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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

JEUDI 25 JUILLET 2002

ET SI LA CIA MANIPULAIT VRAIMENT LE CINÉMA HOLLYWOODIEN ?

Comme le quotidien Le Monde le prétend…

Dans son édition datée du 24 juillet, le quotidien de la pensée unique fait à ses lecteurs le cadeau d'une information sensationnelle, et combien inédite : la CIA influencerait les scénarios du cinéma américain. Depuis quelque 50 ans, la chose était connue des gens qui ne lisent pas Le Monde. On peut donc dire que les nouvelles vont vite entre le pays réel et le pays légal.

L'Amérique exprime son idéologie notamment via Hollywood. Ce n'est pas très surprenant et la seule chose étonnante c'est que nos intellectuels n'en déduisent pas que précisément il faut faire la distinction entre la conception qu'Hollywood propage à propos des États-Unis et la réalité. Nous nous piégeons nous-mêmes si nous opérons la confusion.

Pour en avoir le cœur net, mais aussi parce que j'aime beaucoup Hopkins, je me suis donc rendu au Forum des Halles pour voir Bad Company qui vient de sortir. Un film pareil, consacré à une opération fictive de la CIA, entre évidemment dans le schéma envisagé.

À vrai dire le regard hollywoodien sur l'action des services spéciaux des États-Unis n'est pas une chose vraiment nouvelle. Nous devons aussi mesurer le fait que ces films sont conçus en fonction d'un marché devenu certes mondial mais sur la base, au départ, d'une consommation intérieure. Il n'est pas dans la nature du système de références américaines de se demander s'il existe vraiment une différence d'approche en dehors de leurs frontières. Pour tout Américain normalement constitué, toute autre approche est ou bien perverse ou bien destinée à se trouver phagocytée dans le grand magma du monde américano-centré. Chacun sait que ce qui est bon pour General Motors est bon pour les États-Unis et qu'en fonction de cette même dialectique ce qui est bon pour les États-Unis est nécessairement bon pour le monde.

Comment s'étonner de voir par conséquent sur les écrans parisiens la transposition constante de ce mécanisme dès lors qu'il s'applique à des choses ressemblant à la politique.

Dans Bad Company, le héros principal n'est pas Hopkins mais un excellent acteur noir américain. Comme je préfère toujours la version originale, et comme elle était projetée au Forum des Halles, on était dans l'ambiance.

Dans Bad Company, on découvre que les Bons et les Méchants n'ont pas changé depuis le 11 septembre.

Les Bons sont toujours les Américains (normal), les Méchants sont toujours les Balkaniques plus ou moins acoquinés avec les Russes. On ne peut donc pas dire que l'islamisme terroriste aurait encore obsédé les scénaristes hollywoodiens. Les autres films de la même cuvée présentent d'autres dangers, par exemple les araignées géantes : aucun ne porte encore de turbans, aucun ne ressemble à Oussama Bin Laden.

Ou bien par conséquent le quotidien parisien Le Monde ment une fois de plus à ses lecteurs, et ce n'est pas nouveau. Ou bien la CIA, ou plus probablement un autre service, intervient à Hollywood et alors c'est beaucoup plus grave, cela implique que le danger islamo-terroriste n'est pas encore perçu outre-Atlantique pour ce qu'il est.

Bien entendu, le plus important dans cette affaire est de présenter un usage positif de l'armée et des services spéciaux de son propre pays. Aux États-Unis, après quelques évolutions, cela semble redevenu la règle. En Europe, et singulièrement en France, nous sommes très loin du compte. Notre budget de la défense, pour 400 millions d'Européens représente aujourd'hui à peine 40 % du budget des 280 millions d'Américains : 150 milliards de dollars en 2002 contre 380 milliards de dollars aux États-Unis pour la même année (1).

Mais le pire des désarmements c'est le désarmement moral et mental. Cela est d'autant plus grave que dans la production hollywoodienne, les méchants ressemblent comme des frères aux Européens.

On précisera que ces méchants-là sont aussi désignés pour tels par notre propre pensée unique et par le quotidien Le Monde.

JG Malliarakis
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(1) En 1998 les chiffres respectifs étaient de 150 milliards pour l'Europe des Quinze (inchangé) et 280 milliards pour les États-Unis (en hausse de 100 milliards de $ après le 11 septembre). Les dépenses américaines en recherche et développement à caractère stratégique sont de 50 milliards de $, celles des 15 pays européens, additionnés représentent de 10 milliards de dollars : le fossé ne cesse de s'accroître.

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