COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
VENDREDI 19 JUILLET 2002
DONNER UN COUP DE BALAI aux PILLARDS DU CAPITAL
Ce sont les vrais ennemis de la Libre entreprise.
Il est assez piquant, peut-être est-ce même significatif de la crise véritable où nous nous trouvons, de voir les affolements et les expédients imaginés par la pensée unique, sous prétexte de sauver le Capitalisme qu'elle n'a pourtant jamais cessé de saboter.
Si l'on entend par capitalisme, en effet, le système décrit par Marx comme appropriation des moyens de production et de la plus-value, il avait triomphé non pas en 1991 lors de l'effondrement de l'Union soviétique, mais dès 1921 au sortir de la guerre civile, lors de l'édification du système communiste puisque tout appartenait à l'État et que l'État lui-même était la propriété du Politburo. Rien n'était plus "capitaliste", de ce point de vue, que les économies de l'est Fort heureusement, ce "capitalisme" là, bureaucratique, monopolistique et concentrationnaire, s'est effondré au profit d'une liberté qui, espérons-le, ne disparaîtra pas mais se développera.
Il est assez piquant aussi devoir les trotskistes du quotidien de la pensée unique Le Monde suggérer, dans leur livraison datée du 19 juillet, ce qu'ils appellent "Huit pistes pour Réformer le capitalisme." Ce sont des idées pauvrettes, timides, et elles seront insuffisantes en l'absence d'une véritable affirmation éthique telle que la préconise notamment le président des États-Unis.
On remarquera en cette occasion que la pensée unique française n'a même pas le courage de poser franchement le problème de ce pillage du capital que permet le mécanisme des stocks options, devenu intéressement aux résultats en l'absence de résultats !
Il est également piquant de les entendre, eux qui investissent perpétuellement dans de gros titres de plus en plus aberrants, au point de faire se retourner dans sa tombe Hubert Beuve-Méry lui-même (1) reprochant au capitalisme de ne considérer que le court terme.
Laissant les marxistes à leur misère dialectique, ce n'est pas la définition du capitalisme par Marx mais celle de B...hm-Bawerk que nous devons retenir. Ce maître de la grande école autrichienne (2) fait reposer le capitalisme sur le détour de production, donc en définitive sur l'épargne. À moins d'être un capitalisme d'État, reposant lui-même non sur l'épargne des individus mais sur le pillage intitulé accumulation socialiste primitive, cette épargne est le fait de personnes libres et responsables.
Pratiquement, le système capitaliste n'a cessé de se développer en Europe d'abord, puis aux États-Unis, non pas seulement depuis la révolution industrielle du XVIIIe siècle (3), non pas depuis la réforme calviniste du XVIe siècle (4), mais de manière manifeste dès le XIIIe siècle dans les villes de Flandre et d'Italie, lorsqu'est apparue la comptabilité en partie double.
C'est en effet lorsqu'on a pu techniquement rapporter le bénéfice comptable d'une entreprise à ses fonds propres, c'est-à-dire à son capital au sens économique du mot, qu'est apparu historiquement le capitalisme.
Depuis 800 ans chez nous, cette technique s'est développée, s'est affinée et sans doute elle ne cessera jamais de le faire. Elle est actuellement en train de s'enrichir de nouvelles approches et de nouveaux concepts (marchés dérivés, titrisation, amortissements de régénération d'activités, etc.). Il n'est donc nullement étonnant que la grande incertitude actuelle des marchés financiers soulève d'abord le problème des normes comptables. Et de ce point de vue nous devons féliciter de la ferme doctrine exprimée dans son discours parisien du 11 juillet (5) par le commissaire européen M. Bolkestein demandant, notamment, à ce que se rapprochent réciproquement les normes comptables européennes IAS et les normes américaines GAAP.
Il est piquant de voir les dirigeants français accuser les seules pratiques américaines (6) et prétendre parler, contre l'Europe, d'un modèle européen.
Il est en effet à noter, hélas, que les dirigeants français, et particulièrement les gens du ministère des Finances, incapables de produire un compte patrimonial, n'ont pas encore intériorisé eux-mêmes les normes européennes. Il est donc un peu surprenant de les voir donner des leçons, eux dont les pratiques de direction juridique des entreprises, ce qu'on appelle du mot à la mode de gouvernance, font la plus grande place aux complaisances entre énarques.
Il n'est donc pas douteux qu'un très fort coup de balai moralisateur des pratiques d'affaires devra être donné. Et cela sera nécessaire des deux côtés de l'Atlantique (7) si l'on veut donner un nouveau souffle au capitalisme, en le débarrassant de tous les pillards qui s'en sont emparés, indûment, frauduleusement et illégalement (8).
Un tel coup de balai ne sera pas pour nous déplaire.
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(1) Le Monde de Beuve-Méry pratiquait une autre forme de mensonge. Plus subtile. Il était le journal le plus faussement objectif et le plus objectivement faux. Ses continuateurs trotskistes assurent en quelque sorte le "châtiment" de Beuve-Méry.(2) Dont Von Mises et Hayek sont les continuateurs.
(3) Thèse de l'école d'inspiration utilitarienne modélisée par l'influence exclusive anglo-saxonne.
(4) Thèse liée à l'école sociologique allemande de Max Weber et, en partie, de Werner Sombart.
(5) "Il y a 5 actions, a déclaré ce jour-là M. Frits Bolkestein, commissaire au marché intérieur, que nous devons prendre au niveau de l'Europe : sur le renforcement du gouvernement d'entreprise, un rapport d'étude sera finalisé en septembre et je compte prendre des initiatives le plus rapidement possible ; j'aimerais aussi voir les normes comptables européennes et américaines converger d'ici à 2005 ; nous devons regarder plus en détail la façon dont l'audit est régulé. Il faut également, à plus long terme, que les fonds de pension diversifient leurs risques ; enfin, nous réfléchissons aux informations que les entreprises se doivent de publier."
(6) Dont on doit remarquer qu'elles semblent entrer dans une phase punitive assez fermes.
(7) Et notamment aussi au Japon.
(8) Tout en s'abritant presque toujours derrière l'idéologie du politiquement correct.
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