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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
LUNDI 10 MARS 2003
LES INTERETS PRIVES DE LA FONCTION PUBLIQUE
Ils seront bien défendus foi de Gouvernement réformateur
Il paraît que le 5 mai 2002, le chef de lÉtat avait reçu une légitimité populaire supérieure à celle dont 40 ans plus tôt, la Ve république avait vainement rêvé : plus de 80 % des voix.
Il paraît aussi quen juin était apparue une majorité parlementaire colossale permettant la fondation dun parti unique de droite, lUMP disposant dun groupe parlementaire sans précédent de 365 députés.
Il paraît que, dautre part, une politique extérieure brillante permet au gouvernement actuel de recevoir à nouveau un bain de légitimité avec lappui de 80 % des Français, et dune majorité plus grande encore, si l'on tient compte des demandeurs de visas.
Et pourtant, on nous dit que les fonctionnaires "grognent". Le mot est devenu dun usage journalistique courant. Comme certains habitants des soues, usagers des auges et familiers de la fange, lanimal social mécontent exprime ainsi son mécontentement syndical : il grogne.
Cela fait ce 10 mars le titre de première page des Échos : "La grogne des fonctionnaires".
Le même journal publie un graphique, dailleurs officiel des départs attendus des titulaires dans la fonction publique détat sur la période 2000-2018. Il faut évidemment se concentrer pour le comprendre. S'il est clair, à larrivée, que, pendant toute cette période, le chiffre des départs à la retraite, des décès en pleine activité, des démissions etc. semble avoir vocation à osciller entre 45 000 et 65 000, il faut déplorer pour la clarté de la chose qu'un joli jeu de couleurs établisse une différence, une odieuse discrimination de couleur, entre les fonctionnaires de lÉducation nationale et ceux des Autres ministères civils.(1)
Sur le graphique, dont les chiffres proviennent de la célebrissime DGAFP, les enseignants sont rouges, les "autres" sont gris.
Actuellement, les départs sont nettement plus nombreux chez les rouges, et ils culmineront à 37 000 pour lannée 2008. Cest une année symboliquement charnière puisquelle se situera 40 ans pile poil après lannée de référence, au moins pour la couleur, de 1968. Après, le tableau redescend dans la grisaille jusquen 2018.
Il était bouleversant dentendre, dès potron-minet sur les ondes dÉtat ce même 10 mars le représentant dun "gris" parmi les "gris", M. le Secrétaire général du SNUI, Syndicat National Unifié des Impôts, qui "grogne" comme les autres, plus encore que les autres contre la baisse des effectifs.
Certains esprits mal intentionnés imaginent peut-être que malgré sa représentativité sociologique "grise", les idées noires du SNUI viendraient dune idéologie rouge. Profonde erreur : cest uniquement au nom de la grisaille que le SNUI conteste.
Certains pensent peut-être quil est naturel, puisquon nous dit partout que les impôts baissent et vont baisser, que les effectifs des fonctionnaires des impôts aient eux aussi tendance à baisser. Erreur encore plus profonde.
Dautres imaginent dailleurs quil en irait de même dans lÉducation nationale. Puisque la démographie nationale amène moins denfants français à lâge scolaire, on pourrait imaginer, là aussi, une baisse du nombre des enseignants et des personnels administratifs. Ne parlons même pas de gain de productivité. Lerreur devient abyssale.
Les contribuables doivent bien comprendre, non seulement que les fonctionnaires incarnent le service public, mais quils savent mieux que le public quels sont les besoins de la nation.
Ainsi donc, le 10 mars, commence une agitation aux Impôts, le 11 mars, ce sera une grève à Air France redevenue monopoliste, le 14 mars un mot dordre à la SNCF aura été précédé de 6 jours de petites grèves. Le 8 mars, M. Fillon, fonctionnaire parmi les fonctionnaires, annonçait sa volonté là aussi de pratiquer la RTT, Réduction de son temps de travail en remettant à septembre les négociations salariales, rendant ainsi un immense service aux 7 centrales de fonctionnaires.
Voilà ce quon appelle un gouvernement réformateur.
JG Malliarakis
(1) Les Fonctionnaires de la défense ne comptent pas : ils ne sont pas syndiqués.
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