COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
LUNDI 9 DÉCEMBRE 2002
LA FSU EST EN RECUL
Mais elle demeure maîtresse du jeu et de la dialectique syndicale dans lÉducation "nationale".
Au lendemain du grand rassemblement organisé, en fait, par les communistes de la FSU, le 8 novembre pour affirmer la "priorité de lÉcole", il est inutile dentrer dans une polémique pour savoir si cette manifestation est ou nest pas un échec.
On peut sans doute considérer quavec 25 000 participants, on est presque dun chiffre dérisoire. Ce chiffre est à rapporter à celui de 1,3 million de fonctionnaires de lÉducation nationale dont moins de 900 000 enseignent effectivement. Dautre part, la FSU doit aussi être mesurée à laune de sa propre dialectique. La mode des manifestations les plus strictement corporatistes consiste en effet à prétendre aujourd'hui souvrir à tous les usagers des prétendus services publics. Ceci veut dire, par définition : tout le monde. Ici on sadresse aux élèves, aux anciens élèves, aux parents, peut-être même aux employeurs...
Mais même si on peut dire : cest raté, une chose demeure bien établie. Dabord, ce nest pas raté vis-à-vis des médiats du service public et de la pensée unique. Pour prendre un seul exemple, RFI, Radio France Internationale, dont la mission est de propager sur fond public limage de la France à lÉtranger donnait à 13 heures le 8 décembre exclusivement et fort longuement la parole à M. Daniel Aschieri, militant marxiste et secrétaire général de FSU. Cet homme était supposé parler au nom de tous les enseignants, alors quon sait fort bien (sauf peut-être la rédaction de RFI) que son point de vue, sur le collège unique ou sur la violence à lécole, est très éloigné de ce que pensent réellement les enseignants qui enseignent. On sait par exemple que les 2/3 dentre eux rejettent le collège unique, enjeu essentiel des projets dévolution de M. Luc Ferry.
Le 2e point sur lequel on constate que les marxistes (communistes suivistes du PCF, trotskistes de la LCR et autres) de la FSU néchouent pas, en dépit de leurs reculs constants, est quils sont les seuls à manifester, à sorganiser, à lutter. Ils se battent pour laffreuse application de leur utopie trouée aux mites, en fonction de leur fausse conception égalitaire, avec leur rhétorique inusable sur "les moyens". Tout cela est peut-être risible : mais ils ne rencontrent pas beaucoup de contradicteurs.
On reconnaîtra donc une certaine santé imperturbable à la FSU davoir ainsi conduit une telle manifestation au lendemain de ce qui fut pour elle un échec électoral. Ni M. Luc Ferry commentant prudemment (1) que "la mobilisation nest pas forte" ni Claire Chazal sur TF1 (prétendant à 20 h 15 que les manifestants étaient "plusieurs dizaines de milliers") nont daigné, en effet, insister sur le résultat des élections syndicales dans lenseignement pourtant publiées la veille 7 décembre. La FSU apparue durant les années 1990, devenue quasi majoritaire, ayant obtenu 49,18 % des voix en 1999, ne représente plus que 217 000 voix et 45 % des suffrages exprimés sur 754 000 enseignants titulaires. Ceux-ci sont au nombre de 418 000 dans le secondaire, bastion dorigine de la FSU (le "SNES") : elle perd 8 points chez les enseignants du secondaire passant de la majorité absolue, 55 % des voix en 1999, à 46,7 % désormais.
On devrait souligner que depuis 2001 la branche de la FSU des lycées professionnels sest séparée de la centrale. Le SNETAA syndicat désormais autonome est passé de 42 % à 33 % dans un secteur où la FSU maintenue est tombée à 8,6 %. Or, la raison de cette scission tient ni plus ni moins à lentêtement idéologique des communistes dirigeants la FSU. Sous leur influence, la FSU saccroche au collège unique et prétend maintenir coûte que coûte le modèle des lycées généraux, appliqué idéellement à 80 % dune classe dâge, déconnecté de lemployabilité et considérant le lycée professionnel, lenseignement technique et lapprentissage, comme le rebut.
Dautre part, si la FSU continue de progresser dans le primaire (2) passant de 42,7 à 43,9 %, on remarque quelle perd la majorité chez les agrégés passant de 52,3 à 49,2 %.
En gros, la FSU représente encore un bon 1/4 du corps enseignant. Mais sa force tient à la fois à lénorme abstentionnisme aux élections professionnelles et à lémiettement de ses rivaux : les autres centrales sont au nombre de 10. La vieille FEN devenue UNSA-Éducation ne recueille plus que 68 000 voix, ce nest plus quune coquille vide maçonnique et mutuello-affairiste. (3)
La supercherie dialectique de la FSU ne repose pas seulement sur la mobilisation dorganisations lycéennes ou celle des étudiants de lUNEF ou sur la façade dunion syndicale pour réclamer "plus de moyens".
Elle tient aussi au fait quen face delle personne ou presque na le courage au sein du système de se prononcer clairement pour un enseignement plus libre et plus diversifié en France, encore moins pour labrogation de limposture de 1932 remplaçant lInstruction publique par lÉducation nationale.
Olivier Pichon rappelle cette protestation de Taine contre "linsupportable prétention de lÉtat à se faire léducateur de la Nation (4)".
Cest bien cette funeste utopie que représente encore la FSU, dobédience communiste, maîtresse du jeu syndical dans lÉducation nationale, et face à laquelle on est tenté de demander à M. Luc Ferry de tenir bon, et au gouvernement daffirmer plus nettement un vrai projet alternatif de liberté.
JG Malliarakis
(1) sur Europe n° 1 8 décembre, 19 h 50
(2) Peut-être précisément parce que le primaire demeure le lieu de certaines illusions sur un enseignement univoque et égalitaire.
(3) Ceci risque d'ailleurs de remettre en cause lexistence même de lUNSA.
(4) cf. Le livre quil vient de publier sous le titre "Dernières Nouvelles du Mammouth" Diff : Duquesne Diffusion 27 avenue Duquesne 75007 Paris 01 45 55 87 55.
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