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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES
JEUDI 3 JUILLET 2003
LA TECHNOCRATIE FRANÇAISE CHERCHE À UTILISER BRUXELLES POUR BROYER LES PETITS PAYS
Si nous dressons un bilan, largement positif de la présidence grecque du 1er janvier au 30 juin, nous nous exposons à de nombreuses protestations. Elles seront dautant plus paradoxales que depuis 1999 les subtilités de la politique sociale démocrate "rocardienne"de M. Constantin Simitis et celles de M. Georges Papandreou, héritier dune longue et ondoyante dynastie de politiciens, nous dépassent visiblement.
Pourtant, sans se lavouer, la plupart des observateurs ont remarqué le succès de cette présidence dans une situation particulièrement tumultueuse et sur des dossiers fort sensibles. On citera notamment la question de la politique agricole commune, celle de la fiscalité de lépargne et même le dossier explosif de la coordination des politiques étrangères en rappelant que le rôle de la présidence de lUnion est de contribuer à rapprocher les points de vue et non de trancher, puisque lEurope supranationale nexiste pas, ou pas encore.
Même les Échos du 1er juillet reconnaissant de ce point de vue lefficacité supérieure de ce quen France on a pris lhabitude dappeler des petits pays en imaginant derrière cette dénomination dédaigneuse quon a affaire à des micro-États ou à des républiques bananières.
Quil sagisse du Danemark ou de la Grèce, de la Finlande ou du Portugal, il est peut-être possible de parler de petits pays. Mais au bout du compte alors, il n'est en Europe que de petits pays. Seuls certaines nations sont encore affublées de gros États prétentieux et querelleurs. Et alors oui, mieux valent les représentants des petits pays conscients de la nécessité dune Europe des Libertés.
Seulement, lors des 6 mois si délicats de la présidence grecque, le point noir, celui qui a le plus irrité les représentants des grosses administrations, a été le déplacement de certaines réunions et les dispositions permanentes de sécurité imposées par les autorités grecques face à la mobilisation constante des groupes comme Attac de notre gloire nationale, José Bové.
M. Chirac a trouvé une réponse à cette délicate question. Pour lui tous les "sommets" européens (1) devraient se tenir à Bruxelles. Cest une logique où l'on retrouve linfluence du génie français centralisateur. Et chacun saccordera à la trouver hautement rationnelle.
Bien évidemment, si le Conseil européen devait siéger définitivement à Bruxelles, ce serait une victoire pour lEurope de conception supranationale. Cela risquerait de conduire à une décision similaire pour le Parlement européen, actuellement ballotté entre Bruxelles, Luxembourg et Strasbourg. Mais il nest pas sûr que la doctrine française, résolument "strasbourgeoise" (2) puisse résister à lappel centraliste vers Bruxelles, ni surtout que le parlement lui-même ne désire se rapprocher de ce qui sera à la fois le siège du Conseil européen, de la Commission et accessoirement des responsables de la PESC, toutes institutions que lAssemblée européenne cherche à contrebalancer.
Les technocrates français pensent disposer de Bruxelles et de la Belgique comme dune pièce maîtresse dans le jeu de ces "petits pays"quhabituellement ils dédaignent. Il est vrai quils pensent utiliser le Thalys et la Société Générale de Belgique. Mais ils se tromperaient gravement sur le véritable esprit des Flamands et des Wallons sils ne voyaient en eux que les heureux bénéficiaires dune fiscalité presque aussi lourde que celle de lHexagone.
Les technocrates français disposent à Bruxelles de quelque 200 pseudo-diplomates qui agissent en permanence pour faire pression sur les services de la Commission. En de nombreuses circonstances, notamment à lépoque de la rédaction du kilométrique accord de Maastricht de 1991, cela a certes permis de bloquer bien des choses dans le sens de létatisme. Il nest pas certain que cela dure éternellement. Bruxelles, capitale de lEurope, pourrait bien devenir un jour capitale de lEurope des Libertés.
JG Malliarakis
(1) On appelle ici "sommet"est une réunion à laquelle M. Chirac participe.
(2) S'agissant du siège de l'assemblée européenne.
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