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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

LUNDI 9 SEPTEMBRE 2002

LA CAUSE DE LA LIBERTÉ DES FAMILLES : UN EXEMPLE ÉCLATANT

Même après 5 ans de gouvernement Jospin, la droite réglemente et conserve, elle ne libère pas.

Ce 4 septembre  (1) le philosophe libéral Philippe Nemo analysait l'inventaire, effectivement stupéfiant, des mesures prises depuis 1997 par le funeste gouvernement de M. Jospin à l'encontre de la Famille française. L'intervenant rappelait ainsi en vrac : les facultés nouvelles données au divorce, le consentement mutuel pouvant désormais résulter du seul consentement d'un des deux époux, en même temps que l'institution si controversée du Pacs ; l'égalisation de la situation successorale des enfants naturels en même temps que la systématique promotion du couple homosexuel ; les atteintes nouvelles à l'autorité parentale compensées par la licence nouvelle conférée aux infirmières scolaires de délivrer la pilule du lendemain ; l'obligation du financement d'un logement extérieur au profit d'enfants majeurs au moment où même le droit du nom patronymique explose en lambeaux, etc.

Point important : toutes les résistances ont été occultées ou marginalisées, réputées contre-productives. Les noms et les images de Mme Christine Boutin ou de Philippe de Villiers sont ridiculisés, piétinés. Et, pour l'essentiel, à l'exception du Pacs, ces réformes sont passées comme une lettre à la poste.

Or, de toute évidence, le retour au pouvoir d'une majorité de 400 élus, portés par le refus du socialisme dans l'opinion, ne doit pas faire illusion : la remise en cause de ces acquis du socialisme n'est pas à l'ordre du jour.

Pour une certaine gauche, ce processus est tout à fait naturel. En détruisant la famille nucléaire, on fait glisser la société sur une pente qui conduit, apparemment, dans un premier temps, à un monde d'électrons libres, mais, très vite, en fait, vers un plus grand asservissement à l'État. L'électron libre est ainsi mûr pour la socialisation étatique.

Philippe Nemo parle ainsi plaisamment des "fêtes de Jack Lang". Mais la chose va bien évidemment très au-delà des "fêtes", puisque l'État prend en main, non seulement toute la solitude des individus, mais tous les aspects du développement des personnes, de la crèche au tombeau.

En regard des réformes mises en place par ses adversaires, la droite se caractérise par une attitude essentiellement conservatrice. Historien des Idées  (2), notre univesritaire attribue, en partie légitimement, cette manière d'agir de la droite politique à son attachement philosophique excessif à toutes les communautés sociales instituées.

Et de citer Bonald, Hegel, La Tour du Pin. C'est, intellectuellement, incontestable. Cela éclaire, sans doute, cette sorte de traditionalisme en carton-pâte dans lequel s'embourbent les gens de droite. Mais nous trouvons aussi qu'en allant trop loin dans cette analyse on ferait peut-être beaucoup d'honneur à la droite politique française actuelle ! Comme il serait beau qu'elle ait seulement, sinon une base doctrinale, au moins des principes !

En 1995-1997 le gouvernement Juppé ne se réclamait ni de Bonald, ni de Hegel, ni de La Tour du Pin. Mais il avait très consciencieusement entrepris de manipuler la Conférence des Familles pour l'aligner sur ses orientations technocratiques et anti-familiales ; et ceci a frayé la voie et a permis d'aboutir au dernier revirement, qui fut imposé par le gouvernement Jospin, à l'encontre de la politique famille française telle qu'elle avait été instituée en 1945 (3) : un demi-siècle plus tard, on ne prétend plus soutenir "la famille", et le socialisme étatique subventionne en vrac "toutes les familles" et particulièrement celles qui n'en sont pas. Et la famille polygame sera la dernière à bénéficier pleinement des allocations familiales...

La droite réglemente et conserve, elle ne libère pas. Le conservatisme de la droite l'amène à ne jamais remettre vraiment en cause les fondements socialistes étatiques de la législation antérieure. Au contraire, elle leur donnera une application sans doute plus rationnelle, peut-être plus rigoureuse, certainement plus autoritaire. Contrairement à ce qu'une lecture trop intellectuelle du phénomène suggérerait, ce n'est pas seulement une question d'inspiration philosophique. C'est aussi une caractéristique sociologique. La gauche rêve et dilapide, la droite gère et digère.

Un autre piège, pas assez clairement dénoncé, consiste à enfermer la famille dans une stricte perspective nataliste. C'est un discours que l'on a pu repérer dans les théories d'un Michel Debré ou d'un Alfred Sauvy. Le danger évident des propositions auxquelles aboutit ce natalisme, ce "populationnisme", c'est que, distribuant un salaire maternel d'État, il ramène la maternité au statut de la fonction publique d'État. La conséquence en est qu'évidemment, on encourage ainsi une natalité de subvention. Et la plus efficace, de ce point de vue "quantitaif" demeure encore la natalité polygamique.

Bien différente doit être, au contraire, la vision d'une lutte pour la famille associée à une lutte pour la Liberté.

Non seulement en effet la famille nucléaire peut être considérée comme cellule fondamentale de la société, mais elle apparaît aussi comme le lieu privilégié d'apprentissage de la responsabilité et d'épanouissement de la personnalité. Autrement dit, la famille est une institution essentielle du point de vue de la Liberté.

Cet aspect, rarement mis en lumière, s'écarte à l'évidence de toutes les caricatures d'attachement, en vrac, à tous les héritages du passé, affirmés comme autant de "traditions", à toutes les communautés instituées confondues faussement avec la société civile. La famille n'est pas le relais de l'État : elle est le cercle le plus fort du développement de la vie privée. Elle apparaît donc comme le premier rempart contre l'étatisme.

On ne doit donc pas s'étonner si l'étatisme, par tous les moyens dont il dispose, usant de leviers fiscaux, éducatifs, judiciaires, audiovisuels, philosophiques ou culturels, n'hésite jamais à tout entreprendre, ouvertement ou insidieusement, pour détruire et asservir la famille.

On s'étonnerait en revanche que les défenseurs des Libertés n'aient pas à cœur d'en assurer, prioritairement et courageusement, le développement, la promotion et la libération.

JG Malliarakis
(1) Dans sa communication à l'Université d'Été des Nouveaux Économistes à Aix en Provence le 4 septembre 2002.

(2) Ph. Nemo est l'auteur, notamment, de "La Société de Droit selon Hayek", mais aussi d'une "Histoire des idées politiques depuis l'Antiquité"  (PUF).

(3) Elle avait reçu sa première impulsion en 1938 sous le gouvernement du radical Daladier. Elle fut refondée, après la guerre, en France sous l'influence du général De Gaulle et des démocrates chrétiens du MRP.

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