COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
MERCREDI 7 AOUT 2002
CRIMES D'EXTREME GAUCHE ET GESTICULATIONS PARISIENNES
Le "dernier" exploit de l'ETA : Vérité au-delà des Pyrénées, erreur en deçà ?
On éprouve quand même une certaine surprise en comparant les procédures respectives de dissolution des mouvements jugés subversifs en France et en Espagne puisque malencontreusement l'actualité nous en donne l'occasion.
En Espagne, ce dimanche 4 août était d'une violence ordinaire ont l'air de penser nos médiats puisque le terrorisme basque a mis encore à son tableau de chasse une petite fille de 7 ans et un homme de 57 ans. On ne compte que les morts. Les blessés ne se comptent plus. Ce 7 août encore on apprenait (1) que pour la première fois un prêtre catholique basque était menacé par l'ETA qui pourtant depuis plus de 30 ans est plus ou moins protégée par le clergé basque. Des centaines de morts : voilà le bilan de l'ETA. Et pourtant le gouvernement de Madrid ne dispose paslui-même, pouvoir exécutif, des moyens juridiques de dissoudre ce qu'on appelle la façade légale du mouvement : Herri Batessuna. Il faut une décision de justice.
Vérité au-delà des Pyrénées, erreur en deçà.
La fameuse loi de 1901 permet au Conseil des Ministres de cette république jacobine qui se veut gestionnaire et représentative du pays de la liberté et de la patrie des Droits de l'Homme (2), de dissoudre sous n'importe quel prétexte une association qu'elle juge subversive.
En l'espèce, ce 6 août, ce ne sont ni les groupes les plus meurtriers du séparatisme corse, ou du gauchisme breton (3), ni les sympathisants français de l'ETA basque, ni ceux du GRAPO madrilène, ni ceux du 17-Novembre grec ou des Brigades Rouges italiennes que le Conseil des Ministres parisiens a frappés.
Tous ces gens pourront, longtemps encore, considérer impunément la France comme comme la base arrière naturelle de leurs activités révolutionnaires les plus sanglantes.
C'est normal : ils relèvent de l'extrême gauche.
Tous leurs crimes sont excusés avant même d'avoir été commis, absous avant même d'avoir été confessés.
En revanche, les gros méchants réputés "d'extrême droite", dont le tableau de chasse, simplement accidentel ou éventuellement manipulé ne représente même pas le 1/100ème de celui de leurs concurrents, ceux-là peuvent être interdits par décret.
Le geste d'un fou, geste affreux sans doute, révoltant dans son principe (3) mais demeuré (heureusement) virtuel, geste parfaitement isolé, va frapper une association de 60 personnes à laquelle il n'appartenait pas.
C'est en effet dans le contexte de ce geste que les pouvoirs publics ont décidé, contre l'avis même des services de police, de procéder à leur tour à une gesticulation symbolique gouvernementale avant de prendre des vacances bien méritées, après 3 mois de travail.
Cette gesticulation symbolique prétend se fonder sur l'article 6 d'un texte remontant au 10 janvier 1936 à l'encontre des " groupes de combat et milices privées ". Aucun élément matériel caractérisant les groupes de combat n'est pourtant évoqué : pas d'uniforme, pas d'armes, pas de structure de commandement ou de mobilisation para-militaire.
En fait cette répression vise une nébuleuse idéologique, certainement inqualifiable puisqu'elle tombe sous le coup d'une autre loi, la loi dite Pleven adoptée en 1972 (4). Cette loi s'inscrit dans une longue série de textes français, tous installés dans le Droit pénal de manière oblique, depuis le décret-loi Marchandeau jusqu'à la loi Gayssot.
Il faut cependant noter que c'est la première fois que l'on dissout une association par décret sur la base d'une loi qui lutte certes contre la discrimination mais qui, jusqu'à présent, n'a jamais servi qu'à des poursuites judiciaires contre des personnes et non à des actes administratifs contre des groupements.
C'est aussi une idée très dangereuse, et dangereusement novatrice, que d'interdire un site internet plutôt que d'en poursuivre au cas par cas les délits éventuels, comme c'est le cas en matière de presse.
Tous en protégeant manifestement les terroristes assassins, les gesticulations symboliques parisiennes visent donc à instaurer un monopole d'Etat de la discrimination. Complétant sans doute la redistribution financière sociale démocrate à laquelle on cherche à conférer un supplément dâme, elles tendent probablement à établir en France un principe de préférence étrangère qui n'existe, cela est vrai, dans aucun autre pays au monde.
C'est peut-être la version française de ce qu'on appelle ailleurs la discrimination positive (5).
Nulle part ailleurs, c'est vrai, on ne marche aussi généreusement sur la tête. Mais on y marche en bombant le torse..
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(1) cf. Radio france internationale 7.8.2002.
(2) C'est en soi un concept assez contradictoire que cette patrie de droits qui se veulenet universels. Certains pensent également que c'est un programme un peu dérisoire, un peu gnangan. En réalité c'est, d'abord, une imposture.
(3) Précision importante : jusqu'à l'attentat 19 avril 2000, contre le McDonald's de Quévert, attentat qui a coûté la vie à une jeune employée de l'établissement, attentat d'extrême gauche insdpiré par les émules bretons de M. Bové, le mouvement identitaire breton n'a jamais versé le sang.
(3) Outre l'horreur de tout crime inspiré par la passion politique, assassiner le chef de l'État c'est évidemment porter atteinte à l'unité et à l'identité de la nation. La mémoire collective a Ravaillac en horreur.
(4) À l'unanimité encore que dans des conditions étranges puisqu'on ignore qui a voté.
(5) Aux États-Unis la discrimination positive avait été inventée en faveur d'une minorité américaine défavorisée, principalement les Noirs américains, dont la présence est aussi ancienne que celle des WASP (blancs, anglo-saxons et protestants). Elle n'a jamais été favorable aux Etrangers, dans un pays où l'immigration clandestine est tout simplement considérée comme un délit.
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