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COURRIER DES LIBERTÉS SOCIALES

VENDREDI 1ER AOÛT 2003

IL FAUT SAUVER LE SOLDAT RYANAIR

Symbole de la concurrence face aux dinosaures du monopolisme historique hexagonal

En faisant condamner par le Tribunal administratif de Strasbourg son concurrent Ryanair, le monopoleur historique français Air France a ouvert une intéressante boîte de Pandore.

Tout d’abord, on remarquera au plan des principes, que le juge naturel d’une telle matière ne devrait plus être un Tribunal administratif, rouage interne de l’État français, mais le juge communautaire. C’est bien le rôle fondamental de la Commission de Bruxelles et, au plan strictement juridique, de la Cour de Luxembourg, que de juger de la concurrence commerciale au sein du marché commun devenu marché unique.

Dans ce cas précis, il ne faut pas oublier non plus que l’ambition de Strasbourg est de se développer comme capitale européenne. Son rôle ne se limite pas au parlement européen, mais aussi, par exemple, à une Europe qui a toujours été plus large que l’ancienne Europe des 6 (on disait en 1957, "La petite Europe"): Conseil de l’Europe, Cour européenne des Droits de l’Homme, etc.

De ce point de vue, la cité de Strasbourg, non seulement sa municipalité politique mais aussi sa Chambre de Commerce et d’Industrie, etc. seraient fondées à contester de plus en plus hautement le délaissement dans lequel l’État central français laisse cette belle ville. Cet État central ayant la prétention de monopoliser, de réglementer, de planifier les transports publics tend à développer un enclavement (paradoxal) de la capitale alsacienne. Celui-ci bénéficie historiquement, géographiquement, culturellement, en quelque sorte naturellement, d’un environnement dont seul les caprices des Frontières, tracées, au gré des conquêtes, des traités, des réannexions, des diktats linguistiques l’empêchent aujourd’hui de tirer parti. Car, malgré ce qu'on appelle la "construction de l’Europe", l’État jacobin se méfierait peut-être encore des déplacements et de la présence dans le Bas-Rhin d'un jeune ressortissant "étranger" ressemblant à un certain Jean-Wolfgang Goethe…

Bien entendu, jouer un rôle de capitale européenne (une des capitales européennes, en tout cas) suppose non seulement l’accélération des liaisons ferroviaires avec Paris, et c’est le dossier du TGV-Est mais aussi le développement de meilleures liaisons terrestres et fluviales avec les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, l’Europe du nord… Au départ de ces pays elles sont excellentes. C’est plutôt du côté de la "France de l’intérieur" que la carence est sensible.

Et elle est encore plus sensible sur le plan des liaisons aériennes non seulement avec l’hexagone mais aussi avec les autres métropoles européennes.

Or, la fréquence et le prix peu élevé des liaisons aériennes est une des conditions aujourd’hui essentielles d’un rayonnement urbain de haut niveau. Et c’est pour cela que Strasbourg a décidé de subventionner, voilà le mot clef, le mot piège, une meilleure liaison aérienne avec Londres.

Très logiquement pour permettre le service de la concurrence a joué. Et la meilleure offre est venue de l’excellente compagnie irlandaise Ryanair. Celle-ci a été, avec sa concurrente anglo-grecque Easyjet, un des pionniers du voyage aérien à bas prix sur des lignes régulières. Que n’a-t-on pas entendu, dans les cinq dernières années de sottises à propos de ces entreprises présentées par les syndicats monopoleurs comme une forme moderne de la flibuste ! Et pourtant elles ont fait largement et puissamment école, jusque dans les filiales des monopoles historiques. On ne compte plus sur le continent européen les entreprises de ce type.

S’agissant du développement de la liaison Londres-Strasbourg, la question essentielle demeure évidemment celle du prix. Car la liaison aérienne part d’un aéroport pour desservir un autre aéroport (Loi énoncée par un certain La Palice) et peu de gens (1) s'installent dans le secteur des aréoports, de sorte que la plupart des aérogares se trouvent en concurrence.

Ainsi, pour se rendre à Dublin, la plupart des Franciliens ont plutôt avantage à aller un peu au-delà de l’aéroport de Roissy malgré le prestige ambigu de "Charles De Gaulle" et à prendre à Beauvais la ligne spéciale de Ryanair.

La même concurrence existe pour la plupart des Alsaciens avec divers aéroports suisses, allemands, luxembourgeois (2).

La concurrence du service, que l’on qualifiera de public, porte donc à la fois sur celui qui demandera la moindre subvention et qui transportera finalement plus de gens, touristes, hommes d’affaires etc.

Bien entendu, le point de vue maximaliste en matière de concurrence, point de vue d’Air France dans ce litige particulier, point de vue suivi par le Tribunal administratif serait le meilleur si précisément l’intervention d’opérateurs tels que les Chambres de commerce ne subventionnaient pas de toute façon des liaisons coûtent des prix ridiculement élevés comme on a pu en subir à l’époque où l’on parlait des sous-traitants d’Air Inter proposant des Paris-Béziers deux fois plus cher que Paris-Montpellier.

La "Nouvelle République du Centre-Ouest" du 31 juillet montrait ainsi le sympathique président de Ryanair faisant la tournée de villes où il assure des liaisons, Poitiers, Tours, Niort, Châtellerault, etc.. à moindre prix pour le particulier et pour la collectivité territoriale.

Il se peut que le monopolisme français remporte quelques victoires sur le terrain judiciaire.

Mais ce seront des victoires à la Pyrrhus.

Globalement, le voyage aérien à moindre prix s’imposera en Europe, n’en déplaise à la CGT des contrôleurs de l'air ou des bagagistes, n’en déplaise aux campagnes absurdes et alarmistes contre ce qu’on appelle hypocritement déréglementation – pour faire peur aux passagers –, n’en déplaise aux tribunaux administratifs de l’État jacobin déliquescent.

La Liberté vaincra.

JG Malliarakis

  1. Hormis les électeurs communistes.
  2. À ces lignes écrites fin juillet et diffusées sur notre messagerie vocale au 08 92 68 09 56, Ryanair a d'ailleurs fait écho en susbstituant à la liaison Londres Strasbourg une liaison Londres Baden-Baden.

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