COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
LUNDI 4 NOVEMBRE 2002
LE CAPITALISME EST UN MEILLEUR REFORMATEUR QUE LETATISME
On peut faire confiance aux hommes de lÉtat pour nous mentir et nous spolier
Rédigeant depuis 20 ans des chroniques quotidiennes, et tenant depuis 10 ans ce courrier économique et social non moins quotidien, je garde toujours en mémoire ce conseil de Léon Daudet à de jeunes journalistes : "Ne faites jamais de pronostics". Médecin de formation lui-même, sétant écarté de cette vocation pour une raison morale quil décrit dans "Devant la douleur" son propos sattachait plutôt au diagnostic et à une technique que jaime à baptiser la rigolothérapie.
Sans pouvoir dire à lavance tout ce qui va se passer, il demeure néanmoins possible dobserver ce qui est en train de se produire et de comparer par exemple deux types de réformes :
Or, tout à fait à juste titre "Les Échos" soulignent, en première page, ce quils appellent le "coup denvoi de la Réforme pour la finance mondiale".
Bien entendu ce titre est un spectaculaire. Et il semble faire bon marché des efforts de MM. Harvey Pitt, président de la SEC (Security & Exchange Commission) et Eliott Spitzer, attorney général de New York, bien résolus à réformer sérieusement lanalyse financière nord américaine. À la suite de lavalanche des scandales dont les plus médiatisés ont été Enron et World-Com, les autorités publiques des États-Unis ont entrepris un nettoyage qui devrait porter rapidement ses fruits et rétablir la confiance.
De ce point de vue lÉtat capitaliste américain, malgré les erreurs considérables que le gouvernement Bush a commises dans le sens du protectionnisme, du déficit néo-keynésien, etc. se retrouve quand même plus efficace que la technocratie française. Depuis des décennies que le Budget de lÉtat et les comptes sociaux sont en France critiqués par la magistrature financière on remarquera que les réformes ne sont pas intervenues, que les mensonges sur les comptes publics demeurent pratiquement ignorés de lopinion et que les sanctions démocratiques sont infimes, plus douces pour les crapules que les sanctions imposées par les marchés.
Car le point important est de comprendre que dans lÉtat capitaliste la part la plus moralisatrice, la plus honnête et la plus réformatrice ne vient pas de lÉtat mais du capitalisme.
Cest à ce titre que Citigroup, première banque du monde, a tout simplement décidé de précéder la réforme en créant une filiale spécialisée dans la réforme financière "Smith Barney" qui rétablira la fiabilité de ses analyses et les séparant de lactivité de banque dinvestissement. Le pivot de cette initiative sera Mme Sallie Krawcheck. Cette femme de 37 ans, à la tête de la société de Bourse Sandford Bernstein sest "taillé une immense réputation, dobjectivité et déquité" (2) qui voit en elle "la dernière analyste honnête du marché".
Si on regarde dans le détail les scandales qui ont ébranlé la confiance des marchés dans les résultats annoncés par les entreprises on constate dailleurs que les deux réalités les plus scandaleuses :
sont les uns comme les autres une résultante du fiscalisme et le produit de la réglementation étatique aux États-Unis comme en Europe
Si la part de réforme et de morale ne tient pas aux hommes de lÉtat, on peut en revanche leur faire confiance sur le mensonge, labsence de réforme et la spoliation.
Est-ce une consolation ?
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(1) édition du 31 octobre.
(2) selon le magazine Fortune octobre2002
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