COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
MARDI 19 NOVEMBRE 2002
IL EST BIEN DIFFICILE DE CROIRE A LUMP
Cette Union pour la Majorité Présidentielle transformée nominalement en Union pour un Mouvement Populaire
Javoue avoir beaucoup de mal à croire en la volonté de réforme du parti unique de droite, léphémère Union pour une Majorité Présidentielle rebaptisée Union pour le Mouvement Populaire.
Sans doute trouvait-on le sigle UMP dune beauté musicale, dune euphonie si parfaite quil fallait à tout prix en sauver lacronyme. Le sigle UMP avait été inventé en quatrième vitesse. Cétait au lendemain du "21 avril". On a feint daccorder à ce coup de tonnerre autant dimportance quau "11 septembre". Mais on a omis soigneusement den tirer vraiment les leçons.
Il est vrai que lexpression Majorité Présidentielle faisait désordre. Un chef dÉtat sortant, passant en 14 jours, de 19 % à 81 %, comptant dans sa majorité, non pas présidentielle mais pestilentielle, lintégralité des électeurs du parti communiste, de la ligue communiste révolutionnaire et autre prétendu parti des travailleurs, tous ceux qui huit jours plus tôt le traitaient descroc, cela vous interpelle au niveau du vécu.
Nimporte quelle déclinaison de "UMP" pouvait faire laffaire.
On a échappé à "Univers de Mickey et Pinocchio". Lapparence de sérieux y a gagné. Ladéquation au réel y a peut-être perdu.
Où est en effet ce "Mouvement populaire" ? Il flotte sans doute dans les rêves de certains de ses dirigeants. Mais il rode aussi dans les cauchemars de certains autres. Au moins, M. Balladur, en septembre (1), a-t-il eu le mérite de la franchise. Il a estimé que ce parti unique de droite accorde, dans ses statuts, trop de place aux militants. Il eût préféré un parti délus, ce qui lui aurait donné, avec les sénateurs, plus de 500 adhérents parlementaires. Cela aurait empêché dailleurs un petit comité central de verrouiller tout débat interne en prétendant agir au nom de la base.
On nous assure en effet que le modèle de ce parti unique ce serait le parti populaire espagnol de José Maria Aznar. Cela heurte sans doute moins les ressentiments bonapartistes. Cette tradition demeure toujours présente chez les anciens du RPR, de lUDR, de lUD-V° et de lUNR-UDT. On sy refuse à se réclamer daucune parenté avec la démocratie chrétienne allemande ou pire encore avec le parti conservateur britannique, ceci pour ne rien dire de Forza Italia.
Mais le parti populaire espagnol compte 630 000 adhérents. Le parti de M. Juppé na jusquici réussi, lui, à faire participer à lélection de son président que 46 000 personnes. Or, au départ, plus de 160 000 anciens adhérents étaient revendiqués par les 3 partis affluents de cette nouvelle Gironde, le défunt RPR, laile chiraquienne de lUDF et la cuisse de Démocratie Libérale. Et sur ces 46 000 participants officiels, moins de 20 000 sétaient déplacés au Bourget pour applaudir tous les chefs de la droite concélébrant lévénement.
Mais, admettons que lalchimie de la réussite politique vienne progressivement saluer cette première union depuis quelque 60 ans, peut-être même depuis la défaite du Bloc national en 1924.
Nous navons à ce sujet aucun conseil à donner ni à vendre à M. Juppé. On se bornera à considérer les 4 chantiers de réformes que le parti unique de droite, en la personne de son chef, sest assigné la tâche dimpulser et de mener à bien puisque, daprès M. Juppé, "lUnion doit voir au-delà du quinquennat en cours" encore que son président ne dispose lui-même que dun mandat de 2 ans et qui si, par malheur, les Européennes et les Régionales de 2004 ne le confortaient pas dans la position de force quil occupe aujourdhui au parlement, ses rivaux seraient bien inspirés de le débarquer définitivement avant quil commette de nouveaux et irréparables dégâts comparables à ceux de 1995-1997.
M. Juppé prétend en effet :
Tout cela est bien vague, bien conventionnel, bien politicien et, surtout, bien ambigu.
Est-ce même un programme de droite ?
Y retrouve-t-on les préoccupations essentielles des Français ?
Aucun économiste ne peut non plus sy retrouver. Libérer linitiative individuelle de la tutelle étatique ? Pas encore. Diminuer globalement les prélèvements obligatoires ? Pas encore. Alléger le tribut des Français ? Pas encore. Résoudre durgence la crise des régimes de retraites par répartition ? Rien à attendre de ce côté-là.
Que lUMP soit un panier de crabes, cest à la fois probable et classique. Larmée dAlexandre létait sans doute déjà. Mais tout lart dun chef politique est de contourner cette difficulté, vieille comme le monde. Elle est aujourdhui vraie à droite comme elle lest à gauche ou au centre. On sen dégage, comme le fit Louis XI : en détournant les écorcheurs et les grandes compagnies vers une lutte contre lennemi commun. Mais M. Juppé est un aussi mauvais rassembleur politique quil est un piètre économiste. Croit-il rassembler "Génération liberté" de Pierre Lellouche et les 15 % de voix qui se sont portées sur le souverainiste Dupont-Aignan avec lidée gauchiste de "développement durable" ou avec lexpression socialiste de nuance chrétienne de "partage" ?
Tout cela augure mal du parti unique de droite.
M. Raffarin a déclaré le 14 novembre quil voterait Juppé comme président de ce parti. Il navait guère le choix et, au moins de la sorte il a fourni un emploi au maire de Bordeaux. Il libère ainsi la voie pour dautres ambitions, il faut du moins lespérer pour la droite française et, surtout, pour la cause de la Liberté.
(1) "Si rien névolue, je ne voterai pas les statuts de lUMP" déclaraît-il dans un entretien donné au quotidien de la pensée unique Le Monde daté du 27 septembre
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