nous aurions donc presque pu dialoguer avec lui. D'accord sur le but, discutons des moyens. Car, bien évidemment, Emmanuelli, président de la Commission des Finances, imagine financer le plein emploi par le déficit budgétaire de l'État, ce qui est une idée complètement archaïque.
Mais même archaïque Emmanuelli est trop moderne pour figurer dans le catalogue des petits paquets Aubry. La gauche française en est aujourd'hui ramenée aux idées et aux concepts des caudillismes démagogiques latino-américains. L'État est un Père Noël qui " fait quelque chose pour le peuple ". C'est ainsi que l'on doit apprendre la nécessité d'une couverture Logement universelle, d'un capital temps de formation, de 200 000 contrats sociaux de travail et d'un saut quantitatif dans l'Éducation Nationale. Mesquine question, bien sûr, que celle du coût, donc du financement, de telles promesses.
Ne nous attardons même pas sur les mesures tendant à accorder aux étrangers extra-communautaires un droit de vote dans les élections locales et même le commencement d'une suppression de ce que le programme socialiste accepte d'appeler "double peine", c'est-à-dire l'expulsion des délinquants étrangers. De telles concessions dialectiques aux campagnes d'extrême gauche coûteront des voix à la gauche de gouvernement, voix que M. Chevènement se charge sans doute de ramener au bercail sous le drapeau de son jacobinisme.
Le troisième exemple, le plus frappant, nous est donné par le dossier central de Libération (du 13 décembre), tournant autour de la proposition Mattéi, riposte aux conséquences absurdes et iniques de l'arrêt Perruche.
Discutée plus rapidement qu'à l'accoutumée à l'Assemblée nationale, cette proposition tendait et tend encore à légiférer de manière urgente et pertinente dans un domaine où la Loi doit intervenir. (On peut tout de même critiquer dans cette proposition Mattéi le fait qu'elle se réfère encore à la Loi de 1975 et, sur ce point nous renvoyons à la juste analyse qu'en fait la Nouvelle Lettre de Jacques Garello N° 691 du 15 décembre p. 4) Elle tend même à affirmer le rôle de la solidarité nationale dans une fonction qui est vraiment la sienne et qui est le handicap. Que ce handicap soit congénital ou accidentel, nous devons bien comprendre qu'il ne peut être assumé ni complètement par la famille, ni entièrement par les collectivités locales au moins en milieu urbain. Il est donc légitimement une préoccupation de la solidarité nationale.
Nous sommes en face de l'application réelle et concrète du principe de subsidiarité.
Or, sur ce point révélateur, la gauche de gouvernement, le PS et particulièrement le quotidien Libération, ergotent.
On a donc remis à plus tard ce qui est urgent, et ce qui touche au plan des principes, non seulement les professions de santé, mais la santé des Français.
La gauche étatique distribue ses petits paquets de manière arbitraire. Mais son étatisme ne veut gérer que l'automatique, le quantitatif, le quotidien.
La gauche étatique se veut un Père Noël à usage facile, démagogique, fonctionnarisé.
Qu'advienne l'exceptionnel, et le Père Noël de la gauche étatique a fini ses 35 heures.
Le Père Noël de la gauche étatique se révèle alors pour ce qu'il est :
" Le Père Noël est une ordure ".
JG Malliarakis