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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

LUNDI 30 JUIN 2003

LES INTERVENTIONS ETATIQUES SUR LE LOYER DE L’ARGENT

NE RELANCERONT PAS L’ECONOMIE FRANÇAISE

"La Liberté du crédit, c'est l'harmonie sociale, c'est le Droit, c'est le respect de l'indépendance et de la dignité humaine. C'est la foi dans le progrès et les destinées de la société." Frédéric Bastiat

La baisse du taux d’intérêt américain ne nous a été connue ce 26 juin que par la lecture du Giornale à la sortie du Musée archéologique de Naples. Dans un tel contexte, la conjoncture financière si passionnante soit-elle mérite d’être mise en parallèle avec les tendances longues. Elle ne changera rien aux instantanés figés dans l’éternité d’Herculanum et Pompéi. La grâce des fresques, la perfection de la mosaïque d’Alexandre, la majesté des empereurs romains n’en seront pas altérées (1).

Quant à mettre les Napolitains au travail, la chose relève d’une chirurgie sociale certainement plus structurelle.

Reste qu’avec un taux de 1 %, le loyer public de l’argent fédéral américain est à un niveau qu’il n’avait pas connu depuis 1958. Depuis le 3 janvier 2001, le loyer du dollar est passé de 6 % à 1 %. Mais on doit observer qu’il était à 1,25 % depuis novembre 2002 et que, par définition, il peut difficilement tomber de beaucoup.

Cette politique de baisse des taux courts par les banques centrales peut faire l’objet de diverses appréciations selon qu’on l’observe du point de vue de la Bourse, de la Banque, de la grande compagnie ou de l’entreprise individuelle : ce n'est pas la même chose. Elle a aussi des effets sur le cours des monnaies, sur le commerce international et aussi sur la croissance.

Il ne nous appartient pas d’évaluer ici la pertinence de l’action de M. Greenspan qui, d’une manière générale, est probablement mieux informé que nous de l’intérêt des États-Unis.

Ce dont nous devons nous préoccuper, c’est plus sérieusement de cette idée répandue avec 10 ans de retard chez nos dirigeants politiques et nos technocrates que la relance de l’économie dépend de coups de fouet tels que la baisse du taux d’intérêt court fixé par les banques centrales.

Cette idée nous semble à peu près aussi illusoire que la politique du franc fort a pu se révéler néfaste pour la France dans les années 1990, et particulièrement lorsque M. Trichet fut nommé Gouverneur de la Banque de France par la grâce de M. Balladur.

À l’époque, pour maintenir un cours élevé du franc, on avait fixé un taux d’intérêt de base trop élevé. Ceci entraîna un coût exorbitant du loyer de l’argent pour les entrepreneurs, particulièrement pour les petits, mais aussi pour les consommateurs, pour les acquéreurs de logements, etc.… Une part importante du chômage structurel français de cette période s’explique par cette usure étatiste artificielle.

Faut-il imaginer que, symétriquement, une baisse administrative non moins artificielle des taux provoquerait un flux d’embauche et de création saine d’activités durables comme semble le penser en France le chef de l’État ? La réponse est non.

Tout d’abord, il n’y a pas symétrie. Faire passer de 10 à 15 % le taux de l’intérêt effectif payé par une petite entreprise peut contribuer à l’étrangler et à la dissuader d’investir.

Diminuer de 1,25 à 1 % le taux de la banque centrale n’entraîne pas les effets inverses.

Au-dessous de sa valeur naturelle, le loyer de l’argent encourage des opérations sélectionnées par d’autres considérations que leur rentabilité intrinsèque et leur utilité sociale. On ne saurait le dire mieux que l’a dit, en quelques lignes, Jean Étienne Portalis (2), c'est-à-dire un juriste, et tout économiste français devrait avoir le courage de se référer à son texte lumineux.

Un taux artificiellement bas est une forme de subvention et l'on n’a jamais vu l’assistanat engendrer le travail ni l’État décréter la croissance.

Cela nous ramène à Naples et à ce que les Italiens du Nord appellent la bourbonisation du Sud. Il est vrai qu'aujourd'hui c'est la bourbonisation de toute l'Europe qui nous menace.

Jean-Gilles Malliarakis

(1) C'est probablement cette résistance à l'usure du temps qu'on pourrait appeller, légitimement, développement durable...

(2) dans son discours introductif au projet de Code Civil de l’an IX

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