COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
VENDREDI 27 DÉCEMBRE 2002
QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE MARCHÉ PERDU DE LAVIATION POLONAISE
Ce qui a choqué les Polonais c'est la campagne des lobbies agricoles français
On comprend le dépit, et il serait absurde de critiquer la réaction du groupe français Dassault, faisant suite à la décision connue ce 26 décembre de lArmée polonaise dacquérir le chasseur américain F-16 plutôt que ses compétiteurs le Mirage 2000-5 et le Gripen suédois.
Les déclarations du président de Dassault Aviation, M. Charles Edelstenne, ont été largement médiatisées en boucle sur France Info et sur toutes les radios dÉtat. Comme dhabitude, dailleurs, les grands moyens du bourrage de crânes ont tronqué ses phrases pour lui faire affirmer que cette décision relative au remplacement des 48 vieux Migs soviétiques est essentiellement politique.
Convenons éventuellement que ce nest pas la valeur technique et le prix qui auraient déterminé lacheteur de Varsovie. On parle ainsi dun marché de 3 milliards dEuros sur lequel la firme états-unienne Lockheed aurait offert 5 milliards de compensation. De son côté, le concurrent anglo-suédois constitué de SAAB et de BAE affirme avoir offert des contrats constitués de compensations à concurrence de 8 milliards dEuros. Qui dit mieux ? Et surtout qui dit vrai ?
Supposons donc exacts et véridiques les conclusions attribuées à M. Edelstenne : "lélément politique a été lélément dominant, bien au-delà de la qualité des matériels", et soyons alors logiques.
Comment laisser dire par exemple par les médiats parisiens que la France aurait soutenu la candidature polonaise lors des négociations qui ont abouti à la décision du Conseil Européen réuni les 12 et 13 décembre à Copenhague, alors que cest le contraire qui est vrai.
Lélargissement de lEurope aux 10 pays agréés cette année résultait dabord de leurs candidatures ensuite du désir dun groupe de pays du nord et du centre de lEurope (1) de redéployer lespace européen vers lest, et enfin, secondairement de lanalyse anglo-américaine selon laquelle une Europe à 25 facilitera, dans un premier temps, leur désir dune Europe moins identitaire.
Au contraire, si un pays freinait cette évolution, cétait bien la France et en janvier 2002 The Economist prévoyait un scénario, qui ne sest pas réalisé, où la France se servirait de divers obstacles pour faire capoter le projet délargissement à 25. Et si le scénario imaginé par les brillants journalistes de Londres ne sest pas réalisé, cest plutôt parce que les Français se sont montrés, comme à leur charmante habitude, moins sérieux, moins obliques, moins constants et moins cohérents que le sont habituellement les diplomates au service de Sa Gracieuse Majesté la Reine dAngleterre, défenseur de la foi, impératrice des Indes, souveraine en Irlande et autres bienfaits dont se félicitent aujourdhui encore les Chrétiens de Bethléem, de Chypre, du Soudan ou du Pakistan.
Ce qui a considérablement surpris dabord, choqué ensuite et durablement braqué les Polonais, ce sont au contraire les levées de boucliers, ces dernières années, des syndicats agricoles français comme la candidature des pays de lEurope de lEst. Légalisation des conditions de compétition en faveur de leurs agriculteurs a été arrachée de haute lutte par les négociateurs polonais.
Peut-être serait-il politiquement utile de réfléchir plus avant à Paris sur lEurope de la défense qui demeure virtuelle et je comprends quà Varsovie, Prague ou Budapest on prenne aujourdhui lOTAN plus au sérieux que lUEO défunte ou la CED avortée depuis 1954 (2). Enfin il serait peut-être aussi nécessaire de cesser de saccrocher en France à nos ruineuses et inutiles subventions agricoles.
JG Malliarakis
(1) Et principalement lAllemagne.
(2) Si mon souvenir est exact par les conjonctions des gaullistes et des communistes français.
Vous pouvez aider l'Insolent ! : en faisant connaître notre site à vos amis en souscrivant un abonnement
Revenir à la page d'accueil ... Accéder à nos archives ... Accéder au Courrier précédent