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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

JEUDI 14 NOVEMBRE 2002

LA DEGRINGOLADE DE LA FRANCE

... impose la liquidation des vieux monopoles et de l’assistanat qui l'écrasent et qui s'écroulent.

Il faut assurément s’attendre à un déploiement systématique de l’agitation planifiée des bureaucraties syndicales. Toute leur énergie, toutes leurs forces sont mobilisées en vue du scrutin décisif pour elles du 11 décembre désignant les 7 000 conseillers prud’homaux. Et dans cette perspective les quelques intentions réformistes du gouvernement Raffarin risquent fort de patiner pendant quelques semaines.

Mais si nos grands stratèges réformateurs daignaient solliciter notre avis nous leur dirions non seulement de tenir bon, mais probablement même de s’apprêter à des réformes beaucoup plus résolues que celles dont on entrevoit le vague pointillisme, par exemple sur les 35 heures.

Osons dire ce que personne n’évoque : la réforme de l’assurance maladie est probablement une urgence à inscrire en tête des priorités, à égalité d’ailleurs avec la libération de l’épargne vieillesse.

Nous évoquerons brièvement ici le débat relatif au Droit communautaire qui tendait clairement à promouvoir au début des années 1990 la libre circulation des services assuranciels et notamment de deux services appelés, l’un assurance-maladie, l’autre assurance-vie à capital variable ce qu’on appelle généralement retraite par capitalisation. Très logiquement aussi, et comme la double assurance d’un risque unique est source de fraude, deux directives européennes du Conseil (1), c’est-à-dire signées par les États y compris la France dont le gouvernement était alors socialiste, arrêtèrent en 1992, comme conséquence de la libre circulation et de la libre concurrence la suppression explicite de tout monopole "au plus tard le 1er juillet 1994." Ceci implique(rait) logiquement le libre choix de l’affiliation.

Dans la pratique ces excellentes dispositions n’ont pas prévalu, dans notre pays, pour de multiples raisons, essentiellement franco-françaises (2). Celles-ci ne sont venues ni des organismes de sécurité sociale, ni des bureaucraties syndicales, mais avant tout des mutuelles, incapables de s'adapter au marché de l'assurance, qui ne voulaient pas être déboulonnées de leurs niches commerciales affairistes, non seulement au titre de l’assurance maladie complémentaire mais aussi des remises de gestion et même désormais de la prétendue "couverture maladie universelle", instituée sous prétexte de soigner 600 000 indigents et qui a abouti à viser 6 000 000 d’assistés.

On a donc entrepris de diaboliser, de diviser, de réprimer, d’isoler et d’occulter les partisans de la libre assurance.

Et on s’est employé à stériliser le discours des quelques hommes politiques qui avaient eu l’audace de se rallier à cette idée, provisoirement proscrite.

Une observation tant soit peu objective de la réalité de l’évolution du système depuis le plan Juppé de 1995-1996 montre cependant que le système monopoliste est, à l’évidence, voué à l’explosion et que son coût sera de plus en plus intenable pour l’économie française. Si désormais notre pays est au 30 rang mondial de la compétitivité, il n’est pas possible de continuer à le pénaliser (3).

Quelles sont alors les pistes d’une réforme d’ensemble de l’assurance maladie ? Elles sont nombreuses.

Citons :

Tout d’abord c’est très maladroitement que M. Jacques Barrot, signataire des ordonnances liberticides de 1996-1997, aujourd’hui président du groupe UMP à l’Assemblée nationale a cru pouvoir séparer le "gros risque" du "petit risque" (4). Cette idée rustique repose sur l’analogie avec l’assurance automobile et son concept de franchise. Elle ne serait pas absurde, dès lors que librement l’assuré choisirait cette option, dans le cadre d’un véritable contrat. Chacun, ou plutôt 97 % des Français ont parfaitement les moyens d’autofinancer une visite régulière chez leur généraliste et il existe également une médecine du Travail qui y pourvoit. Cependant l’idée de dérembourser cette visite provoque un tollé chez les représentants supposés des généralistes qui se verraient ainsi privés de ce qu’ils considèrent comme la solvabilisation de leurs patients. L’avarice des Français serait alors de nature à provoquer de graves dégâts de santé publique, la "petite visite" ayant certainement un effet préventif des "gros risque" (5)…

La réforme de l’assurance maladie ne doit reposer ni sur la réglementation politique ni sur le malthusianisme corporatif, mais sur le développement de l’offre d’assurance. Et de ce point de vue, puisque les compagnies françaises rechignent à assurer les Français, et, conformément, aux accords communautaires et internationaux, ouvrons ce marché aux prestataires européens mais aussi suisses, japonais, nord-américains, etc.

Seule la diversification de l’offre permettra d’adapter le produit d’assurance maladie aux besoins de nos compatriotes et aux évolutions de la médecine.

La solidarité nationale consiste à soigner les indigents, pas à subventionner des assureurs.

La loi future de décentralisation annoncée par le gouvernement Raffarin prévoit un droit à l’expérimentation : il serait nécessaire que l’expérimentation soit possible dans le domaine de l’assurance maladie dans la mesure où, très clairement, les problèmes de santé et les pathologies ne sont pas uniformes selon les régions.

Depuis que l’on a créé un ministère de la Santé en France, il est remarquable que celui-ci n’ait jamais disposé non plus de vrais moyens, la sécurité sociale étant supposée répondre à ses préoccupations.

Or, le principe fondamental de l’assurance maladie est de couvrir le risque financier de l’acte médical non de lutter contre les pathologies. On doit donc revenir à cette évidence que les patients cherchent à retrouver la santé indépendamment du remboursement des actes.

Le gros risque financier est désormais paradoxalement l’hôpital, de ce qu'on appelle encore l’assistance publique. Or, si l’hôpital public coûte de plus en plus cher, il soigne dans des conditions de plus en plus aléatoires ; le nombre des maladies nosocomiales tue plus que la violence routière ; le découragement gagne tous les métiers.

Enfin l’industrie du médicament doit cesser d’être désignée, pénalisée et abandonnée, faute de marges d’autofinancement de la recherche, à la concurrence étrangère.

Ces pistes, et d'autres encore, existent. Il faut les explorer.

JG Malliarakis

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(1) Directives 92-49 et 92-96.

(2) Et ceci nonobstant la supériorité du Droit européen, — aussi bien des traités que du droit dérivé, — sur le Droit interne, principe désormais très fort, résultant aussi bien du traité de Rome signé en 1957, que de l’article 55 de la Constitution française de 1958 et, enfin, de l’arrêt Costa de 1964.

(3) On ruine de la sorte les facultés réelles de la solidarité nationale en abusant d’une solidarité obligatoire et mal conçue.

(4) cf. Quotidien du Médecin 4 novembre

(5) Bien entendu les divers syndicats médicaux ont surenchéri scientifiquement cf. Quotidien du Médecin

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