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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 26 FÉVRIER 2003

PAR LA BOUCHE DE M. FILLON CE SONT LES TECHNOCRATES QUI PARLENT

Le dialogue social est une façade des décisions conservatrices de Bercy

M. François Fillon, ministre de la sécurité sociale, "dévoilait" en date du 26 février (1), son prétendu plan de réforme des retraites.

En cette occasion, l’État employeur fait de l’alignement de la durée de cotisation du public sur le privé une de ses priorités. En gros, la CFDT et la CFE-CGC, de longue date sont d’accord mais le principe indigne les autres centrales syndicales, essentiellement implantées dans le secteur public : Force ouvrière, la CGT, la FSU de l’Éducation nationale notamment.

Le ministre des Affaires sociales annonce de la sorte : "harmoniser progressivement les conditions de retraite de l’ensemble des Français sera l’une des priorités" de la réforme en vue d’éliminer les "différences flagrantes entre régimes" du public (37,5 ans de cotisations) et du privé (40 ans).

M. Fillon n’exclut "pas tout à fait" un référendum.

Qu’est-ce à dire ?

Va-t-on ou ne va-t-on pas au référendum ?

M. Fillon, pédagogue à ses heures, estime "qu'il faut que nos concitoyens comprennent que s’ils n’acceptent pas de travailler plus longtemps, à terme, ils auront moins de retraite".

M. Fillon n’est pas favorable à une révision de la réforme Veil instituée par le gouvernement Balladur. Rappelons que celle-ci a modifié unilatéralement, en 1993, les bases de calcul des pensions du secteur privé. Sont désormais prises en compte les 25 meilleures années de la carrière contre les 10 meilleures avant cette réforme. Revenir là-dessus créerait "une augmentation de la charge".

M. Fillon se dit par ailleurs "hostile" à la création d’un nouveau prélèvement.

Mais M. Fillon se déclare partisan d’une extension "à tous les Français", de la "possibilité de constituer une épargne retraite". Cette "possibilité" existe déjà : tout épargnant peut investir. Simplement, sa "possibilité" est mal prise en compte par la fiscalité. Si M. Fillon ne cherche pas à "créer un nouveau prélèvement", qu’il dise simplement que la France, au lieu d’être en Europe un des pays qui fiscalisent le plus sévèrement l’épargne, assouplira vraiment sa fiscalité expropriatrice.

Sur tous ces points, par la bouche de M. Fillon ce sont les technocrates de Bercy qui parlent.

La réforme, selon lui doit "donner aux Français une grande liberté quant au choix de l’âge de départ".

Et pourquoi seulement quant à "l’âge de départ" ?

Et que pense-t-il du libre choix qui pourrait être enfin reconnu aux travailleurs indépendants ?

Les centrales syndicales protestent vivement, à l’exception de la CFDT et de la CFE-CGC dont les réactions étaient plus mitigées.

FO, la CGT, la CFTC, le groupe des Dix, dont le fer de lance est constitué par les gauchistes de SUD, la FSU ont dénoncé un "simulacre de concertation", un "rideau de fumée" sur un dispositif "déjà bouclé", ce qui "augure très mal" la réunion qui devait se tenir au ministère le 28 février entre syndicats, patronat, et ministère, afin de fixer un ordre du jour.

M. Marc Blondel est "en colère contre Fillon". Il déclare : "Si c’est un ballon d’essai c’est réglé tout de suite : carton rouge ! Prétexter l’équité pour justifier l’alignement public-privé, ne sert qu’à flatter les réactions poujadistes : ils sont en train de faire péter l’unité républicaine en opposant les fonctionnaires aux autres catégories". M. Blondel redoute à terme un allongement au-delà de 40 ans pour tous.

Le spécialiste des retraites" à la CGT, Jean-Christophe Le Duigou, considère que "Cette harmonisation vise finalement à ce que tout le monde soit réduit à la portion congrue. Le grand sacrifié sera le niveau des retraites futures".

La CGT dénonce encore "l’effacement de la référence à la retraite à 60 ans" et SUD fustige "la volonté gouvernementale d’une retraite à la carte source d'inégalités sociales". La FSU s’indigne d’un "alignement par le bas", qui laisse "présager de nouveaux reculs pour tous".

La CFTC surnomme M. Fillon "Mister Provoc". La centrale chrétienne demande pourquoi il n’a pas attendu les "résultats des travaux des groupes techniques" avant de trancher.

Pourquoi ?

Tout simplement parce que Bercy veut faire passer son projet de réforme au rabais et M. Fillon n’est qu’un porte parole et un fusible.

L’État employeur se contente aujourd’hui du soutien hypocrite de la CFDT et de la centrale cadre.

La CFDT, par la voix de M. Jean-Marie Toulisse, ne se veut "pas opposée à l’harmonisation à la condition que des contreparties importantes soient négociées : tout est ouvert… la CFDT se montrera exigeante en vue d’une concrétisation." Ouais.

La CFE-CGC juge que l’idée d’harmonisation "va dans le sens" de ses propositions. Elle déplore toutefois avec la CGT et FO le maintien du dispositif Balladur, car elle a "contribué à la perte de confiance des gens sur leur retraite".

10 ans après la réforme de 1993, il serait temps de s’en apercevoir.

JG Malliarakis

(1).Dans un entretien publié par Le Parisien ("Aujourd'hui en France ").

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