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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 25 OCTOBRE 2002

LE MODELE MALTHUSIEN FRANÇAIS N’EN FINIT PAS DE MOURIR

Les subventions agricoles ont contribué à diviser par 10 le nombre des paysans français.

On doit évidemment se féliciter qu’un accord franco-allemand ce 24 octobre ait permis d’écarter une crise, dont certains se frottaient déjà les mains, à propos de ce qu’on appelle le financement de l’élargissement de l’Union européenne. Or, le coût global de cette immense opération géopolitique, ramenant en Europe 10 nouveaux pays peuplés de 75 millions d’Européens, se chiffre à peine à 14 milliards d’euros par an entre 2004 et 2006 (1).

On doit cependant rappeler que la pomme de discorde demeure toujours la question des subventions agricoles auxquelles les dirigeants français s’accrochent depuis 40 ans. Ces subventions représentent historiquement la moitié du Budget de l’Union. Et, contrairement à une idée très répandue en France, elles n’ont pas sauvé l’agriculture de notre pays. Elles ont contribué à diviser par 10 en un demi-siècle le nombre des paysans français, au point que, désormais, notre pays compte moins d’exploitants au km2 que la Grande Bretagne. Il se trouve simplement que la FNSEA, soit une centaine de personnes par département, exerce une véritable tyrannie politique. Celle-ci peut se comparer aux pires coalitions de fonctionnaires. Elle s’impose réseaux de pouvoirs, y compris à l’Élysée dont locataire fut pendant des années une sorte d’ambassadeur de la FNSEA corrézienne à Paris.

Cela pose, plus largement bien sûr, le problème de notre modèle social français dont la FNSEA n’est pas le seul champion. Dans d’autres bastions, nous voyons les troupes respectives de Force ouvrière, celles du Syndicat National Unifié des Impôts, celles de la FSU Fédération Syndicale Unitaire communiste de l’Éducation nationale et, par-dessus tout, l’appareil de la CGT. Ces forces tirent leur représentativité factice de l’anémie syndicale exceptionnelle de notre pays. Ce sont elles qui bloquent toutes les réformes de Liberté.

Dans son remarquable petit livre consacré au "Modèle Français depuis 1945" (2), Pascal Gauchon (3) conclut précisément en montrant combien depuis 1983 le modèle français a démontré qu’il était incompatible avec l’Europe.

Dès 1919 le rapport Clémentel soulignait les retards qui s’accumulaient en France du fait de l’étroitesse conservatrice et protectionniste dont le tarif Méline de 1891 a probablement marqué le grand tournant. Ce rapport qui n’a pas été suivi d’effets véritables correspond pourtant à l’époque où la France victorieuse sur les champs de bataille semblait la plus grande puissance militaire du monde.

En 1958, le rapport Rueff eut plus de succès, en particulier grâce à la présence au ministère des Finances d’Antoine Pinay conforté par la force de la Cinquième République naissante. D’importantes décisions réformatrices furent prises alors, permettant à l’industrie, à la production agroalimentaire comme à la grande distribution française d’entrer de plein pied dans l’ère européenne.

Il faut certes constater que les tendances malthusiennes, près d’un demi-siècle plus tard ont repris le dessus. En particulier dès les années 1960 le fiscalisme a repris un dangereux essor. Les prélèvements obligatoires sont passant de 35 % en 1960 à 39 % en 1970. La tendance n’a pas cessé d’empirer, plus de 50 % du produit national étant aujourd’hui gaspillé en dépenses publiques.

Un nouvel élan réformateur s’impose donc désormais.

Cet élan passe obligatoirement par un contexte politique. Si les années 1920 ne l’ont pas permis, si notamment l’on n’a jamais tenu compte des remarquables avertissements de Clemenceau, lorsqu’il fit ratifier le traité de Versailles, ceci pour ne rien dire des conséquences politiques annoncées par Bainville c’est bien pour des raisons structurelles.

Ces raisons structurelles tiennent à ce que Beau de Loménie décrivait entre 1943 à 1974 dans ses irremplaçables volumes des Responsabilités des Dynasties Bourgeoises (4). Il semblerait que malgré l’estime que les gens intelligents de tant de milieux lui portent, malgré le respect que la France officielle feint de porter à Clemenceau, ce pays ait encore beaucoup à faire pour observer leurs enseignements.

Le modèle malthusien français n’en finit pas de mourir. Nous ne devrions pas retarder son agonie.

Pis encore, le gouvernement Raffarin, où un homme comme Fillon gère le terrain social pour contrebalancer l’action policière de son compère et néanmoins rival Sarkozy, vient de faire quelques reculades majeures notamment sur le terrain des retraités.

Ce dossier commence à remuer les milieux des plus englués dans la gestion paritaire, comme ceux de la CGC et de la CFDT. La présidente de la Caisse Nationale d’assurance vieillesse, qui coiffe le régime général du privé a même protesté. Mais le pouvoir politique préfère ménager les syndicats d’EDF ou de fonctionnaires, croyant pouvoir de la sorte gérer sans heurts les ouvertures à la libre concurrence et au capital privé. Ce raisonnement est à très courte vue car les investisseurs et les lois du marché remettront nécessairement en cause ces pesanteurs qui plombent la Poste comme Air France, la SNCF ou Gaz de France.

JG Malliarakis

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(1) Ce chiffre est dérisoire si on le compare à notre chère sécurité sociale française qui prévoit pour 2003, par exemple, un déficit de 7 milliards d’euros pour la seule assurance maladie du régime général.

(2) Que Sais-Je n° 3649

(3) cf. Émission du 25 octobre sur Radio Courtoisie

(4) Les 5 volumes sont disponibles à Duquesne Diffusion, 27 avenue Duquesne 75007 Paris Tel 01 45 55 87 55 "et dans toutes les bonnes librairies"

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