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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

MERCREDI 2 JUILLET 2003

LA COMMISSION STASI-CHIRAC SUR LA LAÏCITÉ

nous prépare de nouveaux reculs tant sur le plan de l’identité que sur celui des libertés

Ainsi donc, M. Chirac s’est cru autorisé à confier à M. Bernard Stasi, médiateur de la république assisté d’une commission de réflexion, le soin de redéfinir la laïcité française. Ceci s’inscrit en fait dans la perspective du centenaire de la loi de séparation de 1905, mais aussi dans la résultante de deux débats où l’on a vu l’impuissance de l’État français à sortir de son concept étriqué.

Retenons l’inégalité foudroyante des deux dossiers.

Il y a d’abord ce qu’on appelle le foulard à l’école, c’est-à-dire la question de savoir si l’on accepte que des musulmanes de 14 ans importent dans les établissements d’État des pratiques totalement contraires à nos mœurs et à nos conceptions. Dans cette irruption d’un mode de vie, la coiffure n’est pas seule en cause puisque ces jeunes filles se refusent aussi à la gymnastique et que, par ailleurs, les cantines doivent accepter les interdits alimentaires coraniques et que les piscines doivent renoncer à la mixité. Ceci bouleverse les habitudes de pensées des laïcistes, comme les choque profondément aussi la prétention de passer la Science au crible du Coran.

Parallèlement, quoique moins présente au quotidien dans l’existentiel des enseignants syndiqués, l’État français se trouve confronté depuis la préparation du Traité de Nice de l’année 2000 à la question des racines chrétiennes de l’Europe. Sur la pression d’abord des centrales syndicales françaises, puis de la classe politique française tout entière, c’est bien la République française et ses représentants qui ont prétendu gommer les références au christianisme dans les Traités européens à valeur constitutionnelle. Et en même temps, la démarche intellectuelle que nos énarques cherchent à faire prévaloir est de dire : les valeurs européennes priment le droit positif communautaire concret. Elles s’imposent à tous les États Membres. La contradiction est flagrante puisque ces valeurs découlent comme on devrait le savoir d’un quadruple héritage, à la fois grec, romain, hébraïque et chrétien. Gommer ces références sous prétexte de faire entrer la Turquie dans les institutions européennes, c’est attenter à l’identité commune de nos peuples.

Telle est bien, hélas ,aujourd'hui, la démarche de l’État français.

Cet État n’a inséré ce qu’il appelle la laïcité dans sa Constitution qu’à partir de la IV République et surtout de la V République.

La loi de 1905, adoptée non pas à la suite d’un travail de commission mais du fait de débats parlementaires passionnés, complexes, intégrant un compromis entre Aristide Briand et la droite catholique, avec des majorités fluctuant au gré des articles, n’était qu’une simple loi. C'est seulement par sagesse qu'elle n’a pas été révisée , en dépit de difficultés d’application certaines. On rappellera au besoin qu’il a fallu attendre un arrêt du Conseil d’État de 1921 pour que l’Église catholique soit reconnue comme conforme à une autre loi, celle de 1901, qui prétendait fonder dans notre pays la liberté d’association. Et enfin l’apaisement n’est venu que de la seconde guerre mondiale, du gouvernement de Vichy d’abord puis des majorités parlementaires de l’après-guerre où les démocrates chrétiens ont fait valider les décisions de l’autorité de fait entre 1940 et 1944…

Aujourd’hui, l’État va arriver avec ses gros pieds, ses idées courtes et ses présupposés discutables pour imposer un compromis autrement plus problématique puisqu’il s’agira de l’islam. L’interlocuteur étranger ne sera plus en Europe, au Vatican, mais réparti entre les 57 États de la conférence islamique dans des pays aussi divers que l’Algérie et l’Arabie Saoudite, la Turquie, le Pakistan, le Maroc, les frères musulmans égyptiens, les marabouts africains, etc.

Pour imposer le compromis bâtard qui naîtra des travaux superficiels de M. Stasi on triturera la liberté d’association des Français et on maltraitera un peu plus leur liberté d’association que la loi de 1901 rend paradoxalement vaine en les privant de ressources autonomes indépendantes de l’État.

Cet énorme danger passera bien sûr largement inaperçu au départ.

On dira de tel ministre qu’il a adopté une attitude ferme sur le foulard et le public bombera le torse.

Il en sera comme dans le poème de Prévert où "toute la salle se leva ivre d’histoire de France et de pontet-canet". Après cette pantalonnade on aura reculé aussi bien sur le terrain des libertés que sur celui de l’identité.

JG Malliarakis

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