COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
MARDI 15 OCTOBRE 2002
POURSUIVONS NOS CONSIDÉRATIONS BOURSIÈRES INTEMPESTIVES
Et remarquons quau sortir des crises il ny a pas que des malheureux.
Lune des conséquences les plus manifestes de lhorrible carnage terroriste de Bali aura été de perturber la remontée des marchés financiers. Immédiatement, les requins peureux du système ont pensé en termes de cours du baril de pétrole, passant de 28 à 30 dollars pour 180 morts et 300 blessés.
Mais, étrangement aussi les valeurs en actions semblent ne plus vouloir baisser aussi rapidement. Après avoir regagné 200 points en une semaine entre le 7 et le 11 octobre, la CAC 40 na enregistré le 14, quune halte de 20 points.
Pourquoi donc ne pas poursuivre nos considérations intempestives sur les marchés financiers (1) ?
Pourquoi ne pas réaffirmer notre conviction que le système capitaliste survivra, quels que soient les aléas politiques.
Contrairement à une idée que lon cherche à répandre, leuphorie du système capitaliste ne date pas de la chute du communisme en 1990 (2). Elle na pas suivi immédiatement non plus les accords entre Américains et Chinois de 1971 puisque 1971 fut aussi lannée du décrochage du gold exchange standard.
En prolongeant lobservation des séries, on découvre que la croissance de la Bourse est un phénomène séculaire assez régulier sur des périodes de 10 ou 15 ans et qui a seulement connu des replis momentanés.
Au pire creux de la crise de 1929, cest-à-dire en 1932 (3) lindice Standard and Poor's des 500 principales valeurs industrielles américaines sétait divisé par 4,5.
Dès 1936 il sétait à nouveau remultiplié par 4,5 !
Enfonçons donc encore le clou de la Conspiration de la Bourse et de lHistoire.
Au sortir des crises non seulement il ny a pas que des malheureux, mais il y a des gens qui se retrouvent singulièrement renforcés.
Tout dabord examinons le cas de ceux qui ne se sont livrés à aucune vente ou achat, cas des "rentiers", cas A, ceux qui navaient ni vendu ni acheté entre 1929 et 1936 la croissance du capital aurait seulement connu une stagnation de 7 ans, après avoir grimpé probablement 2 fois plus (trop) vite dans la période antérieure.
À linverse pour le cas C, celui que nous appellerons par dérision, par caricature, le "conspirateur", celui qui aurait tout vendu le 28 octobre 1929 cas extrême, arithmétiquement parfait puis tout racheté le 2 juin 1932. À la fin du cycle de récupération son capital se serait multiplié par 20. Cette merveilleuse opération ne fut évidemment réalisée par personne, tout simplement parce quaucun initié ne savait exactement quand commencerait le krach ni quel serait le point bas.
En revanche le cas D existe : cest celui de gens qui pendant de telles crises multiplient par 3, par 5 peut-être 10 leur capital, intervenant peu de temps avant ou après le commencement de la chute (à la vente) et du point le plus bas (à l'achat).
Lerreur du conspirationnisme caricatural serait sans doute de confondre C et D.
Lerreur danalyse du conspirationniste est aussi de se situer lui-même dans la ligne du "boursicoteur" B : B, cest celui qui prolonge des courbes observées sur les 4 ou 5 années précédant une crise, celui qui croit au modèle naïf "ce que lon a vu récemment se reproduira constamment", celui qui emprunte pour acheter en Bourse et de nombreux ménages lont fait en 2000 mais aussi le "génial énarque" français, M. Jean-Marie Messier, et dune certaine manière aussi M. Bon. B cest celui qui est obligé de vendre à la baisse, cest celui qui sy est obligé lui-même, le boursicoteur B nest pas la victime dun hypothétique conspirateur C : il est sa propre victime.
Les difficultés mondiales du marché des actions suscitent donc, de par le monde, des commentaires aussi éphémères quils sont innombrables. Avec les changements climatiques, ils permettent à ceux qui ne savent rien les commentaires les plus péremptoires.
Il est certain que des spéculateurs qui auraient commencé dacheter en Bourse au printemps 2000, époque particulièrement euphorique, non seulement auraient perdu beaucoup dargent mais se trouveraient même expulsés du marché sous une forme ou sous une autre. Les gens qui auraient alors confondu capitalisme et casino seraient sans doute déjà retournés vers des placements plus sûrs.
La voie reste alors libre, sur un marché assaini, pour le développement des survivants.
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(1) cf. Notre courrier du 7 octobre La Conspiration, la Bourse et lHistoire.
(2) Ni la chute du mur de Berlin en 1989, ni lautodissolution dans la vodka de lUnion Soviétique en 1991 nont été significatives de la Fin de lHistoire, nen déplaise aux adeptes de M. Fukuyama.
(3) Entre le 29 octobre 1929 et le 1er juin 1932.
(4) À cet égard la roulette, par exemple, où sapplique le théorème probabiliste de la ruine des joueurs au taux despérance mathématique de perte de 1/37e à chaque mise numérique simple est beaucoup moins périlleuse que le marché financier conçu comme un jeu de casino.
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