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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

JEUDI 22 MAI 2003

UNE MANŒUVRE POLITIQUE GROSSIERE

Elle est destinée à bloquer pour de longues années toute velléité de réforme véritable

Il est toujours plaisant d’entendre M. Juppé donner des leçons de souplesse au gouvernement. Mais la chose est d’autant plus plaisante, avouons-le, au moment où la CGT, elle, se prépare clairement à une situation d’affrontement.

C’est effectivement la double constatation qui résulte des nouvelles transmises très officiellement par l’Agence France-Presse et abondamment paraphrasées par le quotidien de la pensée unique Le Monde dans la journée du 21 mai. Le même jour du reste, sans doute pour souffler sur des braises qui couvent si tristement dans son équipe rédactionnelle depuis 1968, le complément matinal du même journal, Libération publiait un dossier au vitriol (pas entièrement infondé du reste) sur les rémunérations délirantes de certains patrons. Et, toujours dans Libé, on pouvait découvrir ce jour-là que ce serait exclusivement "Bruxelles" qui pousserait perfidement la France à réformer ses régimes de retraites. Nos amis savent ce qu'il en est au moins depuis 1998. Nous le disions aussi dès le 16 mai : la réforme Fillon sera moins importante que la Directive Bolkestein. Mais, présentée comme le fait Libé cette dimension prend une tout autre allure.

Si le parti UMP, majoritaire au Parlement, présidé par M. Juppé, pense que la réforme de l’école et des retraites ne correspond pas à ses desiderata, il est un peu dommage qu’il ne le fasse entendre qu’au moment où ce sont précisément ses adversaires politiques, la CGT mais aussi le parti socialiste, qui font pression pour que le gouvernement fasse machine arrière.

Autre ficelle un peu grosse relevée dans la présentation du Monde : faire de Luc Ferry personnellement, à égalité avec les dossiers des retraites et de la décentralisation, un des sujets de difficulté du gouvernement. Ainsi M. François Fillon ne serait pas responsable des négociations, menées pourtant de manière un peu étrange, avec les syndicats.

Le fusible que l’on veut faire sauter c’est M. Luc Ferry et ceci pour trois raisons :

Si Luc Ferry saute, il sera en tout cas très difficile à un ministre de l’Éducation issu de la classe politique de faire autre chose que M. Bayrou entre 1993 et 1997 ou M. Lang après le départ de Claude Allègre, c’est-à-dire : rien.

Remarquons d’ailleurs que M. Luc Ferry n’est pas actuellement l’initiateur d’une grande réforme portant son nom. Il n’a même pas repris à son compte certaines idées positives remontant à ses prédécesseurs socialistes qu’il s’agisse de Fauroux, Allègre ou Mélenchon allant (peu ou prou) dans le sens d’une véritable préoccupation de l'employabilité des jeunes Français au sortir du système éducatif.

Ce que gère actuellement M. Luc Ferry, c’est un simple courant technique de décentralisation du statut des personnels non enseignants. De ce processus, on a scandaleusement amplifié l’effet d’inquiétude. M. Luc Ferry gère d’autre part la réforme Fillon-Delevoye.

Or, ce ne sont pas ces ministres, pas plus que M. Devedjian qui sont dénoncés. La manœuvre politique tend à faire sauter les fusibles les moins institutionnellement issus de l'appareil du gaullisme étatiste. On (2) veut affaiblir notamment ce qui touche au Premier ministre désigné dans certains cortèges comme l'ennemi n°1 du secteur public et de l’étatisme.

Il ne s’agit donc ni d’applaudir frénétiquement aux actes d’un gouvernement caractérisé par 12 mois d’atermoiements prudents, ni de penser que la réforme Fillon puisse sauver la retraite par répartition, ni de voir en Luc Ferry un refondateur de l’école de Jules Ferry.

Il s’agit de voir telles qu’elles sont les manœuvres grossières et délétères des politiciens étatistes (3) et de leurs partenaires du syndicalisme subventionnaire toujours noyautés par le même parti, et de plus en plus, baignés de la très vieille idéologie communiste, strictement impunie et impénitente dans notre pays.

JG Malliarakis

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(1) Si discret, bien qu’il soit chargé de la décentralisation.

(2) "On" c'est-à-dire manifestement l'appareil gaulliste étatiste autant que les vieux dinosaures socialo-communistes.

(3) Faut-il tenir cette expression pour un pléonasme ? C'est probablement le problème central de nos institutions. Le rôle des anciens élèves de l'ENA et des fonctionnaires en général n'est évidemment pas seul en cause. Osons remarquer que ce n'est pas parce que nos assemblées sont dominées par les fonctionnaires que nos politiciens ont été transformés en assistantes sociales. Le rapport de causalité est peut-être même strictement inverse. Dans une démocratie on a les députés que l'on mérite.

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