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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

LUNDI 14 AVRIL 2003

LE GOUVERNEMENT DE TONY BLAIR ET SON BUDGET

Et si nous cessions de regarder l’Angleterre du haut de l’arrogance des énarques français…

Il est un peu dommage que les Français observent toujours avec tant d’esprit polémique, ou tant de distance, ce qui se passe dans un pays aussi proche et aussi comparable au leur que le Royaume Uni. On n’en finirait plus, en ce 550 anniversaire de la bataille de Castillon, fin (théorique) de la guerre de Cent Ans de faire la liste des absurdités énoncées, durant les 3 premiers mois de cette année civile, par nos médiats à propos de la Perfide Albion et des Maudits Zinglais.

Les commentaires méprisants sur le budget annoncé par le chancelier de l’Échiquier en ce début avril méritent cependant d’être relevés.

Un journal aussi sérieux que les Échos titre ainsi : "Gordon Brown se trouve obligé, du fait de la guerre d’Irak, de recourir à l’emprunt" Techniquement rien n’est plus vrai. Le budget britannique est en déficit. Or, dans une situation d’ordre monétaire, cela se finance obligatoirement par l’emprunt.

On a pris l’habitude de calculer et de comparer les déficits publics en fonction du produit intérieur brut. Il se trouve d’ailleurs que ce sont principalement des eurocrates français ont pris cette décision. Et ils l’ont fait ratifier par les gouvernements européens de ce qu’on appelle aujourd’hui l’Euroland, à l’occasion du Traité signé à Maastricht en 1997, Cette doctrine économétrique a conduit à définir des critères de convergence monétaires. Ces critères sont réputés s’appliquer à l’euro et de limiter

L’Angleterre n’a pas voulu renoncer à la livre sterling. Elle répugne toujours à se fondre dans l’euro.

Pourtant, si on compare son budget et son endettement à celui de la France, c’est à Londres et non à Paris, que l’on est le plus proche des critères de Maastricht.

Le budget annoncé par G. Brown prévoit un déficit de 2,6 quand le déficit de 2003 de la France sera probablement supérieur à 3,4. Quant à l’endettement, celui de la France va probablement cette année dépasser les 60 % cependant que la Grande-Bretagne va vers 45 % d’endettement. Et ceci se réalise malgré l’émission d’emprunts, malgré la guerre d’Irak, malgré un effort militaire remarquable.

Les meilleurs économistes spécialisés dans les questions monétaires rappellent à ce sujet que, même en persistant à produire leur déficit au rythme actuel, proche du taux de croissance du PIB national (1), la dette de la Grande-Bretagne ne dépasserait pas 46 % du PIB dans ces 30 prochaines années.

Il y aurait donc plutôt lieu de prendre exemple sur nos voisins et amis d’Outre-Manche sur de nombreux points.

L’inflation britannique est souvent présentée pour gravement supérieure à 2 %.

En réalité, cela tient au fait que, dans le calcul de l’érosion monétaire, les indices anglais incorporent les taux d’intérêts payés par les particuliers pour l’acquisition de leur logement.

Ainsi, l’actuel indice britannique RTIX est-il artificiellement supérieur à l’indice INSEE français. Or, Gordon Brown propose d’harmoniser désormais l’indice de référence avec les pratiques économétriques européennes. En passant du calcul RTIX au nouvel indice HICUP, les valeurs de l’inflation dans le Royaume-Uni sont ramenées à 1,6 %. Voilà qui fera sourire bien entendu ceux pour qui l’économie repose sur des principes plutôt que sur des chiffres.

Tout n’est pas rose non plus dans la Grande-Bretagne du New Labour. Le point de 40 ans vieux travaillisme n’a pas été effacé entièrement par les 11 ans de redressement sous le gouvernement Thatcher. Remarquons simplement que 13 ans après la démission de la Dame de Fer, 6 ans après l’arrivée au pouvoir de Tony Blair, les principes de libertés et de responsabilité sont mieux défendus en Angleterre que dans notre pays malgré le poids totalement factice de la majorité UMP au parlement de Paris. Il est hélas à observer que, dans la constitution de 1958, cette assemblée croupion ne dispose même pas de certaines prérogatives dont jouissaient ses prédécesseurs dans la constitution non écrite de l’Ancien Régime. Et comme sous la Terreur jacobine, ce sont les Français qui émigrent à Londres. Pas le contraire.

Ayons donc avec un peu plus de bon sens lorsque nous mesurons ce qui se réalise en Grande-Bretagne. Et il serait bon que nous cessions de regarder l’Angleterre du haut de l’arrogance des énarques français.

JG Malliarakis

(1) Tendanciellement le taux de croissance britannique est évalué entre 2,25 et 2,75 %.

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