Certains se souviennent peut-être dun mot particulièrement dédaigneux du général De Gaulle disant dans les années 1960 : "La politique de la France ne se fait pas à la corbeille". Et chacun se rappelle sans doute aussi que cet officier de cavalerie avait pour doctrine bien connue "lintendance suivra".
Parmi les châtiments posthumes infligés aux mânes de cet anti-économiste on savourera donc la revanche prise par léconomie elle-même sous le règne de successeurs se réclamant (peut-être indûment) de son héritage.
Ainsi, le gouvernement issu des élections du printemps 2002 recommence-t-il, et cest heureux, à parler de privatisations. Il le fait en invoquant le fait que lindice CAC 40, après avoir été cet automne aux alentours de 2 400 points semble actuellement trouver un étiage à 3 200, en attendant mieux. Ceux qui partageaient notre point de vue en octobre 2002, et qui ont tenu bon cet hiver, ont augmenté leur patrimoine de plus de 30 %.
Le Figaro (23 juin) commente alors fièrement : "le ministre de lÉconomie, Francis Mer, peut compter sur les actionnaires français qui ont toujours répondu présent au rendez-vous des privatisations."
On soulignera aussi que cette politique nest pas seulement dictée par "la corbeille" mais par la perspective dune crise européenne très grave résultant du déficit illégal de la France du fait des prévisions de croissance absurdes sur lesquelles la majorité chiraquienne a voté le Budget 2003. Même dans le cadre de ce Budget, lÉtat comptait sur 8 milliards de recettes de privatisations quil va bien falloir envisager de programmer. Il est même probable que le gouvernement de Paris renforcerait sa position en Europe sil envisageait de multiplier par 2 son programme. Les imbéciles diront, et hélas certaines personnes habituellement sensées répéteront après eux quon vend les bijoux de famille. Nous leur suggérons de réfléchir au fait alors que les bijoux nont jamais rien rapporté à aucune famille, sinon des complications, des cambriolages, des primes dassurances, des frais de coffres et des scènes de jalousie
Il nest pas désagréable de noter aussi quon recommence à parler de privatisation dans un contexte de défaite cuisante des bureaucraties syndicales.
Battues à plate couture après leur 8e marche contre la réforme des retraites le 19 juin, après lirruption non programmée dun courant dopposition dans la rue le 15 juin, les forces de la survivance marxiste ont vu enfin ce 23 juin 2003 lapplication dune décision de justice à lencontre de José Bové juridiquement exécutoire depuis un arrêt de la Cour de Cassation du 19 novembre 2002. Cet arrêt aura mis environ 8 mois pour parcourir quelque 800 km séparant Paris de Montpellier, ceci à 3 semaines du 14 juillet et de son flot de grâces présidentielles.
Soyons dailleurs logiques.
Dans notre tradition marquée par le christianisme (1) personne ne peut désirer la mort du pécheur.
Sa repentance suffirait dès lors que, sincèrement, lutopie marxiste reconnaîtrait quelle est très largement minoritaire au sens du peuple français Elle porte la responsabilité de labaissement de la nation française
depuis quen 1931 Staline a précisément dénoncé la France comme la première puissance impérialiste à abattre ;
et que les gouvernements du Front Populaire en 1936 et 1937 en a fait le maillon faible quelle est toujours ;
et depuis que nos gouvernants glorifient cette faiblesse.
Il faut donc dire résolument oui à une nouvelle vague de privatisations. Il faut bien entendu souhaiter qu'elle soit la plus ample possible.
Mais il est également nécessaire quelle se voie relayée dans notre pays
par une vraie réhabilitation de lidée de propriété,
par un retour à des conceptions patrimoniales de lépargne auxquelles 50 % au moins des salariés sont déjà préparés,
mais aussi par un vaste courant dinterrogation sur les nuisances spécifiques à la pensée unique française.
S'agissant de cette pensée unique française nous sommes donc bel et bien en présence de ce que Karl Marx appelait lidéologie, Gramsci le pouvoir culturel, ce que Keynes appelait les idées qui mènent le monde et auxquelles Frédéric Bastiat entendait répondre sur son lit de mort par ce mot despérance "la vérité"
(1) Et celui-ci ne se traduit pas seulement par ce qu'un Giscard condescend à appeler "un élan spirituel". Le judéo-christianisme est aussi porteur d'une pratique de charité.