Deux événements, apparemment secondaires, survenus en 48 heures, l'un dans le champ social, l'autre sur le terrain strictement politique, ont dû, auraient dû, rappeler aux Français de fort mauvais souvenirs. On les croyait enfouis sous 5 années de gouvernement cohabitationniste, stérile et courtois.
Le premier événement, c'était, ce 15 mai, la négociation entre le président du principal syndicat de médecins français et le ministre de la Santé. Le Dr Chassang président de la CSMF rencontrait le Dr Mattei, ce ministre consensuel et bien pensant, ci-devant président du groupe parlementaire libéral.
Les deux hommes ont donc évoqué un dossier qui oppose depuis des mois, tous les praticiens, particulièrement les généralistes aux pouvoirs publics et aux caisses d'assurance maladie. Cela tourne autour, ou plutôt cela se cristallise autour, de la consultation de base à 20 euros et la visite à 30 euros.
Pour d'innombrables raisons on aurait pu imaginer l'affaire simple à débloquer tant elle est sans surprise.
Les médecins en font une revendication minimale et les patients l'ont comprise. Tout l'hiver et jusqu'au dernier "pont" de l'Ascension, les confrères du Dr Mattei ont été sur la brèche et dans la grève. Et on pourrait même concevoir que les mêmes professions de santé qui s'étaient détachées de la droite en 1997 (à cause du plan Juppé et du fait du mouvement des internes) ont contribué, 5 ans plus tard, à la déconfiture de Jospin. Mais elles peuvent encore zapper les 9 et 16 juin.
Seulement voilà, le Dr Mattei, comme tous les ministres de la Santé depuis 1945, ne dispose d'aucun pouvoir de décision pratique en matière de santé parce qu'il n'a pratiquement aucun budget. Tout dépend des caisses de sécurité sociale, elles-mêmes contrôlées par les gens du ministère des Finances.
Et on a donc " remis à 15 jours " le bouclage du dossier de la consultation à 20 euros.
Car une autre question d'ordre apparemment politicien avait été évoquée la veille : qui dirige politiquement la droite ?
La réponse ne doit rien à la Constitution et elle ne doit pas grand-chose à l'expression de la volonté des électeurs. Elle est le produit d'une assez inconvenante opération de tambouille au sein des appareils.
L'hebdomadaire L'Express consacre en cette semaine du 13 mai, sa photo couverture et de grandes affiches publicitaires, aux 3 hommes qui selon lui, dirigent la France, MM Chirac, Raffarin et Juppé.
Et manifestement, M. Juppé, 3e Consul, caresse le rêve d'être le 1er Consul.
On a vu son irrésistible retour ascensionniste se préciser jour après jour, en filigrane d'abord et maintenant de manière effrontée, au travers de l'Union en mouvement, première appellation, puis de l'Union pour la Majorité Présidentielle (1).
Officiellement au sein de cet étrange parti unique de la droite (2) il n'est que l'un des 5 membres d'un comité politique, siégeant aux côtés des citoyens Lepeltier, Balladur, Douste-Blazy et Gaudin.
Sur les 5 éphores de ce directoire spartiate, 3 appartiennent au RPR. Celui-ci fait figure de parti central au sein d'une coalition inégale.
Et M. Juppé apparaît de plus en plus ouvertement comme le mâle dominant de la tribu.
Or, deuxième événement, au cours d'une conférence de presse le 14 mai, notre mâle dominant bordelais s'est révélé de manière trop brutale tel qu'en lui-même, rabrouant les journalistes, s'indignant même qu'on lui demande des nouvelles de François Bayrou, sans les voix duquel son rêve consulaire irait tout droit à Sainte-Hélène, sinon à Sainte-Pélagie, en prison sans passer par la case départ. La magistrature syndiquée vient, en effet, de se rappeler à son bon souvenir en validant les procédures du juge Halphen. Or, contrairement au chef de l'État, M. Juppé ne dispose d'aucune forme de privilège juridictionnel, pour ne même pas parler d'impunité.
Le repoussoir Juppé risque ainsi de jouer un très mauvais tour à la droite.
Son plan de 1995 et 1996 n'a pas seulement consisté à opérer la plus grande étatisation de l'Histoire, étatisation de 500 000 professionnels de santé, étatisation de l'ensemble du système de sécurité sociale incluant les retraites. Ce plan, suivi des ordonnances Barrot de 1996, fut aussi à l'origine du désastre assez ridicule de 1997.
Quand donc finirons-nous d'en payer les conséquences ?
Quand donc serons-nous débarrassés de l'énarque en chef ?
(1) Cette deuxième dénomination fut inventée le 23 avril quand il fut clair que cette majorité présidentielle englobant la gauche et l'extrême gauche n'aurait, évidemment, aucune valeur
(2) Ce vieux rêve était caressé déjà par le gouvernement de Vichy en 1942.
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