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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

JEUDI 29 AOÛT 2002

LES DÉBATS SUR LA FISCALITÉ OU LA CROISSANCE NE SONT PAS SEULEMENT TECHNIQUES

Sous un masque technique ils impliquent, en fait, des choix éminemment politiques.

Il est assez clair depuis quelques semaines qu'un vrai débat partage les tenants de l'actuelle majorité réputée présidentielle. Ce débat, qui s'investit au bout du compte sur la fiscalité, va bien au-delà des nuances partisanes officielles. On peut même convenir qu'une partie des socialistes et des hommes politiques de la petite gauche se trouve partagée par les mêmes lignes de clivage.

Pour le situer schématiquement (1) on retiendra deux positions :

Première idée : on utilise les fruits de la croissance pour faire évoluer la répartition. Une croissance élevée permet ainsi de gommer en douceur, sans douleur, telle ou telle difficulté. Jusqu'ici cette méthode a surtout servi à ce que le défunt Edgar Faure appelait joliment "le socialisme des acquêts". Or, ce socialisme des acquêts s'est traduit par l'addition hétéroclite d'un amoncellement de faux droits. Ceci absorbe en France quelque 55 % de la richesse nationale évanouie chaque année en dépenses publiques. On rappelle à ce sujet que la fourchette de 45-46 % évaluant, aux caprices de Bercy, les prélèvements obligatoires, ne tient pas compte des dépenses couvertes par le déficit et par l'emprunt. Or, cet oubli volontaire n'est pas innocent puisque l'emprunt public fait concurrence à l'investissement privé, asséchant en pure perte les capacités de développement du pays.

Au total ce socialisme des acquêts ne corrige rien. Au contraire, il parasite la croissance au profit d'une redistribution démagogique, au profit des groupes de pression les plus actifs, souvent même en faveur des couches objectivement les plus privilégiées du simple fait de leurs acquis sociaux antérieurs.

La seconde optique, et c'est évidemment le point de vue de tout partisan honnête des libertés sociales, consiste à partir au contraire de l'idée très simple selon laquelle le développement repose sur l'initiative des individus.

Il est donc urgent, pour un pays comme la France où cette initiative est entravée comptablement par la masse des prélèvements, juridiquement par l'excès des réglementations, psychologiquement et socialement par l'arrogance des technocrates et l'idéologie dominante des médiats, d'en libérer les Français.

Le débat technique sur la prévision du taux de croissance aboutit donc à un débat plus profond sur les causes du développement et sur la nécessité des réformes.

Quand M. Méhaignerie met en cause la prévision évidemment exagérée d'une croissance de 3 % c'est, de son point de vue, pour empêcher que l'on baisse la fiscalité et c'est même probablement pour que l'État prélève une livre de chair supplémentaire destinée à combler les déficits.

Laissons donc M. Méhaignerie et ses semblables à leur écœurant métier et posons le problème autrement.

L'ensemble de l'Europe, – la Grande Bretagne comme l'Eurozone, – est actuellement en train de revoir les prévisions trop optimistes de croissance du produit intérieur.

L'Europe, et pas seulement la France, se trouve confrontée à une difficulté de conjoncture.

L'Allemagne va payer au prix fort des intempéries qui frappent particulièrement des régions issues de l'ex-RDA, la Saxe ou la Thuringe (2). M. Schroeder a-t-il donc raison de se proposer de repousser sa réforme fiscale d'un an pour " financer les indemnisations " ? Nous n'en sommes même pas convaincus du point de vue économique. La seule justification de sa décision se fonde sur la politique et la psychologie propre à la sociale démocratie.

Mais aujourd'hui en France, (3) aucun argument de solidarité ou de politique sociale démocrate, ne peut être retenu pour différer une réforme aussi évidemment nécessaire que la baisse des impôts.

Reste évidemment encore le débat maquillé entre baisse des impôts sur le revenu et baisse des charges sociales.

Là aussi, derrière la façade technique, derrière l'effort qualifié de prioritaire en faveur des couches dites défavorisées, derrière la prétendue priorité à l'emploi, nous avons maintes fois souligné qu'il se dissimule surtout la préférence pour la voie la plus facile, la démarche la plus opaque et finalement l'opération la plus coûteuse à terme pour les deniers publics et pour le développement général du pays.

Ne nous cachons pas que ces débats, dont l'importance ne peut échapper à personne, sont des débats qui touchent sans doute à la question des sources de la prospérité et du progrès, mais qui justifient au fond, même en économie, le vieil adage (4) du "politique d'abord."

On peut même soutenir, au-delà des clivages partisans conventionnels, qu'ils redonnent aux choix politiques leurs lettres de noblesse. Ils en avaient bien besoin…

JG Malliarakis

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(1) Ceci sans même tenir compte de la question "faut-il tenir les promesses électorales".

(2) Régions qu'il est abusif d'appeler "nouveaux" Länder puisqu'il s'agit de vieilles terres européennes auxquelles sont associés les noms de Goethe et de Nietzsche, de Bach ou de Luther.

(3) Où l'État a si mal indemnisé ou secouru les victimes de la tempête et de la marée noire de 1999, sous le gouvernement des socialistes, des écolos et des communistes.

(4) bien compris !

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