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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MARDI 13 MAI 2003

QUAND LE TRAVAIL FRANÇAIS S’ARRETE

La baignade est devenue plongeon forcé, elle tend à la noyade.

Quand le travail s’arrête, grippé par une grève thrombose, — et celle des transports publics monopolistes et subventionnés en est une, — on est bien en droit de se demander à quelle utilité sociale répond le travail.

Certains esprits archaïques (1) pensent volontiers que, le travail sert à produire et à échanger de la richesse. De la sorte, le travail est toujours utile dans un monde dominé à 90 % par la pauvreté, le besoin et la rareté de biens aussi élémentaires que l’eau, l’énergie et, bien entendu, l’information.

Les bons esprits rétorquent que cet appel à une offre systématiquement plus forte, notre illusion que cette offre pourrait se révéler de mieux en mieux adaptée aux besoins des individus qui composent les peuples, tout cela attente à la pureté originelle. Nous menaçons, pensent ces bons esprits, la forêt vierge, la tranquillité des baleines, et même la survivance des loups. Arrêtons de travailler, suggèrent-ils, et tout recommencera comme avant. Comme au bon vieux temps.

De ce point de vue que l’on appellera, pour simplifier, malthusien, le travail n’est pas un effort continuel pour arracher l’homme à la pauvreté originelle et l’échange n’est pas profitable. L’échange n’est acceptable aux malthusiens que réduit à un mécanisme contrôlé par l’État ou par une autorité morale le transformant en "commerce équitable". Quant au travail, il est une aubaine rare, et il faut le partager.

Ainsi, de manière rustique, sont nées diverses utopies réformatrices dont la plus astucieuse s’était voulue l’instauration par François Mitterrand de la retraite à 60 ans. En mettant hors circuit les 60-65 ans, en réprimant les affreux cumulards "emploi-retraite", on imaginait faire place aux jeunes et diminuant d’autant le chômage, pérenniser la popularité de la majorité socialo-communiste de 1981.

C’est le contraire qui s’est produit.

Les malthusiens de gauche et de droite n’en ont pas tiré les leçons.

En loin de s’orienter vers une version plus réaliste, ils ont cru habile de couper, après la 1 patte correspondant à l’âge de travail, une deuxième patte de l’animal, sans doute pour mieux égaliser son infirmité : on coupa donc la 2 patte correspondant à Durée hebdomadaire du temps de travail".

C’est ainsi que la France s’est alourdie d’un nouveau monstre : la loi sur les 35 heures. En fait cette loi est un ensemble de dispositions étalées de 1997 (Loi Robien) à 2002 (extension aux unités de moins de 20 salariés) en passant par les "fameuses" Lois Aubry I et Aubry II (1998-1999). C’est donc un processus de plus en plus contraignant et pénalisant pour les entreprises, destiné à transformer une nation où le travail était à l’honneur en un conglomérat de tire-au-flanc.

La tendance à la baisse naturelle du temps de travail s’était traduite dans l'industrie par une diminution de 4 heures en 14 ans entre 1963 et 1977 (de 45,2 à 41,2). C'était plus ou moins à l’époque dites des 30 glorieuses.

En 5 ans, de 1997, on a obligé la France à passer de 39 à 35 heures, dans tous les secteurs. Cette réduction est arithmétiquement équivalente (4 heures) mais proportionnellement plus élevée (11 % en 5 ans contre 9 % en 14 ans). On l'a, de plus généralisée des secteurs à faible progression de la productivité (60 % de l'emploi étant dans les services) ainsi qu'à des secteurs frappés par une pénurie de main d'œuvre (hôpitaux, artisanat, hôtellerie-restauration, etc.)

Et ce processus continue depuis 3 ans, malgré le début de récession remontant à l'automne 2000. Aujourd'hui l’économie française est en crise, la droite politique est revenue au pouvoir, et l'on continue d'appliquer la "recette". La baignade du travail français est devenue plongeon forcé, elle tend à la noyade.

Quand le travail français s’arrête, que ce soit par l'ordre de l’État ou sur l'injonction des syndicats (2), le travail étranger prend la relève.

Le travail des concurrents prend la place de celui de nos compatriotes sur le marché de l’offre. Car la seule solidarité humaine observable est celle de l’échange.

Si nous n’avons plus rien à offrir nous recevrons de moins en moins.

Il est donc excellent de bénéficier du progrès. Il est moins admirable d’en abuser et de croire qu’il peut être partagé avant même d’avoir pris son essor. Pendant des années, nous avons cru pouvoir anticiper la création de richesses et nous avons gaspillé avant même d’avoir épargné et investi. De savants universitaires (3) nous y ont même encouragé, distillant le mensonge selon lequel la dépense publique créerait de la richesse privée.

Aujourd’hui il faut retrousser nos manches et rappeler autour de nous cette évidence : la réponse au chômage, c’est le travail.

Le bon La Fontaine le disait déjà : "Travaillez, prenez de la peine, c’est le fonds qui manque le moins".

JG Malliarakis

(1) Dont nous sommes très certainement.

(2) Soulignons que cette injonction repose sur un processus doublement illégal et illégitime, celui des piquets de grèves violents des gros bras de la CGT et de la grève thrombose des transports monopolistes subventionnés.

(3) C’est le châtiment de Keynes que de voir son nom associé à celui d’un Strauss-Kahn.

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